• Quelles alternatives pour les patients ?
Le retrait du marché des spécialités à base de dextropropoxyphène (DXP) s’accompagne de recommandations quant aux alternatives thérapeutiques à envisager. Ne soyez donc pas surpris de voir atterrir des ordonnances d’un nouveau type sur vos comptoirs… Ainsi, en cas de douleurs aiguës nociceptives, c’est le paracétamol à dose optimale qui prime désormais en première intention. Si la sensation douloureuse est modérée, voire intense, un anti-inflammatoire non stéroïdien (à dose antalgique) en traitement court fera l’affaire. Le prescripteur pourra aussi opter d’emblée pour un antalgique de pallier II : tramadol associé ou non au paracétamol, codéine associée au paracétamol, poudre d’opium, dihydrocodéine… Si la douleur est très intense, il pourra aller jusqu’aux antalgiques de pallier III (morphine, fentanyl et autres opioïdes). Enfin, dans le cas de douleurs chroniques, le paracétamol à dose optimale, ou éventuellement un antalgique de pallier II (sauf poudre d’opium) à faible dose seront recommandés. À noter, si la consommation antérieure de DXP était importante (plus de 4 gélules par jour), le traitement antalgique de pallier II sera requis à dose moyenne, avec ou sans complément de paracétamol.
• Quelles conséquences pour les pharmacies ?
Au-delà des perturbations pour les patients habitués à utiliser ce médicament, le retrait du DXP pourrait également avoir des conséquences sur le taux de pénétration des génériques. Son arrêt de commercialisation « va faire chuter le taux de substitution de 0,5 % », prévoit ainsi Gilles Bonnefond, président délégué de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Jusqu’à la semaine dernière, le DXP figurait toujours au palmarès des molécules les plus substituées, avec un taux avoisinant les 85 %. Et, malgré un effondrement de ses ventes depuis l’annonce de son retrait et du transfert vers d’autres molécules, l’antalgique représentait en France un volume encore important de ventes. En 2010, celles-ci s’élevaient à 44 millions d’unités*, pour un chiffre d’affaires de 92,5 millions d’euros. Toutefois, avant la décision de l’Agence européenne, le volume des ventes atteignait, en 2008, près de 80 millions de boîtes pour un chiffre d’affaires de 166 millions d’euros.
• Y a-t-il eu un « effet Mediator » ?
On le sait, le retrait du Di-Antalvic, du Propofan et de leurs génériques est le résultat d’une procédure longue engagée depuis plusieurs années. Dès lors, penser que la récente affaire Mediator a pu jouer un rôle dans la décision serait incohérent. Alors pourquoi tant de bruit autour d’un retrait décidé de longue date ? Ce qui est probable, c’est que la médiatisation à outrance autour de la remise en cause de l’évaluation des médicaments amène la presse à redoubler de vigilance sur tout ce qui touche à la pharmacie. Sans compter que la publication, en janvier dernier, de la liste des 77 médicaments sous surveillance renforcée a également contribué à braquer les projecteurs sur l’offre pharmaceutique. Au total, Mediator n’a certes pas entraîné dans sa chute le Di-Antalvic, mais il a peut-être focalisé l’attention sur tout ce qui s’apparente, de près ou de loin, à une disgrâce thérapeutique…
• Qu’est-ce qui a motivé le retrait ?
Sept ans de réflexion. C’est le temps qu’il aura fallu pour que le retrait du dextropropoxyphène (DXP), opéré dès 2004 en Suède et au Royaume-Uni, trouve finalement écho en France. Pourquoi un tel délai entre ces deux décisions ? La réponse est sans doute à chercher dans les conditions d’utilisation particulières du médicament dans ces différents pays. En Suède comme au Royaume-Uni, il faut en effet se rappeler que la décision avait été prise dans un contexte d’intoxications volontaires ou accidentelles (de 200 à 400 décès par an). Un « mésusage » en revanche peu observé en France où « seulement » 65 décès de ce type ont été recensés en plus de 40 ans d’utilisation du DXP. Considérant cette distorsion de statut, et le fait que les alternatives thérapeutiques au DXP (notamment le tramadol) n’étaient pas dénuées de risque, l’Agence française du médicament n’a pas immédiatement mis en œuvre de mesures de restriction. Mais l’avis défavorable de l’agence européenne du médicament, émis le 25 juin 2009 et confirmé par la décision de la Commission européenne du 14 juin 2010, s’est finalement imposé aux autorités françaises contraintes d’emboîter le pas au reste de l’Europe.
• Pourquoi la France s’est-elle alignée sur l’Europe ?
Aurait-on atteint les limites de l’harmonisation européenne ? L’adoption un peu à contrecœur de la décision de retrait du DXP par l’AFSSAPS semble le dire… L’agence française n’avait en effet pas caché ses réticences à se mettre au diapason de l’Europe quant au statut du DXP. Des conditionnements moins « dosés » et moins adaptés à la prise massive, des indications restreintes, le statut à prescription obligatoire, et le moindre usage à fins suicidaires de la molécule, tous ces arguments avaient conduit la France à résister, le plus longtemps possible, à la pression de l’instance européenne. L’AFSSAPS jugeait par exemple qu’il aurait été plus pertinent de maintenir l’AMM du médicament en limitant la prescription à des situations justifiant son utilisation, telles que la résistance ou l’intolérance aux antalgiques de palier I ou II. Justifié ou pas, ce retrait n’a en tout cas clairement pas été un choix français.
• Pourquoi ce retrait est-il intervenu plus tôt que prévu ?
Par un avis en date du 14 juin 2010 la Commission européenne avait donné 15 mois aux pays membres de l’Union européenne pour procéder au retrait des AMM de toutes les spécialités contenant du DXP. Ce délai fixait donc le 14 septembre 2011 comme date butoir de la mesure. Pourquoi le retrait en France est-il intervenu 6 mois plus tôt ? Tout simplement parce que de nouvelles données, communiquées fin 2010 par la Food and Drug Administration (FDA) américaine, sont venues précipiter les choses. Ces études ont en effet mis en évidence un risque de modification de l’électrocardiogramme (ECG) chez des personnes âgées aux doses thérapeutiques maximales recommandées en France, en raison d’une diminution de l’élimination hépatique et rénale du DXP.
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Françoise Amouroux
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