Quelques définitions
- Conjonctive (ou sac conjonctival) : fine muqueuse vascularisée. On distingue la conjonctive bulbaire, qui tapisse la sclère (partie blanche de l’œil), les culs-de-sac conjonctivaux (fornix) et la conjonctive palpébrale, qui tapisse la face interne des paupières. Seule la conjonctive bulbaire est visible. D’un point de vue fonctionnel, la conjonctive permet notamment la motilité du globe oculaire. Elle protège également des germes pathogènes, par la présence de cellules de l’immunité.
- Conjonctivite : affection oculaire fréquente correspondant à l’inflammation de la conjonctive. Elle est caractérisée notamment par une vasodilatation. On distingue les conjonctivites infectieuses et les conjonctivites non infectieuses, ces dernières résultant d’une irritation persistante comme un manque de larmes, d’une allergie ou d’une irritation par des toxiques (fumée, poussière).
- Blépharite : inflammation du bord libre des paupières.
- Kératoconjonctivite : inflammation de la cornée et de la conjonctive.
- Hyperhémie conjonctivale : c’est le terme médical pour traduire l’œil rouge.
- Éversion de la paupière : cet acte est nécessaire pour affiner le diagnostic de la conjonctivite. Il permet notamment d’observer la conjonctive palpébrale ou de mettre en évidence un corps étranger.
- Œil sec : sécheresse de la conjonctive et de la cornée. C’est une affection très fréquente chez les personnes de plus de 50 ans, les femmes étant les plus touchées en raison de la ménopause.
- Orgelet : infection bactérienne aiguë d’une ou plusieurs glandes des paupières. L’orgelet est douloureux et purulent.
- Chalazion : inflammation par accumulation des sécrétions des glandes situées au niveau de la paupière. Contrairement à l’orgelet, il est indolore.
Un peu de physiopathologie
L’œil sec, ou kératoconjonctivite sèche.
Outre un symptôme, l’œil sec peut être une maladie en soi. La sécheresse oculaire peut résulter d’une diminution de la production de larmes. C’est le cas dans la polyarthrite rhumatoïde, ou suite à des lésions des glandes lacrymales. Une autre cause de la sécheresse oculaire est l’altération de la composition des larmes, notamment du film lipidique, liée à une carence en vitamine A, à la prise de certains médicaments comme les antidépresseurs ou les rétinoïdes, à la pollution ou à la fumée de cigarettes. Il peut s’agir enfin d’une intolérance aux lentilles cornéennes.
D’un point de vue symptomatique, la sécheresse oculaire se traduit par une sensation de brûlure, par une rougeur et par une lacrymation réflexe.
L’œil rouge.
L’œil rouge est un symptôme fréquent au comptoir. Il peut traduire une conjonctivite, mais également une pathologie plus grave telle qu’une kératite, une uvéite, une épisclérite ou un glaucome aigu par fermeture de l’angle, nécessitant une consultation médicale d’urgence.
Dans le cas de la conjonctivite, l’œil est rouge au niveau des culs-de-sac conjonctivaux. Au comptoir, deux éléments essentiels sont à retenir : l’absence de douleur et l’absence d’une baisse de l’acuité visuelle.
On distingue les conjonctivites virales, bactérienne, allergique et toxique. S’il s’agit d’une conjonctivite virale, on observe des sécrétions claires. Les deux yeux sont très souvent atteints, du fait de la grande contagiosité. L’état général peut être affecté, avec parfois présence de fièvre. La conjonctivite virale est très fréquente. Dans le cas de la conjonctivite bactérienne, les sécrétions sont purulentes, à l’origine des croûtes jaunes.
La conjonctivite allergique se manifeste par un prurit. Les sécrétions sont blanchâtres. Après éversion de la paupière supérieure, on observe une structure papillaire « en pavés », caractéristique des conjonctivites allergiques.
Enfin, la conjonctivite toxique résulte de l’irritation de la conjonctive. La fumée, le vent, la piscine, la poussière ou un corps étranger sont les principales causes.
L’hémorragie sous-conjonctivale.
L’œil « rempli de sang » est un symptôme impressionnant et de ce fait inquiétant. Pourtant, cette hémorragie sous-conjonctivale est le plus souvent sans gravité. Elle ne provoque ni douleur, ni baisse de la vision. Elle résulte de la rupture d’un petit vaisseau, liée à la fragilité capillaire. Elle peut faire suite à un effort ou à une toux. Trois causes ne doivent cependant pas être écartées : un surdosage en AVK, une plaie du globe oculaire ou un accès hypertensif.
Les mots du conseil
Si le diagnostic ne relève pas du pharmacien, il est cependant essentiel de reconnaître et d’analyser certains aspects symptomatiques et étiologiques, afin d’orienter le patient vers la consultation médicale si nécessaire. Ainsi, au comptoir, devant un œil rouge, deux questions sont essentielles : l’œil est-il douloureux ? La vision est-elle altérée ?
Le seul cas pouvant faire l’objet d’un conseil officinal est l’œil rouge sans baisse d’acuité visuelle et sans douleur. En effet, l’œil rouge douloureux s’accompagnant d’une baisse de la vision nécessite un examen ophtalmologique. Il peut être la manifestation d’un glaucome aigu par fermeture de l’angle, d’une uvéite ou d’une kératite. À noter que la photophobie associée est également un signe de gravité.
L’œil rouge douloureux mais sans baisse de l’acuité visuelle correspond quant à lui à une épisclérite, nécessitant une corticothérapie locale.
