Le Quotidien du pharmacien. Dans quelle mesure les pharmaciens peuvent-ils être associés à la télémédecine alors que cette approche reste aujourd’hui essentiellement médicale ?
Thomas Mesnier. La télémédecine aidera les professionnels de santé à travailler en coopération, et ce au-delà de la simple pratique médicale. L’article 54 de la LFSS 2018 permettait déjà de mettre en place les tarifs et les modalités de réalisation des actes de télémédecine en reconnaissant la place du pharmacien dans ce dispositif. Et cette volonté est vraie depuis la LFSS de 2014*.
Ainsi, le pharmacien d’officine permet de diffuser les pratiques de la télémédecine pour plusieurs raisons : il est un professionnel de santé de premier recours ; il donne un accès facile et sans rendez-vous aux patients ; la répartition géographique des officines permet une diffusion large et homogène sur le territoire.
C’est d’ailleurs l’un des points de notre rapport : l’ensemble des professionnels de santé, notamment les infirmiers, kinés, pharmaciens, doivent pouvoir accompagner les téléconsultations et recourir à la télé expertise.
La télémédecine, ou plutôt la téléconsultation, s’impose comme outil de l’interprofessionnalité, notamment au sein des CPTS. Peut-on imaginer que le pharmacien constitue le pivot de ce dispositif de consultation à distance ?
Les CPTS ont pour objectif de faire travailler en synergie les différents professionnels de santé sans regroupement de ces derniers dans un local commun. Chaque professionnel de santé aura donc un rôle particulier et la télémédecine aidera à l’interconnexion entre eux. Ceci est d’autant plus vrai que le temps médical diminue, nécessitant de s’appuyer sur les professionnels de santé tels que les pharmaciens, les sages-femmes, les infirmiers, etc. L’important est que les professionnels de santé s’adaptent en fonction des spécificités territoriales et il ne faudrait pas aller à l’encontre de la volonté de faire du « sur-mesure ».
Concernant les officines, en faire des relais pour la télé expertise est une voie dans laquelle il est possible de s’orienter. Les pharmaciens sont des professionnels de santé dans lesquels les Français ont confiance et qui offrent un accès facile. Ce sont des qualités que les CPTS exploiteront, c’est certain.
La protection des données sensibles que sont les constantes de santé ne constitue-t-elle pas l’un des plus grands défis technologiques, éthiques et juridiques de la télémédecine ? De même, ne faudrait-il pas légiférer, alors que de nombreux prestataires s’engouffrent déjà sur ce marché ?
Le règlement européen sur la protection des données (RGPD) voté en début d’année à l’Assemblée nationale, poursuit notamment comme objectifs de renforcer les droits des personnes et de responsabiliser les acteurs. Et celui-ci s’applique déjà aux domaines de la santé.
De façon analogue, la France a déjà un système de protection des données de santé par le biais de la CNIL. La loi Informatique et Libertés, mais aussi le code de la santé publique, viennent renforcer la protection des données dans ce domaine, offrant une protection juridique forte et capable d’assurer la transition vers le déploiement de la télémédecine.
Concernant l’opportunité de légiférer, le fait qu’un marché se crée est plutôt une bonne chose. Il faudra cependant analyser le développement des pratiques et les possibles effets négatifs que cela peut engendrer sur le bon déroulement de la télémédecine pour les patients. La loi n’a pas vocation à prédire mais doit orienter les pratiques de chacun vers l’intérêt général.
*Article 36
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