VOILÀ DE QUOI animer une vive controverse autour du sel. Alors que les autorités de santé publique alertent de façon unanime sur les dangers de notre alimentation trop salée, un groupe de recherche européen sur l’hypertension remet en cause le bien-fondé de tels messages sanitaires dans la population générale.
Dans une étude ayant inclus 3?681 sujets sans antécédent cardio-vasculaire (CV), l’European Project on Genes in Hypertension (EPOGH), sous la direction du Belge Jan Saessen, vient de montrer qu’une faible excrétion urinaire de sel, comme reflet des apports alimentaires de sodium, est associée à une mortalité cardio-vasculaire plus élevée. Contre toute attente, il semble ainsi nocif pour la santé de recommander un régime très peu salé de façon universellle et sans discrimination. Mieux vaudrait le réserver à des populations à risque, tels que les hypertendus, chez qui le bénéfice se révèle de nouveau confirmé.
Peu de sel, plus de décès.
Cette étude prospective a inclus 3 681 sujets sans antécédent CV, issus de cohortes constituées au hasard, soit la Flemish Study on Genes, Environment, and Health Outcomes (1985-2004), soit l’European Project on Genes in Hypertension (1999-2001). Sur les 3 681 sujets, 2 096 étaient normotendus au départ et les données de préssion artérielle et d’excrétion urinaire étaient disponibles pour 1?499 sujets à l’inclusion et au cours du suivi.
L’excrétion urinaire de sodium étant le reflet de la consommation salée, des chiffres élevés
indiquent des apports importants, des chiffres faibles des apports très limités. L’excrétion urinaire de sodium était mesurée sur 24 heures, à l’inclusion et au cours du suivi (2005-2008). La mortalité et la morbidité CV étaient mesurées et le risque était exprimé par tertile d’excrétion de sodium.
Au cours du suivi de 7,9 ans en médiane, la mortalité CV chutait au fur et à mesure de l’augmentation de la consommation de sel, passant ainsi de 50 décès dans le groupe à faible excrétion de sodium (107 mmol/24 heures), à 24 dans celui à excrétion modérée (168 mmol/24 heures) et à 10 dans celui à excrétion élevée (260?mmol/24 heures), ce qui correspond respectivement à une mortalité de 4,1 %, 1,9 % et 0,8 %. Dans une analyse ajustée multivariable, il ressort que cette association inverse est significative avec un risque relatif à 1,56 pour le tertile à faible excrétion.
Hypertendus à part. Curieusement, parmi les 2 096 sujets normotendus à l’inclusion, le risque d’hypertension artérielle ne variait pas de manière significative entre les tertiles, l’incidence étant de 27 % (187) dans le groupe à faible excrétion, de 26,6 % (190) dans le groupe à excrétion modérée et de 25,4 % (175) dans le groupe à excrétion élevée.
Parmi les sujets hypertendus, la pression systolique augmentait de 0,37 mmHg par an, même si la consommation de sel ne variait pas par ailleurs. En revanche, dans une analyse multivariée, une augmentation de 100?mmol d’excrétion de sodium était associée à une augmentation de 1,71 mmHg de la pression artérielle systolique, mais sans que ne soit modifiée la pression artérielle diastolique.
« L’association entre tension artérielle systolique et l’excrétion de sodium ne se traduit pas par une morbidité plus faible, ni une meilleure survie, concluent les auteurs. Bien au contraire, une excrétion faible de sodium est prédictive d’une mortalité CV plus élevée. Pris ensemble, nos résultats vont à l’encontre des estimations des modèles actuels prévoyant une amélioration de la survie et une baisse des coûts de santé en réponse à une moindre consommation de sel. Ils ne valident pas ainsi les recommandations actuelles sur la réduction des apports en sel dans la population générale. En revanche, il n’est pas question de nier les effets bénéfiques tensionnels chez des patients hypertendus. »
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