Reste donc le cas où l’œil rouge ne s’accompagne ni de douleur, ni de baisse de l’acuité visuelle, permettant d’envisager une conjonctivite. La conjonctivite bactérienne nécessite une prise en charge médicale, avec antibiothérapie. De même, pour les conjonctivites virales, le risque de complication en kératite oriente vers une consultation médicale. Dans ces deux cas, en guise de traitement symptomatique, le pharmacien peut dans un premier temps délivrer un antiseptique local et recommander un lavage oculaire au sérum physiologique. Il conseillera également d’interrompre le port des lentilles de contact jusqu’à guérison. Il est important de sensibiliser le patient à la contagiosité des conjonctivites virales et à l’importance de se laver les mains.
La plupart des produits disponibles sans ordonnance sont indiqués en cas d’irritation conjonctivale non infectieuse ou en cas de conjonctivite allergique. À défaut d’observation et d’éversion de la paupière supérieure qui permettrait de mettre en évidence la présence d’un corps étranger, l’interrogatoire du patient portant sur les causes éventuelles oriente le pharmacien sur la démarche à suivre et sur la nécessité d’une consultation médicale. Il est important de garder à l’esprit que la conjonctivite chronique n’existe pas et qu’un tel symptôme, s’il est fréquent chez un même patient, peut évoquer des troubles de la réfraction (hypermétropie, astigmatisme), un strabisme ou un syndrome de l’œil sec, ce dernier cas pouvant être causé par un médicament.
En terme de confort oculaire, les conseils pharmaceutiques portent également sur le bon usage des collyres, en particulier l’importance d’attendre 15 minutes en cas d’administration d’un autre collyre et les délais de conservation courts (15 jours ou 1 mois pour les flacons). Les récipients unidoses sont à jetés immédiatement après utilisation.
Généraliste ou ophtalmologiste ?
Si une consultation médicale est nécessaire, vers qui faut-il directement orienter le patient ? Généralement, l’orgelet, le chalazion, la blépharite et la conjonctivite peuvent être pris en charge par le généraliste. En revanche, en présence de douleur, de baisse de l’acuité visuelle, d’un œdème et de photophobie, un avis spécialisé s’impose.
Les produits du conseil
Si l’on se réfère à la liste des médicaments de médication officinale, seuls trois produits sont inscrits dans l’indication « troubles oculaires ». Autrement dit, à ce jour, le patient ne peut avoir accès directement qu’à un antiseptique (Dacryum) et un antihistaminique en flacon ou unidoses (Humex conjonctivite allergique 2 %). Pourtant, le marché des produits pour les troubles oculaires est plus large, en commençant par les solutions de lavage oculaire. Ces dernières contiennent du chlorure de sodium, seul ou associé à un composant antiseptique tel que le borax et l’acide borique (Dacryosérum, Dacudoses, Dacryum, Stéridose). On citera également l’acide salicylique (Sophtal, Antalyre, Ciella). Optrex associe l’acide salicylique, l’hamamélis, le chlorobutanol, l’acide borique et l’alcool.
En phytothérapie, Sensivision (plantain) peut être utilisé en cas d’irritation ou de gêne oculaire due à des causes diverses (atmosphère enfumée, effort visuel soutenu, bains de mer ou de piscine, etc.). Ces produits de lavage peuvent être proposés pour l’hygiène oculaire en cas de conjonctivite ou de blépharite. Une intolérance à l’un des constituants est parfois observée.
On distingue ensuite les collyres antiseptiques, composés d’ammoniums quaternaires (Biocidan, Novoptine, Bactyl), d’agents antibactériens tels que l’hexamidine (Desomedine) ou bactériostatique (Vitabact). L’oxyde mercurique (Oxyde mercurique jaune Chauvin) est indiqué dans le traitement local des blépharites infectieuses, notamment parasitaires. À noter que, selon un accord professionnel fort, les produits associant un antiseptique et un vasoconstricteur (phényléphrine, synéphrine) ne sont pas recommandés pour traiter les infections de surface (Sedacollyre). Les vasoconstricteurs sont par ailleurs absolument contre-indiqués en cas de glaucome à angle étroit.
Pour soulager les symptômes de la conjonctivite allergique, le conseil porte sur des collyres à base de cromones (Humex conjonctivite allergique, Ophtacalm) ou d’antihistaminique H1 (Allergiflash). En homéopathie, on citera les produits à base d’euphrasia (homeoptic, lehning 115, abbé chaupitre 66).
En cas de fragilité capillaire conjonctivale, le collyre Vitarutine à base de nicotinamide et de sulforutoside peut être conseillé.
Larmes artificielles.
Le traitement de l’œil sec consiste en l’instillation de larmes artificielles. Les produits disponibles sur le marché présentent des viscosités différentes, certains gels présentant une longue durée d’action. Parmi ces produits, il y a des médicaments et des dispositifs médicaux, parfois remboursables au titre de la LPPR. Les agents de viscosité les plus courants sont les carbomères (Celluvisc, Civigel, Lacrigel, Siccafluid, Refresh…) et l’hyaluronate de sodium (Vismed, Vitadrop, Hylovis, Hyaline). Certains produits sont également indiqués la lubrification des lentilles de contact (Hyabak). Qu’il s’agisse d’un conseil ou d’une délivrance suite à une prescription, le pharmacien pourra recommander un humidificateur d’ambiance pour le domicile. Attention aux ventilateurs, dans les voitures notamment ! Ils accentuent l’assèchement oculaire. De même, il est important de vérifier que le produit délivré est compatible avec le port de lentilles de contact.
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Françoise Amouroux
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