L’accès libre, en pharmacie, de la pilule microprogestative n’est pas une mesure anodine si l’on en juge les réactions que son délistage a suscitées tant du côté des gynécologues, qui s’y sont farouchement opposés, que parmi les pharmaciens.
Invités à donner leur avis sur le site www.lequotidiendupharmacien.fr les pharmaciens ont été 64,1 % à refuser cette éventualité. Ce n'est pas tant la nature de la pilule progestative et non œstroprogestative qui est discutée par les professionnels de santé mais bien la délivrance sans ordonnance. Au premier rang des arguments, la santé des femmes. « On fait prendre des risques à cette nouvelle génération de femmes en les laissant sans surveillance. Un frottis, une prise de sang, une visite chez le médecin ou la sage-femme évite bien des complications pour son futur, cancer, MST, herpès, hygiène de vie… », estime Marie-Manuela, pharmacienne à Villepreux.
Sa position rejoint celle des gynécologues, dont la fédération s’est résolument positionnée contre cette mesure. « Une pilule, qu’elle soit progestative ou non, est un médicament (…) Choisir une pilule adaptée ne se fait pas sur les conseils d’une maman, d’une copine ou d’un pharmacien en quelques minutes », explique la Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale (FNCGM). Et d’enfoncer le clou : « il est impensable qu’une jeune femme puisse exposer toutes ses interrogations au sujet des effets indésirables ou encore de la sexualité derrière le comptoir d’une pharmacie. »
Ne pas pleurer sur les nouvelles missions
Les pharmaciens s’en défendent. Comme Hervé, titulaire à Châtenay-Malabry. Il croit au contraire que « l’équipe officinale passera globalement bien plus de temps pour expliquer tous les tenants et aboutissants que ne le fait le médecin débordé ». Il reçoit le soutien de Valérie, médecin, qui déclare sur le site du « Quotidien du pharmacien » : « Les pharmaciens ont toute leur place pour orienter les femmes vers les structures adaptées à leur demande en fonction de leur âge, de leurs besoins de confidentialité et de leur couverture sociale. » Elle précise que « c’est tout l’intérêt de constituer un réseau de santé sexuelle autour de l’officine ».
Car l’idée première du délistage de la pilule progestative est de diminuer les risques vis-à-vis d’une grossesse non désirée, comme le souligne Valérie. Dans cette perspective, Marie-Noëlle, pharmacienne à Lamanon (Bouches-du-Rhône), est, elle aussi, favorable à l’idée, tout en souhaitant que le suivi médical et la prévention soient privilégiés.
La frilosité affichée par la majorité des pharmaciens en désespère plus d’un. Comme Jean-Philippe, pharmacien à Briey (Meurthe-et-Moselle) qui déplore le peu d’engouement de ses confrères : « Je me dis que notre profession est tout juste bonne à faire du tiers payant. Pas la peine ensuite de venir pleurer pour de nouvelles missions et d’envier les pharmaciens au Canada, qui font de la pharmacie clinique. »
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