Fin 2014, l’Agence du médicament européenne (EMA) recommande de renforcer les restrictions d’usage du valproate de sodium (Dépakine, Dépakote, Dépamide, Micropakine et génériques) chez la femme enceinte. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) met donc en place, en mai 2015, des conditions de prescription et de délivrance (CPD) restreintes à certains spécialistes, qui doivent éviter de prescrire ces médicaments chez toute femme en âge de procréer. En l’absence d’alternative, la patiente doit être parfaitement informée des risques tératogènes et signer un accord de soin qu’elle devra présenter au pharmacien avec son ordonnance.
Ces nouvelles CPD, obligatoires au 1er janvier 2016, éveillent les consciences. La Haute Autorité de santé (HAS) publie une fiche sur les alternatives au valproate et la ministre de la Santé multiplie les décisions. Marisol Touraine impose un logo sur les boîtes de médicaments indiquant clairement qu’il est déconseillé aux femmes enceintes et diligente une enquête de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS). Elle confie à deux magistrats la mission de se prononcer sur le mécanisme d’indemnisation, la date à partir de laquelle l’information aurait dû être donnée et les responsabilités des uns et des autres. Les logiciels d’aide à la prescription et la délivrance seront équipés d’un système d’alerte, l’ANSM doit réévaluer 21 spécialités traitant l’épilepsie et les troubles bipolaires et un fonds d’indemnisation des victimes du valproate va être créé.
Dossier complexe
En février, l’IGAS rend son rapport. Les premières études sur les effets tératogènes du valproate arrivent dans les années 1980, les notifications documentées sur les embryofœtopathies et d’autres anomalies (cardiaques, rénales, de la colonne vertébrale, des membres, du visage) se multiplient, mais glissent sur les autorités sanitaires. En 2000, apparaissent des notifications sur des troubles neurodéveloppementaux. Pour l’IGAS, des mesures d’information des prescripteurs et des patients auraient dû intervenir dès 2004. Ce n’est qu’en 2006 que le valproate est déconseillé en cas de grossesse, et en 2010 que les risques de grossesse sous valproate sont clairement mentionnés dans le RCP. Le premier volet d’une étude menée par l’ANSM et l’assurance-maladie est dévoilé en août : entre 2007 et 2014, 14 322 grossesses ont été exposées à l’acide valproïque. Le second volet, attendu en janvier, porte sur les 8 701 enfants nés vivants de mère sous valproate sur cette même période.
Côté justice, des familles victimes du valproate déposent des plaintes individuelles, puis l’APESAC (Association d’aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anti-convulsivant) fait de même, avant de lancer le 13 décembre dernier une action de groupe contre le Laboratoire Sanofi. Ce dernier attend de la justice qu’elle établisse « les responsabilités dans ce dossier complexe » où sont aussi impliqués « les autorités sanitaires, les médecins et les pharmaciens ».
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