SI LES ESPOIRS fondés dans une nouvelle molécule découverte par des chercheurs de l’Institut Pasteur/CNRS ne sont pas déçus, un grand pas sera fait dans la thérapeutique. Catherine Rougeot et son équipe ont constaté le double pouvoir antalgique et antidépresseur d’un messager hormonal existant chez l’homme : l’opiorphine.
L’opiorphine est en fait connue depuis 2006, grâce aux travaux de François Rougeon, à l’Institut Pasteur. Mais la recherche récente de C. Rougeot, associée à l’équipe de neuro-psychopharmacologie ETAP-éthologie appliquée (Vandœuvre-lès-Nancy), a porté sur l’évaluation des activités de cette molécule. Les travaux ont été menés chez l’animal. L’équipe a constaté, in vivo, que, à doses égales, l’opiorphine possède une activité analgésique égale à celle de la morphine. Elle était testée tant sur des douleurs thermiques que mécaniques, toniques que chroniques. Mais surtout, par rapport aux opiacés classiques, cette nouvelle molécule ne crée guère d’effets secondaires. Il a été constaté une faible accoutumance, l’absence de constipation et un pouvoir addictif très réduit.
Aussi efficace que l’imipramine.
Heureuse surprise également du côté de l’action antidépressive. Toujours chez l’animal, à doses similaires, l’opiorphine s’est montrée aussi efficace que l’imipramine. Ici aussi aucun des effets indésirables des antidépresseurs n’a été mis en évidence, notamment pas d’hyper-excitation, ou d’action sédative, pas d’atteinte de la mémoire à long terme.
L’intérêt thérapeutique de la molécule est important. Comme le rappellent les chercheurs, un état dépressif peut majorer la sensibilité à la douleur et, à l’inverse, une pathologie douloureuse chronique peut faire survenir un syndrome dépressif. Pour parvenir à obtenir cette double action à terme, C. Rougeot et coll. travaillent sur l’opiorphine de synthèse qu’ils ont produite. Leur objectif est de la rendre plus stable, d’en augmenter la biodisponibilité, ainsi que la durée d’action. Une fois ces étapes franchies, des essais cliniques pourront être envisagés.
Pour parvenir à ces étapes de recherche récente, Catherine Rougeot et son équipe travaillent depuis 1988 sur la Sialorphine. Son existence avait été découverte à la suite de travaux de génétique de F. Rougeon. Il avait, en effet, identifié un gène codant pour un précurseur hormonal. En se fondant sur cette identification et grâce à la pharmacochimie post-génomique, C. Rougeot a mis au jour ce précurseur, baptisé alors Sialorphine. Les propriétés antalgiques de la molécule ont été découvertes par la suite : elle inactive les enzymes chargées de bloquer l’action des enképhalines, des antalgiques naturels. En cherchant l’équivalent humain de la Sialorphine, l’équipe a identifié l’opiorphine en 2006.
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