VA-T-ON AVOIR des banques d’épiderme permettant de disposer sur le champ de larges surfaces d’épiderme toutes prêtes à être posées chez un grand brûlé ou chez un patient souffrant d’une épidermolyse bulleuse toxique (syndrome de Lyell), afin de leur permettre d’attendre une greffe autologue ? Les travaux français réalisés dans le laboratoire I-STEM (dirigé par Marc Pechanski, INSERM/UEVEU-861, I-STEM) le laissent espérer. Les chercheurs annoncent avoir réussi à recréer l’ensemble d’un épiderme par bio-ingénierie à partir de cellules souches embryonnaires humaines (CSEH).
La thérapie cellulaire développée depuis deux décennies a amélioré le pronostic des grands brûlés. Le remplacement cutané est réalisé après une mise en expansion des cellules souches kératinocytaires autologues. Mais le délai de trois semaines nécessaire pour l’obtention d’une quantité suffisante met le patient en danger de déshydratation et d’infection. Les lambeaux de peau de cadavre décellularisée et cryoconservée utilisés pour couvrir les plaies en attendant ne sont pas disponibles en quantité suffisante et sont susceptibles de rejet. Les CSEH pourraient aider à pallier ce déficit et être utilisées après expansion pour un remplacement cutané temporaire.
Les CSEH peuvent être amplifiées en quantité illimitée et poussées vers la différenciation d’un phénotype choisi in vitro, dès lors que le protocole de différenciation adéquat est appliqué.
L’équipe du laboratoire I-STEM apporte la preuve du concept que des CSEH peuvent être induites à devenir des kératinocytes possédant toutes les caractéristiques de cellules fonctionnelles, c’est-à-dire aptes à former un épiderme pluristratifié.
Sucession d’étapes.
« Nous avons abordé ce défi fonctionnel en mettant au point un protocole qui prend en compte la succession à long terme des étapes biologiques qui conduisent à la formation de l’épiderme au cours de l’ontogenèse. »
Des CSEH des lignées SAO1 (Cellartis, Suède) et H9 (Wicell, États-Unis) ont été mises à croître pendant 40 jours sur du tissu matriciel artificiel contenant des fibroblastes de souris, dans un milieu enrichi avec de la protéine morphogénique d’os (BMP4) et de l’acide ascorbique. La BMP4 inhibe l’induction neurale et maintient l’implication épithéliale, ce qui en fait un bon candidat pour stimuler les CSEH pendant les premières étapes de différenciation. L’acide ascorbique est utilisé car il stimule la différenciation vers les kératinocytes en l’absence d’acide rétinoïque.
La caractérisation moléculaire de la différenciation cellulaire est réalisée tout au long du processus par trois techniques (PCR quantitative, tri par fluorescence et immunocytochimie).
« À partir des CSEH, nous avons généré une population homogène de cellules présentant les caractères phénotypiques de kératinocytes de base. L’expression des gènes codant la kératine 14, la kératine 5, l’intégrine α6, l’intégrine ß4, le collagène VII et la laminine 5 est identique à des kératinocytes habituels. »
Après injection sur le tissu matriciel artificiel, les kératinocytes dérivés des CSEH (k-CSEH) forment un épiderme pluristratifié, avec les caractères inhérents : la kératine 14 est présente dans la couche basale, la kératine 10 dans les couches suivantes ; l’involucrine et la filaggrine, des marqueurs tardifs de la différenciation épidermique, sont détectables dans les couches les plus superficielles seulement.
Douze semaines après une greffe chez des souris immunodéficientes, les épidermes dérivés des k-CSEH présentent des structures cohérentes avec une peau humaine mature.
Ainsi, l’involucrine est de manière appropriée située dans les couches épineuses et granulaires.
« La succession des marqueurs épidermiques pendant l’ontogenèse, caractérisée par une expression temporaire stricte des molécules de structure, est répliquée dans la culture de différenciation de CSEH », notent les auteurs.
Le souci des CSEH en culture est l’association à un risque de tumorogenèse, souligne un commentateur. Toutefois, dans les essais de Guenou et coll., aucune tumeur n’est observée, le protocole sur une longue durée étant à même de réduire cette incidence.
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