L’ANIMAL est particulièrement disgracieux, mais il possède une particularité exceptionnelle et enviable. Le rat-taupe nu (Heterocephalus glaber), petit rongeur africain, peut vivre 28 ans (contre 4 ans pour une souris de même taille), ne déclare jamais de cancer (23 % de la mortalité humaine et 90 % chez la souris) et ne montre pas de signes de sénescence. C’est cette longévité exceptionnelle, en parfaite santé, qui a fait s’interroger la communauté scientifique. Une équipe de chercheurs américains, Andreï Seluanov (New York) et coll., vient d’en découvrir une partie du mystère… Avec en arrière-pensée, bien sûr, des applications dans la lutte contre le cancer chez l’humain. La réponse se trouverait dans « la précocité de l’inhibition de contact » des cellules de cet animal de 35 g, menant une vie souterraine.
Pour comprendre le phénomène, les auteurs rappellent qu’une des armes naturelles contre le développement des cellules cancéreuses repose sur l’inhibition de contact. Un mécanisme bloque les divisions lorsque la densité cellulaire devient trop élevée. L’équipe a mis en culture des fibroblastes de rat-taupe nu. Elle a découvert que les divisions cessent pour une densité bien plus basse que celle de fibroblastes témoins provenant de souris. Empêchant les multiplications rencontrées au cours des cancers.
L’inhibition de contact.
La précocité de l’inhibition requiert la mise en œuvre de deux voies de suppression de tumeur : p53 et pRb. Les chercheurs ont tenté de bloquer les deux suppresseurs de tumeur chez le rat-taupe et ont constaté une atténuation de l’inhibition de contact.
Chez l’humain, et la souris également, l’inhibition de contact est stimulée par l’induction de la voie p27kip1. En revanche, chez le rongeur africain, son induction est sous dépendance de la voie p16Ink4a. En fait, l’équipe a constaté, toujours chez le rat-taupe, l’existence d’une séparation temporelle entre ces deux voies. Alors que l’inhibition constante est sous la dépendance de p27Kip1, l’action précoce est sous celle de p16Ink4a. Ainsi, cette protection à « double détente contribue à la remarquable résistance aux tumeurs de ce rat-taupe ».
Les travaux antérieurs de l’équipe comparant plusieurs espèces de rongeurs avaient montré que l’adaptation anticancer chez les animaux les plus gros se faisait par répression de l’activité de la télomérase et de la sénescence réplicative. À l’inverse, avaient-ils remarqué que les plus petites espèces à grande longévité ne bénéficiaient pas de la sénescence réplicative et avaient recours à d’autres adaptations anticancéreuses. Ces derniers mécanismes sont largement méconnus dans la mesure où la recherche sur les cancers se déroule essentiellement chez l’humain (« un gros animal ») ou chez la souris (petit poids, vie courte et cancers multiples). Aussi pour comprendre comment prévenir les cancers l’étude de modèles animaux, tels que le rat-taupe nu ou le Spalax (rat-taupe subméditerranéen à grande longévité) sera d’une grande utilité. Elle devrait fournir des voies de réflexions sur la prévention et le traitement des cancers.
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