« DEPUIS toujours, la cause du bégaiement est demeurée un mystère. Cette étude est la première à identifier des mutations génétiques potentiellement responsables de bégaiement ; elle pourrait aboutir à un élargissement spectaculaire de nos options thérapeutiques », souligne dans un communiqué le Dr James Battey, directeur du National Institute on Deafness and Other Communication Disorders (NIDCD), une section des NIH aux États-Unis.
Le bégaiement est un trouble de la parole caractérisé par la répétition, la prolongation ou l’interruption dans le flot des mots. Il apparaît en général durant l’enfance (entre 3 et 6 ans), mais, si 5 % des enfants d’âge préscolaire en sont atteints, il ne persiste que chez 1 % de la population. Les thérapies incluent la réduction de l’anxiété, la régulation de la respiration et du rythme de la parole, ainsi que l’emploi de dispositifs électroniques pour améliorer la fluidité des mots. Il est observé dans toutes les populations.
Se retrouve dans certaines familles.
Le bégaiement a tendance a se retrouver dans certaines familles. La susceptibilité génétique est cependant complexe, multifactorielle et hétérogène. Dans une précédente étude de liaison menée sur des familles consanguines au Pakistan, l’équipe du Dr Dennis Drayna (États-Unis) avait identifié la plus forte association entre le bégaiement et des marqueurs situés sur le chromosome 12.
Dans la nouvelle étude, Kang, Drayna et coll. précisent la situation du locus sur le chromosome 12, en se concentrant sur la plus vaste famille pakistanaise atteinte de bégaiement (PKST72) et en recrutant d’autres membres de la famille.
Ils ont réussi à découvrir dans cette grande famille consanguine une mutation ponctuelle (G3598A) du gène GNPTAB (N-acétylglucosamine-1-phosphate transférase) qui est associée au bégaiement.
Le gène GNPTAB encode deux sous-unités catalytiques (alpha et bêta) de l’enzyme GNPT (GlcNAc-phosphotransférase), impliquée dans la dégradation et le recyclage lysosomial des composants cellulaires.
Ils ont séquencé ensuite le gène GNPTAB chez un membre atteint de chacune des 46 autres familles pakistanaises de l’étude de liaison. Ils ont identifié la même mutation chez 5 autres individus bègues (homozygotes ou hétérozygotes), soit chez 10 % des familles pakistanaises atteintes par le bégaiement.
À l’inverse, ce variant (G3598A) n’était observé que chez 1 des 96?témoins pakistanais non bègues. Ce variant a aussi été observé chez
1 personne (d’origine asiatique indienne) bègue parmi 270 personnes atteintes en Amérique du Nord et au Royaume-Uni, mais n’a pas été retrouvé chez 276 témoins américains indemnes.
L’équipe a découvert également 3 autres mutations du gène GNPTAB chez 4 individus bègues d’origine pakistanaise ou américaine. Ces mutations étaient absentes chez les témoins.
La même voie lysosomiale métabolique.
Afin de rechercher si d’autres gènes mutés dans la même voie lysosomiale métabolique pouvaient être responsables de bégaiement, les chercheurs ont séquencé le gène GNPTG, qui encode la sous-unité gamma du GNPT, ainsi que le gène NAGPA, qui encode une autre enzyme de cette voie.
Ils ont identifié 3 variants du gène GNPTG, chez 4 individus bègues d’origine asiatique et européenne (aucun chez les témoins), et 3 variants du gène NAGPA seulement dans la population touchée d’origine européenne, chez 6 des 270 personnes bègues (2 % ; aucun chez les témoins).
Les 3 gènes GNPTAB, GNPTG et NAGPA encodent des enzymes qui déclenchent ensemble le signal mannose-6-phosphate sur les hydrolases, un signal utilisé par les cellules pour diriger les hydrolases de l’appareil de Golgi vers les lysosomes.
Cette découverte ouvre de nouvelles voies de recherches thérapeutiques. Les chercheurs se demandent, par exemple, si une thérapeutique de remplacement enzymatique ne pourrait pas être une méthode de traitement pour certains cas de bégaiement. Ils estiment que 9 % des personnes qui bégaient portent des mutations de l’un des 3 gènes identifiés.
L’équipe envisage maintenant de conduire des études épidémiologiques afin de préciser le pourcentage de personnes portant une ou plusieurs de ces mutations, ainsi que des études biochimiques pour déterminer comment ces mutations agissent sur les enzymes. L’objectif a terme sera de déterminer comment ces anomalies métaboliques perturbent les structures cérébrales essentielles pour la parole fluide.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques