« La question de la durée de vie des prothèses de hanche ou de genou est une question que nous abordons tous les jours en consultation », indique au « Quotidien » le Dr Romain Rousseau, chirurgien orthopédiste à Paris. Deux méta-analyses réalisées par une équipe britannique et publiées dans « The Lancet » apportent de nouveaux éléments de réponse sur ces dispositifs indiqués en cas d’arthrose.
Selon ces études, une prothèse totale de hanche peut durer jusqu’à 25 ans chez près de six patients sur dix. Une durée de vie similaire concerne près de huit patients sur dix pour une prothèse totale de genou et sept patients sur dix pour une prothèse de genou unicompartimentale.
Ces résultats confirment les données actuelles qui permettaient d’indiquer aux patients une durée de vie de 15-20 ans, et vont même au-delà des résultats attendus.
« L’usure des prothèses se manifeste notamment par la réapparition de douleurs ou des raideurs articulaires. Si l’usure est confirmée à la radiographie, la prothèse est totalement ou partiellement remplacée », explique le Dr Rousseau.
Une vision globale de la durée de vie
La méta-analyse sur les prothèses de genou (1) a notamment inclus les données de registres australiens et finnois (299 291 totales et 7 714 unicompartimentales). Selon ces données, la survie des prothèses totales du genou était de 93 % à 15 ans, de 90,1 % à 20 ans et de 82,3 % à 25 ans. Celle des prothèses de genou unicompartimentales était de 76,5 à 15 ans, de 71,6 % à 15 ans et de 69,8 % à 25 ans.
« Ces résultats sont encourageants, mais sont à nuancer », souligne le Dr Rousseau. En effet, de nombreux facteurs influencent la durée de vie d’une prothèse. « Il existe des facteurs liés aux patients comme l’âge, l’indice de masse corporelle et la qualité osseuse, des facteurs liés au type de prothèse et à leur composition, et des facteurs liés à la pose de la prothèse », précise-t-il.
La méta-analyse donne une vision globale de la durée de vie des prothèses, sans tenir compte de toutes ces spécificités. « Ces résultats sont indiscutables sur le plan méthodologique, mais sont éloignés d’une pratique de terrain, résume le chirurgien. Ils sont néanmoins intéressants pour les patients chez lesquels une pose précoce de la prothèse est envisagée ».
« Les moins bons résultats obtenus avec les prothèses unicompartimentales s’expliquent notamment par des contraintes plus fortes avec ce type de prothèse qui ne remplace qu’un seul compartiment du genou », ajoute le Dr Rousseau.
Contrôler le positionnement des implants
Concernant les prothèses totales de hanche (2), les registres australiens et finnois (92 séries de cas soit 215 676 prothèses totales de hanche) ont montré que la survie était de 89,4 % à 15 ans, de 70,2 % à 20 ans et de 57,9 % à 25 ans.
Le Dr Alexis Nogier, chirurgien de la hanche à Paris, salue également « un très bon travail méthodologique » : « ces résultats confirment que la prothèse de hanche peut donner des résultats exceptionnels ».
Comme pour les prothèses de genou, ces résultats donnent un aperçu global de la durée de vie des prothèses, sans pour autant apporter de réponse pour un patient donné.
De nombreux facteurs peuvent expliquer les différences de résultats d’un patient à l’autre, comme la qualité de la pose des prothèses. « Bien contrôler le positionnement des implants est un enjeu essentiel pour que la prothèse tienne longtemps en place », note le Dr Nogier. En revanche, « le sport n’est pas forcément synonyme de faible durée de vie », souligne-t-il, précisant qu’« il existe encore une grande méconnaissance des raisons qui vont conduire à une durée de vie longue ou au contraire à une révision précoce ».
Le chirurgien regrette par ailleurs que la qualité de vie des patients n’ait pas été prise en compte dans la méta-analyse : « on peut vivre pendant 25 ans avec une prothèse douloureuse ».
Des prothèses sur mesure
La comparaison entre les deux méta-analyses met en avant de meilleurs résultats avec les prothèses de genou. Selon le Dr Nogier, « cela s’explique par le fait que ces prothèses concernent davantage des individus sédentaires et âgés que les prothèses de hanche qui sont maintenant posées de plus en plus jeunes ».
Par ailleurs, que ce soit pour le genou ou la hanche, la composition des prothèses a évolué depuis 25 ans. « Nous utilisons aujourd’hui des matériaux beaucoup plus résistants, notamment du polyéthylène hautement réticulé qui permet de ralentir l’usure », note le Dr Rousseau. Et depuis près de un an, des prothèses de hanche et de genou sur mesure, adaptées à l’anatomie du patient, se développent. « Avec ces prothèses personnalisées, la durée de vie des prothèses devrait encore s’allonger », espère le Dr Nogier.
1) J. Evans et al. The Lancet https://doi.org/10.1016/S0140-6736 (18) 32 531-5, 2 019.
2) J. Evans et al. The Lancet https://doi.org/10.1016/S0140-6736 (18)31 665-9, 2 019.
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