Le recours aux antalgiques opiacés forts a nettement augmenté dans notre pays au cours de ces dix dernières années. 1,1 % des Français en consomment au moins une fois dans l'année, contre 0,54 % en 2004, selon l'Observatoire français des médicaments antalgiques (OFMA).
Parallèlement à cette hausse de la consommation d'antalgiques opiacés forts, l’OFMA note une augmentation des hospitalisations pour surdosage d'antalgique de 167 % entre 2004 et 2017 (2 586 hospitalisations/million d'habitant en 2017) et de 146 % en 10 ans du nombre de décès (3,2/million en 2015). Comment expliquer ce phénomène ? « Les prescriptions pour des douleurs non cancéreuses ont augmenté de 88 %, indique le Pr Nicolas Authier (CHU de Clermont-Ferrand), directeur de l’OFMA et membre de la commission des stupéfiants et des psychotropes de l'ANSM. Or on constate que c'est généralement dans ces indications que les prises d'opiacés dérapent et que l'addiction s'installe. » Selon lui, les opiacés bénéficient d'un effet psychotrope apaisant et parfois sédatif qui peut se traduire par un effet anxiolytique ou antidépresseur, pouvant conduire les patients à un surdosage progressif.
Pour le Pr Authier, la buprénorphine peut être une alternative aux opiacés, sachant qu’elle était à l’origine conçue comme un anti-douleur et qu’elle présente une meilleure sécurité d’emploi que celle de la codéine et du tramadol. Quant à l’usage du cannabis thérapeutique, Nicolas Authier ne semble pas y voir un réel intérêt, en tout cas pour le moment. « Le cannabis n'est pas une substance anodine et n'a a priori pas un effet majeur, explique-t-il. Aux États-Unis, c'est une piste sérieuse car la crise sanitaire est telle qu'ils n'ont pas grand-chose à perdre à tenter cette approche. En France, la crise est bien moindre et il n'y a pas une telle urgence. Toutefois, il est possible que l'on puisse se servir du cannabis thérapeutique dans une petite partie de la population avec des troubles anxieux ou qui sont réfractaires aux antalgiques. »
Avec « le Quotidien du Médecin ».
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