Un père de famille demande la pilule du lendemain pour sa fille âgée de moins de 18 ans. La pharmacienne exige la présence au comptoir de la jeune fille ou d’échanger avec elle au téléphone. À l’issue de la conversation, la pharmacienne décide de ne pas honorer la délivrance du contraceptif d’urgence et réplique : « Il va falloir que votre fille voie un médecin pour lui expliquer comment elle en est arrivée là. »
Si la forme ne peut qu’être reprochée, cette scène relayée sur Twitter soulève une question de fond : le refus de la pharmacienne est-il justifié ou contraire aux dispositions du code de la Santé publique qui visent à faciliter l’accès à la contraception d’urgence ?
• La dispensation à distance de la pilule du lendemain
« Même si la dispensation n’est pas conditionnée par la présentation d’une ordonnance, la pilule du lendemain n’est pas en vente libre », prévient Valérie Siranyan, maître de conférences en droit pharmaceutique à la faculté de pharmacie de Lyon. Chaque demande doit être évaluée au cas par cas. Le pharmacien doit notamment vérifier que la situation de la jeune fille correspond bien aux critères d’urgence et aux conditions d’utilisation de cette contraception. Si la jeune fille ne peut pas venir à la pharmacie, il faut impérativement un contact avec elle. « L’entretien en face-à-face est à privilégier. Mais s’il est impossible en raison notamment de la détresse de la jeune fille, on peut tolérer un simple contact téléphonique. Le critère d'urgence justifie la dispensation à distance », explique Valérie Siranyan.
En revanche, le père de famille ne peut pas bénéficier de la gratuité de la pilule du lendemain accordée aux jeunes filles mineures.
• Le pouvoir de dire « oui » et le devoir de dire « non »
La clause de conscience ne peut être invoquée pour refuser la délivrance. La seule raison valable, qui prévaut sur toute autre considération, c'est l'intérêt de la patiente. Si le pharmacien a le moindre doute sur l’opportunité de la dispensation et s’il estime qu’il existe un danger pour la santé de la jeune fille, son refus constitue une obligation. Cela ne l’exonère pas d’un devoir de loyauté et d’informations. Un « non » catégorique et expéditif n’est pas une option. « Si le pharmacien refuse, il doit se soucier du suivi. Par exemple, faciliter le rendez-vous avec un médecin, avec l’accord à distance de la patiente », précise Valérie Siranyan.
Selon l’article R.4235-48 du Code de la santé publique, « le pharmacien doit […] participer au soutien apporté au patient ». Sans perdre de vue qu'il engage sa responsabilité, y compris en cas de refus de dispensation. « Tout acte pharmaceutique doit être rigoureusement évalué », conclut Valérie Siranyan.
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