Les mots du client
- « Je suis hypertendu et pourtant je ne ressens jamais aucun symptôme.
- Ma tension change d’un moment à l’autre de la journée.
- Le médecin a dit à mon mari de maigrir. »
Rappel physiopathologique
L’hypertension artérielle (HTA) constitue à la fois une maladie, un symptôme, un facteur de risque et un facteur aggravant de nombreuses affections rénales.
On entend par « hypertension artérielle » une pression artérielle trop élevée en permanence (selon les recommandations de l’HAS : au moins 2 mesures par consultation, au cours de 3 consultations successives, sur une période de 3 à 6 mois), égale ou supérieure à 140 mm de mercure pour la pression artérielle systolique (la systole correspond à la contraction du cœur) et à 90 mm de mercure pour la pression artérielle diastolique (la diastole correspond au relâchement du cœur entre deux contractions), mesurées au cabinet ou à 135/85 en automesure et 130/80 en MAPA** de 24 heures.
En pratique, on distingue 3 principaux stades, en fonction des niveaux de la pression artérielle systolique (PAS) et/ou diastolique (PAD) :
- HTA « légère », grade 1 : PAS 140 - 159 ou PAD 90 - 99
- HTA « modérée », grade 2 : PAS 160 - 179 ou PAD 100 - 109
- HTA « sévère », grade 3 : PAS› 180 ou PAD› 110
Cela étant, il a été montré que la morbi-mortalité cardiovasculaire augmente de façon linéaire avec les chiffres de la pression artérielle à partir de 115/75 mm de mercure.
Chez l’adulte, dans environ 95 % des cas, l’hypertension artérielle n’ayant pas de cause précise est dénommée hypertension artérielle essentielle ou primaire.
À l’inverse, l’hypertension artérielle de l’enfant et de l’adolescent est secondaire dans plus de 95 % des cas.
Longtemps asymptomatique.
L’hypertension artérielle est fréquemment longtemps asymptomatique, sauf dans les hypertensions très sévères qui peuvent s’accompagner de céphalées, nausées et vomissements. Dans la plupart des cas, elle est donc découverte lors d’un dépistage systématique. Mais la dyspnée à l’effort est relativement fréquente (sous la forme d’un discret essoufflement), à condition d’y prêter attention, car elle est longtemps modeste. Celle-ci est liée à l’hypertrophie ventriculaire gauche, jointe à un certain degré d’insuffisance diastolique. Des sensations vertigineuses passagères, ne causant pas de chute, sont possibles mais relativement rares. Il en est de même des bourdonnements d’oreille.
Surtout, l’hypertension est un facteur de risque majeur de l’athérosclérose avec toutes ses complications. En outre, elle est directement responsable de complications cardio-vasculaires, rénales et neurologiques, le risque étant proportionnel aux chiffres de la pression artérielle. Les complications les plus fréquentes d’une HTA non ou mal traitée sont représentées par l’insuffisance coronarienne, l’infarctus du myocarde, les accidents vasculaires cérébraux, l’insuffisance cardiaque, l’artériopathie des membres inférieurs, l’insuffisance rénale, l’encéphalopathie hypertensive et la rétinopathie maligne.
Les questions à l’officine
J’aimerais prendre un seul médicament pour contrôler mon hypertension artérielle. Est-ce possible ?
C’est théoriquement possible, mais on ne peut pas actuellement en décider à la mise en place du traitement. En effet, une monothérapie contrôle une hypertension artérielle dans 30 à 40 % des cas seulement. C’est aussi une question de dose, qu’il faut augmenter progressivement pour minimiser les effets indésirables. Il n’est souvent guère possible non plus, sauf certaines exceptions, de savoir quelle classe d’antihypertenseurs a le plus de chances d’avoir la plus grande efficacité chez une personne donnée, ce qui peut justifier des essais successifs. En tout état de cause, il faut attendre au moins un mois, voire deux, pour juger de l’effet d’un médicament donné sur la pression artérielle, car il existe un « effet temps ». Sinon, il faudra passer à une bithérapie, qui contrôle, en moyenne, 70 % des hypertensions artérielles, voire même une trithérapie le cas échéant.
Je suis obèse et mon médecin me dit que mon HTA peut être en rapport avec des apnées du sommeil. Qu’en pensez-vous ?
En effet, une hypertension artérielle est retrouvée chez environ une personne sur deux atteintes d’un syndrome d’apnées du sommeil et 70 % de ces dernières sont obèses. Un tel syndrome est identifié dans 80 % des cas d’hypertension résistante au traitement, qui d’ailleurs ne correspond pas obligatoirement à une hypertension sévère, mais à l’impossibilité de réduire la pression artérielle en dessous de 140/90 en dépit d’une association de trois médicaments antihypertenseurs administrés pendant au moins un mois.
Dans ce cas, il est conseillé de compléter la prise d’un traitement antihypertenseur par une diminution du poids et une prise en charge adéquate du syndrome des apnées obstructives du sommeil.
Dois-je restreindre ma consommation d’alcool ?
Certainement si elle est excessive, ce qu’il faudrait déterminer, dans le cadre d’une bonne hygiène générale de vie. Consommation qu’on a d’ailleurs très souvent tendance à sous-estimer ! Mais s’il existe bien une corrélation entre l’absorption d’alcool et l’hypertension artérielle, surtout si l’alcool est consommé en dehors des repas, la quantité d’alcool occasionnant une hypertension n’est pas clairement définie à ce jour. Il est donc conseillé d’en parler à son médecin.
Chez le médecin
La prise en charge d’une HTA implique toujours la réalisation d’un bilan initial, comprenant un examen clinique complet, le calcul de l’IMC, complété par la détermination de quelques paramètres biologiques, comme la kaliémie (une hypokaliémie oriente vers un hyperaldostéronisme), un bilan lipidique, une glycémie à jeun, une micro-albuminurie/protéinurie et la créatininémie (qui renseigne sur l’état rénal) ; un électrocardiogramme et éventuellement une échographie cardiaque ou un écho-doppler.
Il convient de toujours rechercher une éventuelle HTA secondaire, qui pourrait être curable.
Une cause de plus en plus fréquente d’hypertension secondaire va probablement être représentée par la prise au long cours de médicaments anti-angiogéniques utilisés comme antitumoraux. En effet, tous ces produits, exercent une toxicité vasculaire et rénale, pouvant se traduire par une hypertension artérielle et une protéinurie.
Un moment important de la démarche du médecin réside dans la quantification du risque cardiovasculaire global propre à chaque patient (incluant la recherche d’une atteinte, fréquente, des organes cibles), qui va conditionner la décision de traiter, l’intensité du traitement et les objectifs tensionnels à atteindre. Il tiendra aussi compte des contre-indications propres à chaque classe médicamenteuse.
Le suivi du traitement antihypertenseur doit aussi intégrer la surveillance régulière de l’état des organes cibles dont l’altération peut être irréversible.
Le traitement
Dans l’immense majorité des cas, le but minimal est de ramener la pression artérielle en dessous de 140/90 mm de mercure. En ce qui concerne les sujets âgés, il est plus difficile d’abaisser la PAS (qui de plus augmente avec l’âge) et les objectifs tensionnels peuvent être moins ambitieux, surtout au-delà de 80 ans, et il convient alors d’adapter très progressivement la posologie.
Les objectifs tensionnels peuvent être différents en fonction de l’état physiopathologique, c’est ainsi qu’en ce qui concerne les diabétiques (et les patients à très haut risque cardiovasculaire) on cherchera à obtenir un contrôle tensionnel très strict, inférieur à 130/80 mm de mercure ; en pratique difficile à obtenir.
Bien entendu, il faut encourager le développement de l’auto-mesure au cours du traitement qui a fait ses preuves pour améliorer l’observance, absolument essentielle comme l’on sait.
À savoir : efficacité et tolérance d’un traitement antihypertenseur doivent être systématiquement évaluées après un délai de 4 à 8 semaines.
Les médicaments.
Les méta-analyses ont confirmé une efficacité similaire, au regard de leur capacité à réduire le niveau de la pression artérielle (pour tous la diminution est dose-dépendante), des six principales classes de médicaments antihypertenseurs utilisés à posologie adéquate : diurétiques thiazidiques (qui sont synergiques avec tous les autres anti-hypertenseurs), bêtabloquants, inhibiteurs de l’enzyme de conversion, antagonistes des récepteurs à l’angiotensine 2, antagonistes calciques, inhibiteurs de la rénine.
• Les deux grandes classes les plus prescrites aujourd’hui sont les bloqueurs du système rénine-angiotensine, avec en tête les ARA2, suivis des diurétiques :
Certaines classes sont créditées d’indications initiales préférentielles en fonction du contexte :
- Diurétiques thiazidiques : HTA avec insuffisance cardiaque, sujet âgé ;
- Bêtabloquants : sujet jeune neurotonique (mais attention au risque d’impuissance !), HTA avec angor, post-infarctus, troubles du rythme ;
- Inhibiteurs de l’enzyme de conversion : HTA avec insuffisance cardiaque, néphropathie du diabète de type I, post-infarctus ;
- Antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II : HTA avec néphropathie du diabète de type II, micro-albuminurie ;
- Antagonistes calciques : HTA avec angor, sujet âgé, HTA systolique isolée.
La question de savoir s’il existerait des différences significatives entre les principales classes d’antihypertenseurs en ce qui concerne leur capacité de protection vis-à-vis du risque cardiovasculaire global ou des événements cardiovasculaires spécifiques (infarctus, accident vasculaire cérébral) n’est actuellement pas tranchée.
• Les combinaisons thérapeutiques :
Les preuves s’accumulent pour montrer que, chez une grande majorité des hypertendus, un contrôle effectif de la pression artérielle ne peut être obtenu qu’en combinant au moins deux antihypertenseurs.
D’ailleurs actuellement, 53 % des hypertendus traités reçoivent au mois deux produits de classes différentes.
Les associations fixes simplifient le traitement et améliorent l’observance.
En outre, les bithérapies peuvent présenter des avantages lors de la mise en route du traitement chez les patients à haut risque cardiovasculaires qui requièrent un contrôle rapide de la pression artérielle.
Il ressort de grands essais que plusieurs combinaisons 2 à 2 semblent particulièrement appropriées au regard d’une réduction des événements cardiovasculaires : IEC, ARA2 ou antagoniste calcique + diurétique, ARA2 + antagoniste calcique. Et que l’efficacité des bithérapies serait environ 5 fois supérieure au doublement des doses d’une monothérapie initiale.
Dans le cas d’un diabétique hypertendu, un bloqueur du système rénine-angiotensine doit toujours être inclus, car on a la preuve de son effet protecteur supérieur contre l’apparition ou la progression d’une néphropathie. En revanche, il n’est pas recommandé d’associer un IEC et un ARA2.
Quand le recours à une trithérapie est nécessaire, la combinaison la plus rationnelle associe un bloqueur du système rénine-angiotensine, un antagoniste calcique et un diurétique.
Les moyens non pharmacologiques.
Ils ne sont pas moins importants pour une prise en charge optimale. D’ailleurs, pour les hypertendus de grade 1, à faible risque ou à risque modéré, il est souvent conseillé de ne commencer un traitement pharmacologique qu’après une période appropriée de mesures hygiéno-diététiques :
- Lutte contre le surpoids (à partir d’un IMC de 25) et la sédentarité, diminution des graisses saturées, augmentation de la consommation de fruits et légumes…
- Arrêt du tabagisme, qui accélère l’athérosclérose et augmente la coagulabilité ;
- Reprise d’une activité physique régulière, plusieurs fois par semaine ;
- Limitation de la consommation de sel de table : 5 à 6 g/j (moyenne des apports sodés en France : 8 à 10 g/j) ;
- Et de celle d’alcool.
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Françoise Amouroux
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