UNE NOUVELLE approche, dans la recherche de gènes cibles du cancer du sein, vise à détecter des marqueurs surexprimés à un degré inhabituel. Des chercheurs de l’université du Michigan (États-Unis) viennent ainsi de mettre en évidence un récepteur à l’angiotensine II, AGTR1, qui est fortement surexprimé dans une sous-population de tumeurs ER positives représentant de 10 à 20 % des cancers du sein et qui, de plus, est distincte des cancers « ERBB2 ». Cette découverte est d’autant plus intéressante qu’elle ouvre la voie d’une thérapie ciblée innovatrice utilisant les antagonistes de l’AGTR1.
L’existence d’une amplification du récepteur ERBB2, surexprimé dans 25 à 30 % des cancers mammaires, a conduit à la mise au point de thérapies ciblées par le trastuzumab, un anticorps monoclonal dirigé contre ERBB2. Dans l’objectif de trouver de nouvelles cibles potentielles pour les thérapies anticancéreuses, les Américains ont développé une technique dénommée COPA (Cancer Outlier Profile Analysis), permettant de révéler des aberrations chromosomiques à partir des surexpressions géniques, à l’issue d’analyses du transcriptome par puce. Cette approche, qui a déjà porté ses fruits avec la découverte, par l’équipe de l’université du Michigan, d’une surexpression des oncogènes ERG et ETV1 dans le cancer de la prostate, a été étendue à une métaanalyse de 3 200 tissus de cancer du sein analysés par puces à ADN.
Le récepteur de type 1 à l’angiotensine II.
Les chercheurs ont identifié 159 « meta-outliers » (soit des gènes surexprimés et retrouvés dans un nombre statistiquement significatif d’analyses) et ont resserré leurs recherches sur une vingtaine d’entre eux. Le gène ERBB2 s’est révélé le plus fréquemment surexprimé dans ces échantillons de tissus cancéreux. Le gène le plus souvent surexprimé après ERBB2 (21/29 recueils de données, 72 %) était AGTR1 (surexprimé dans 15/22 analyses, 68 %), le gène codant pour le récepteur de type 1 à l’angiotensine II sur le chromosome 3q. Il a ensuite été établi que ce gène était fortement surexprimé uniquement dans les sous-populations tumorales ER+ (estrogen receptor positive) et jamais dans les tumeurs surexprimant ERBB2. Le gène AGTR1 est ainsi surexprimé dans les 10 à 20 % de tumeurs ER+, ERBB2-.
Les Américains ont ensuite calculé cette surexpression par RT-PCR quantitative. Ils montrent que l’expression d’AGTR1 est multipliée par 20 dans 7 des 45 tumeurs analysées et par plus de 100 au niveau de deux tumeurs primitives et d’une tumeur métastatique.
Quel est le mécanisme de cette surexpression ? Tout d’abord, l’expression du gène AGTR1 est indépendante de celle des gènes proches de lui sur 3q. Une analyse FISH a ensuite permis de conclure que cette surexpression n’est pas liée à des remaniements génomiques. Un accroissement du nombre de copies du gène (par rapport aux contrôles) a été retrouvé dans 7/112 carcinomes mammaires (6,25 %), dont 6 cancers invasifs canalaires. Il s’avère qu’il existe, d’après une étude portant sur 21 cas, une relation significative entre le degré élevé d’expression d’AGTR1 et l’accroissement du nombre de copies (p = 0,006), même si cette corrélation n’est pas exclusive (il existait également une surexpression sans accroissement de copies dans quelques cas). Il est donc vraisemblable que, si l’accroissement des copies participe au phénomène de surexpression d’AGTR1, il n’en est pas le mécanisme principal.
De manière dose-dépendante et spécifique.
Enfin, la fonction de la surexpression d’AGTR1 a été étudiée par l’infection de cellules épithéliales (bénignes) mammaires humaines H16N2 et HME par un adénovirus exprimant AGTR1. La surexpression d’AGTR1, lorsqu’elle était associée à une stimulation de l’angiotensine II, provoquait le caractère fortement invasif des cellules épithéliales. Ce phénomène était atténué par l’administration de losartan, un antagoniste de l’angiotensine II, de manière dose-dépendante et spécifique. Le losartan induit, par ailleurs, une réduction de la croissance tumorale de 30 %, à 8 semaines, dans un modèle de xénogreffe murin AGTR1-positif.
La surexpression du récepteur AGTR1 permet donc de définir une nouvelle sous-population de cancer du sein ER-positif, ERBB2-négatif qui apparaît sensible à une thérapie anticancéreuse ciblée potentielle utilisant les antagonistes de l’angiotensine II, tels que le losartan.
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