En France la tuberculose humaine est une maladie à déclaration obligatoire. Son taux d’incidence est assez faible avec 6,4 cas pour 100 000 habitants selon les données de santé publique France en 2021, la majorité des cas étant répartis en Île de France, Mayotte et Guyane. (1)
L’Homme peut être contaminé par les animaux de rente tuberculeux (bovins, caprins) par contact, par voie aérienne mais surtout par la consommation de lait cru. (2) Le développement de la stérilisation et de la pasteurisation du lait a permis de considérablement diminuer le risque d’infection de l’Homme par la tuberculose zoonose. D’un autre côté, l’Homme peut contaminer les chiens et l’apparition d’une tuberculose canine doit amener à rechercher une tuberculose humaine dans l’entourage proche de l’animal. D’où cette interrelation étroite entre tous les acteurs de la santé. (3)
Tuberculose humaine et risque pour les carnivores domestiques
Chez les carnivores domestiques, la tuberculose peut être le révélateur d’une tuberculose humaine, le chien étant plus sensible que le chat à M. tuberculosis. Toutefois les cas de tuberculose canine restent exceptionnels depuis un certain nombre d’années en raison de la diminution des cas humains (ils sont observés dans les populations à risque : personnes immunodéprimées, sans-abri, personnes étrangères venant de pays d’endémie). La tuberculose féline est plutôt liée à M. microti qui infeste les rongeurs sauvages. Bien que très rare, il semblerait que depuis quelques années l’incidence augmente légèrement au niveau mondial. En Europe, signalons toutefois que les 2 cas de transmission de tuberculose du chat à l’Homme observés en 2014 en Angleterre, n'ont été suivis d’aucun autre à ce jour.(2)
La tuberculose bovine et le risque zoonotique pour l’Homme
La tuberculose chez les bovins est une maladie qui évolue très lentement et reste très longtemps asymptomatique. Toutefois elle peut occasionner de fortes pertes économiques au sein d’un élevage (impossibilité de vente des animaux, du lait cru…). Elle se transmet principalement de bovins à bovins, lesquels peuvent excréter le bacille par aérosol ou via les urines et fèces. Celui-ci est très résistant dans les bouses où il peut persister 2 mois en été et jusque 5 mois en hiver.
Le développement de la stérilisation et de la pasteurisation du lait a permis de considérablement diminuer le risque d’infection de l’Homme par la tuberculose zoonose
C’est ainsi que la faune sauvage, en particulier les sangliers, les cerfs, les renards et les blaireaux se contaminent à leur tour puis dispersent le bacille et contaminent d’autres élevages. D’un point de vue épidémiologique, il ne semble pas que ces espèces sauvages soient un réservoir, mais plutôt des hôtes de liaison entre des bovins.
Depuis 2001, la France est reconnue officiellement indemne de tuberculose à M. bovis grâce à la mise en place de mesures de surveillance et de lutte. Cela ne signifie pas que le bacille a totalement disparu mais simplement que l’incidence de la tuberculose bovine reste en dessous du seuil européen d’incidence (soit < 0,1 % du cheptel depuis au moins 6 années consécutives). Ce statut est important à conserver.
En pratique, près d’une centaine de foyers de tuberculose bovine sont encore recensés chaque année en France et la situation de la région Nouvelle-Aquitaine reste préoccupante. (2) Si l’importation d’animaux issus de pays non indemnes de tuberculose explique en partie l’origine de certains foyers, la faune sauvage joue certainement un rôle épidémiologique notable et tout particulièrement le blaireau.
Quel est le rôle du blaireau dans la persistance de la tuberculose bovine en France ?
Parmi les animaux sauvages pouvant transmettre la tuberculose bovine, le blaireau est un animal à part car très difficile à étudier. Il vit caché dans des terriers, ne sort que la nuit et n’effectue généralement que de faibles distances lors de ses explorations. Il est particulièrement sensible à l’infection par M. bovis et ne présente bien souvent aucune manifestation de la maladie.
De plus, l’environnement des terriers (sombre et humide) semble particulièrement propice à la persistance de M. bovis. Ainsi les blaireaux d’une même colonie ont plus de risques de s’infecter entre eux que des blaireaux de colonies différentes et donc, plus la densité d’une colonie est importante, plus le risque de transmission aux bovins pourrait augmenter.
La plateforme ESA (épidémio-surveillance en santé animale) a mis au point un dispositif de surveillance (Sylvatub) de la faune sauvage et a établi une progression de la tuberculose dans la population de blaireaux recensée à proximité des foyers de tuberculose bovine (en Dordogne en particulier). (4) La régulation de la population de blaireaux par le piégeage et l’abattage autour des foyers bovins contaminés a permis d’améliorer la situation sanitaire. Depuis avril 2023, une expérimentation vaccinale est menée en Dordogne par l’OFB (office français de la biodiversité) et l’Anses pour une période de 4 ans. L’utilisation du BCG s’est montrée efficace dans les conditions expérimentales chez le blaireau en suivant un protocole où les animaux sont piégés, testés et vaccinés s’ils sont négatifs. Cette vaccination est difficile à mettre en place sur le terrain mais les essais de vaccination orale (plus pratiques car pouvant être déposée dans des appâts) n’ont malheureusement pas été concluants. Cette vaccination est déjà réalisée en Angleterre et semble porter ses fruits. Elle devrait permettre de réduire l’excrétion du bacille et ainsi la probabilité de contamination d’autres animaux.
En conclusion
La tuberculose est une zoonose devenue très rare aussi bien chez les bovins, les carnivores que chez l’Homme. Cependant il est nécessaire de maintenir une vigilance suffisante en raison de la persistance de quelques foyers en France, des possibilités de contamination de la faune sauvage et des échanges d’animaux issus de pays non indemnes.
Références :
1 Tuberculose en France : données épidémiologiques 2021, https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2023/tuberculose-en-f….
2 Guétin-Poirier V., et al. La tuberculose animale. Polycopié des Unités de maladies contagieuses des Écoles Nationales Vétérinaires françaises, Boehringer Ingelheim (Lyon), 114 p.
3. Feuille de route pour la tuberculaose zoonotique -https://www.woah.org/app/uploads/2021/03/feuille-de-route-tb-zoonotique…
4. Sylvatub (tuberculose en faune sauvage), https://www.plateforme-esa.fr/fr/sylvatub-tuberculose-en-faune-sauvage
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