LE CONSTAT de départ est le suivant : quelques données indiquent que les survivants d’un cancer ont un risque diminué d’Alzheimer et que les sujets atteints d’Alzheimer ont un moindre taux de cancer. Des constatations de ce type ont déjà été étayées entre Parkinson et cancer. Il est exact qu’un lien entre cancer et neurodégénérescence est plausible puisque les deux pathologies partagent des gènes et des processus biologiques communs, notamment au niveau du cycle cellulaire. Avec des conséquences opposées : prolifération cellulaire incontrôlée dans le cancer, apoptose dans l’Alzheimer. Des protéines comme p53 et Pin1 jouent un rôle à la fois dans le cancer et l’Alzheimer.
Une étude de population a indiqué que les patients avec un cancer ont un risque d’Alzheimer diminué de 43 % ; et que les personnes avec un Alzheimer ont un risque d’hospitalisation pour cancer diminué de 69 %. Si ces résultats sont intrigants, il est toutefois difficile d’établir une relation entre maladies liées à l’âge, et plusieurs facteurs doivent être discutés avant de conclure à une relation vraie. Par exemple, étant donné que les troubles cognitifs sévères conduisent à un moindre dépistage des cancers et à une moindre déclaration des manifestations liées aux cancers, il est difficile de savoir dans quelle mesure de moindres taux de cancer chez un sujet Alzheimer sont liés soit à une moindre incidence, soit à un sous-diagnostic. Pour cette raison, il est préférable d’évaluer l’incidence de l’Alzheimer chez les survivants d’un cancer intacts sur le plan cognitif à l’entrée dans l’étude. Mais le problème majeur est alors celui de la mortalité sélective : les survivants d’un cancer peuvent avoir un moindre risque d’Alzheimer uniquement parce qu’ils ont plus de risque de mourir avant de développer une démence.
Des patients de plus de 65 ans sans démence.
C’est dans ce contexte qu’une équipe américaine, en collaboration avec un chercheur de l’INSERM de Bordeaux, a étudié les relations entre cancer et Alzheimer en étudiant les données issues de l’étude de Framingham, dont le suivi est supérieur à cinquante ans. Le suivi de cette cohorte de 5 209 patients a commencé en 1948 ; en 1971, les enfants des participants et leurs conjoints ont été inclus pour former la « cohorte des enfants ». Les participants sont vus tous les deux ans pour la cohorte originelle et tous les quatre ans pour la cohorte des enfants.
Les participants de la cohorte originelle de plus de 65 ans et sans démence (n = 1 278) ont été inclus pour l’investigation primaire de la présente étude. Ces participants ont été suivis pendant dix années au cours desquelles on a cherché la survenue d’un Alzheimer. Parallèlement, une étude cas contrôle a porté sur 1 485 participants des deux cohortes (originelle et enfants) ; elle avait pour objet d’identifier les relations entre démence et cancer ultérieur ; chaque cas de démence était apparié à trois cas contrôles du même âge et du même sexe.
En ce qui concerne l’étude d’investigation primaire, sur dix années, on a observé 221 cas d’Alzheimer « probable ». Les survivants d’un cancer avaient un moindre risque de développer un Alzheimer probable (hazard ratio de 0,67), après ajustement pour l’âge, le sexe et le tabagisme. De façon surprenante, le risque le plus faible était observé chez les survivants d’un cancer lié au tabac (hazard ratio de 0,26) par rapport aux survivants d’un cancer non lié au tabac (0,82). Cela dit, les survivants d’un cancer lié au tabac avaient un risque accru d’accident vasculaire cérébral (2,18).
En ce qui concerne l’étude cas contrôle, les participants ayant une maladie d’Alzheimer « probable » ont eu un moindre risque de cancer (0,39) que les participants de référence ; même constatation pour les patients ayant « toute maladie d’Alzheimer » (0,38) et les patients ayant « toute démence » (0,44).
« Les survivants d’un cancer avaient un plus faible risque d’Alzheimer que les sujets sans cancer, et les patients avec un Alzheimer avaient une plus faible incidence de cancer. Le risque d’Alzheimer était plus faible chez les survivants d’un cancer lié au tabagisme et n’était pas expliqué par des biais de survie. Cette constatation pour le cancer est semblable à celle observée avec la maladie de Parkinson et suggère une association inverse en cancer et neurodégénérescence », concluent les auteurs.
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