DÈS LORS QUE les observations sur le modèle animal seraient confirmées à l’échelle humaine, « si on intervient suffisamment tôt, on peut être capable d’aider les enfants souffrant de trisomie 21 à traiter et à moduler les nouvelles informations », écrit Ahmad Salehi, premier auteur de l’étude. « Théoriquement, nos observations pourraient aboutir à une amélioration des fonctions cognitives de ces enfants. »
Chez les patients souffrant de trisomie 21, causée comme chacun sait par une copie surnuméraire du chromosome 21, Salehi et coll. observent que le déficit cognitif n’est pas global et uniforme, mais qu’il existe un dysfonctionnement qui s’exprime selon l’implication de différentes structures cérébrales.
Fonction gérée par l’hippocampe.
En clair, ces patients, mis dans une situation nouvelle, ont des difficultés à utiliser sur le mode spatial et contextuel les informations acquises. Une fonction qui est gérée par l’hippocampe. Avec comme résultat une difficulté à naviguer dans des environnements complexes (un voisinage un peu éloigné ou un centre commercial). En revanche, ces individus sont plus performants pour se remémorer des informations associées à des couleurs, à des sons ou à d’autres indices apportés par les organes des sens.
Les mémoires contextuelle et spacio-relationnelle sont sous la dépendance du fonctionnement de l’hippocampe, alors que la mémoire sensorielle est coordonnée à une autre structure cérébrale, l’amygdale. Chez les individus normaux, lors de la mise en jeu de la mémoire spacio-contextuelle, les neurones de l’hippocampe reçoivent de la norépinéphrine distribuée par des neurones provenant d’une autre région du cerveau, le locus cœruleus. La norépinéphrine a été impliquée dans de nombreux processus neurologiques, comprenant la consolidation de la mémoire, la récupération du souvenir et la potentiation à long terme.
Pour examiner finement les dysfonctionnements du cerveau, Salehi et coll. ont travaillé avec une souris génétiquement modifiée, portant trois copies d’un fragment du chromosome 16 murin.
Les chercheurs montrent que, tout comme les humains souffrant de trisomie 21, les souris modèles de la maladie présentent une dégénérescence précoce du locus cœruleus. Ces animaux échouent à des tests cognitifs simples qui nécessitent de s’adapter au changement de milieu. Ainsi, placées dans une nouvelle cage, elles ne construisent pas leur nid, comme elles le font dans leur cage connue, ni comme le fait une souris témoin.
La prodrogue se convertit en norépinéphrine.
Les chercheurs ont fait une tentative thérapeutique consistant à donner un précurseur de la norépinéphrine aux souris génétiquement modifiées (L-threo-dihydroxyphénylsérine ou xamotérol ou L-DOPS). La prodrogue se convertit en norépinéphrine dans le cerveau.
Quelques heures après, les souris porteuses de la maladie ont commencé à construire un nid et ont exécuté des tests cognitifs de la même manière que des souris euploïdes.
L’examen du tissu cérébral de l’hippocampe des souris altérées montre que de la réponse cellulaire à la norépinéphrine est toutefois conservée. L’effet des médicaments se met rapidement en œuvre et s’efface tout aussi rapidement.
Une stimulation de la voie de signalisation de la norépinéphrine a été explorée pour des raisons chirurgicales. Certains produits, déjà sur le marché pour traiter la dépression ou l’hyperactivité-déficit de l’attention (atomexetine), ciblent le système de la norépinéphrine. Les auteurs appellent à effectuer des tests chez des sujets souffrant de trisomie 21.
D’autres études ont ciblé l’acétylcholine, qui agit également au niveau de l’hippocampe. Salehi et coll. postulent qu’une amélioration de l’état de ces patients nécessiterait une action au niveau de ces deux voies de signalisation.
« Cette nouvelle étude donne aussi pour la première fois la notion d’un lien direct entre un défaut du locus cœruleus et l’effet d’un gène spécifique. » Dans la trisomie 21, il y a une copie supplémentaire d’un gène nommé APP (précurseur de la protéine amyloïde, sur le chromosome 21). Des recherches ont lié APP à la maladie d’Alzheimer, une maladie où l’orientation spatiale et la formation de la mémoire sont altérées.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques