• Nouveaux antibiotiques
« Les antibiotiques qui arrivent aujourd’hui sur le marché sont principalement dirigés contre les bactéries à Gram positif, tel que Staphylococcus aureus », précise le Dr Thierry Naas, microbiologiste au service de bactériologie-parasitologie-hygiène du CHU de Bicêtre, et membre du Centre National de Référence de la résistance aux antibiotiques. « Ils proviennent de recherches débutées il y a 15 ans, quand les SARM (Staphylococcus aureus résistant à la méticilline) étaient les souches les plus présentes. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. »
Car désormais, les bactéries à Gram négatif prennent le dessus. Ces bactéries commensales, telles qu’Escherichia coli, nous sont indispensables mais peuvent être opportunistes et constituent le premier pathogène humain. « Autrefois sensibles aux antibiotiques, certaines ont commencé à sécréter des carbapénèmases, qui hydrolysent toutes les ß-lactamines, rendant ces antibiotiques inefficaces », poursuit le Dr Naas. Seuls deux antibiotiques sont encore efficaces : la tigécycline (qui n’est pas adaptée au traitement des bactériémies ou des infections urinaires), et la colistine (fortement néphrotoxique).
• Inhiber les carbapénèmases
La recherche s’est donc orientée vers le développement d’inhibiteurs des ß-lactamases à large spectre (plus particulièrement des carbapénèmases), ouvrant la voie à la découverte de l’Avibactam. Cette molécule permet d’inhiber une des trois familles de carbapénèmases, celle de KPC (Klebsiella pneumoniae carbapénèmase), et de restaurer la sensibilité de la bactérie à une ß-lactamine. Ce n’est pas le cas pour les deux autres carbapénèmases dont l’une (OXA-48) est largement majoritaire en France et sur le pourtour méditerranéen.
« Il manque des stratégies contre les bactéries à Gram négatif », souligne le Dr Naas. « Il y a eu un regain de la part de la communauté médicale pour trouver de nouveaux antibiotiques mais l’échéance est encore lointaine (5 à 8 ans). »
• Phagothérapie
En 2014, l’OMS a commencé à parler d’une « ère post-antibiotiques » et diverses stratégies sont à l’étude pour lutter contre les BMR (bactéries multirésistantes) par d’autres voies. Développée au début du XXe siècle, puis abandonnée à l’arrivée des antibiotiques, l’utilisation de bactériophages, ces virus infectant et détruisant les bactéries, fait son retour. Les phages présentent l’avantage d’être spécifiques d’une espèce bactérienne, contrairement aux antibiotiques. « Il existe des phages pour toutes les bactéries, mais sont-ils disponible pour une approche thérapeutique ? » s’interroge le Dr Naas. « Et comment les administrer ? Car si une aérosolisation est possible (contre Pseudomonas aeruginosa, dans le cadre d’une infection pulmonaire), ou en ectopique, sur une plaie, une injection dans le sang n’est pas envisageable en raison du risque de réaction immunitaire généralisée. »
• Immunothérapie
Une autre stratégie consiste à utiliser l’immunothérapie, via des anticorps monoclonaux dirigés contre les bactéries. « Une molécule dirigée contre P. aeruginosa est actuellement en phase clinique 2, mais il n’existe pas de solution aboutie pour le moment », précise le Dr Naas. Des études de vaccination contre certaines bactéries sont également à l’étude.
• Agir en amont de l’infection
Limiter la virulence des bactéries est l’une des stratégies pouvant intervenir avant que l’infection ne soit déclarée. Par exemple, « via le blocage du système de sécrétion des bactéries, grâce auquel elles injectent des effecteurs (phospholipases, toxines…) dans leur cible (par exemple la membrane cytoplasmique des cellules eucaryotes), ce qui induit la lyse cellulaire », indique le Dr Naas.
La transplantation fécale est aussi envisagée. Ainsi, en cas de présence de Clostridium difficile dans le tube digestif, entraînant des diarrhées aux récidives fréquentes, l’idée est d’ôter la totalité de la flore digestive et d’en installer une nouvelle, vierge de C. difficile. « Les études utilisant cette stratégie montrent que les récidives sont trois fois moins fréquentes », précise le Dr Naas. Cette stratégie est actuellement évaluée pour la décolonisation du tube digestif des patients porteurs de BMR. L’administration de probiotiques est également à l’étude afin de rééquilibrer le microbiote digestif des patients après un traitement antibiotique et ainsi éviter l’implantation des BMR.
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