Le tube digestif fabrique des neurotransmetteurs qui modifient l’activité cérébrale. Les bactéries intestinales peuvent, ainsi, moduler le fonctionnement du cerveau et influencer notre comportement. Par ailleurs, face à un stress, certains mécanismes hormonaux (tels que l’augmentation du taux de cortisol) viennent également modifier les contractions du tube digestif qui interagit alors directement avec le cerveau. Enfin, « le microbiote intestinal module nos cellules immunitaires. Et cela, non seulement au niveau du tube digestif, mais aussi, de façon plus large, au niveau de l’organisme puisque les cellules immunitaires passent dans la circulation sanguine », souligne le Pr Gabriel Perlemuter, chef du service d’hépatogastroentérologie et nutrition à l’hôpital Antoine-Béclère à Clamart (AP-HP).
Modifications du comportement
Les derniers essais cliniques sur des modèles murins ont établi le lien entre un stress profond vécu à la naissance et la survenue d’un déséquilibre du microbiote intestinal. « Les souris séparées de leur mère, dès la naissance développent une dysbiose responsable de troubles fonctionnels intestinaux. Chez la souris, cette dysbiose est corrélée à certains comportements similaires au stress que l’on peut rencontrer chez l’homme (1) », note le Pr Perlemuter.
Les déséquilibres du tube digestif jouent également un rôle dans l’addiction. Des chercheurs belges ont mis en évidence que, chez les patients alcoolodépendants, l’anxiété est corrélée à une hyperperméabilité intestinale et à une altération du microbiote intestinal (2). L’arrêt de l’alcool a permis de diminuer la porosité intestinale chez les patients alcoolodépendants présentant une hyperperméabilité. Cela ouvre des perspectives pour l’amélioration de la santé mentale des patients alcooliques, via des probiotiques favorisant la diminution de la perméabilité intestinale.
Autisme et dépression
Une étude américaine (3) axée sur la transplantation fécale a montré que des lignées de souris recevant des selles de personnes ayant des troubles autistiques développent, à leur tour, des troubles du comportement. Le tube digestif de ces souris est également pauvre en certains métabolites comme la taurine ou l’acide 5-aminovalérique, qui activent les récepteurs de l’acide gamma-aminobutyrique (GABA). Ce dernier est un neurotransmetteur inhibiteur dont la carence est impliquée dans l’autisme. « Le fait d’apporter ces métabolites à un certain moment du développement de la souris permet d’inhiber, au moins partiellement, la survenue du comportement autistique. Ainsi, dans le cadre du développement cérébral, il existe des fenêtres au cours desquelles le cerveau est très sensible à certains facteurs environnementaux. Durant ces périodes, la plasticité cérébrale importante pourrait aussi être propice à une action thérapeutique », note le Pr Perlemuter. Des expériences de transfert du microbiote ont également été menées dans la dépression. « Des souris ayant reçu les selles de personnes dépressives développent, elles aussi, des troubles similaires à la dépression (4) », précise le Pr Perlemuter. Cela montre le rôle causal, au moins partiel, du microbiote dans la genèse de cette pathologie.
D’après une conférence de presse du Laboratoire PileJe.
(1) M. Rincel et al., Brain Behav Immun., doi: 10.1016/j.bbi.03.006, 2014.
(2) S. Leclerq et al., PNAS, doi.org/10.1073/pnas.1415174111, 2014.
(3) G. Sharon et al., Cell., doi: 10.1016/j.cell.05.004, 2019.
(4) P. Zheng et al., Mol Psy., doi: 10.1038/mp.44, 2016.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques