FAUT-IL RÉAGENCER son officine dès lors qu’on l’automatise ? Le coût de l’automatisation déjà important ajouté à celui non moins important d’un agencement total ou partiel y fait réfléchir à deux fois. L’automatisation coûte de quelques dizaines de milliers d’euros jusqu’à 200 000 euros, on peut en dire presque autant pour l’agencement. Or, installer un automate ou un robot, ou encore une machine hybride, (automate doté d’un bras robotisé par exemple), peut bouleverser la disposition de l’officine et donc son fonctionnement. Mal fait, il ne permettra pas d’optimiser au mieux les gains qu’une automatisation est censée apporter. D’où la nécessité parfois de penser les deux ensemble, malgré le coût élevé d’un tel projet. Pour autant, aucune vérité ultime n’est valable pour l’ensemble des pharmacies. Il y a ainsi des cas où, à la limite, il n’est pas nécessaire de réagencer quoi que ce soit. « Si l’on délocalise le stock par le biais de l’automatisation à l’étage supérieur, par exemple, alors, il n’y a pas d’impact direct sur l’agencement », déclare ainsi Christian Pernoud, directeur commercial de Synergies Tech, l’importateur des machines Tecnilab en France. Une fois le prestataire « automate » choisi, parmi les grands acteurs du domaine que sont Mach4, Meditech, Pharmax, Pharmathek, Tecnilab..., il reste à répondre à la question cruciale : Penser les deux ensemble, oui, mais comment ?
Ce qui fait progresser la pharmacie
Le premier réflexe d’un titulaire est de s’intéresser d’abord à l’automatisation, de voir quelle machine est la mieux adaptée à sa problématique, à son projet. Pas forcément à l’agencement qui pourrait en découler. D’où parfois des erreurs, notent les agenceurs, des erreurs notamment portant sur la circulation des personnes, en particulier dans le back office, à cause d’une installation mal pensée. Mais même dans le cas où le titulaire appréhende également la question de l’agencement, comment doit-il faire ? S’il consulte séparément fournisseur d’automates et agenceur, il peut avoir des opinions diamétralement opposées, chacun faisant valoir son point de vue. « Par exemple, un fabricant de robot va insister pour que la machine soit juste derrière les comptoirs tandis que l’agenceur cherchera à l’éloigner pour mieux optimiser l’espace de vente », décrit Emmanuel Zitoun, directeur France de Pharmathek. Pharmathek préfère travailler avec l’agenceur TH Kohl, collaboration rendue d’autant plus facile que les deux entreprises appartiennent au même groupe et partagent les mêmes locaux. Facile, mais aussi nécessaire si l’on en croit Emmanuel Zitoun, « ce qui fait vraiment progresser la pharmacie, c’est d’avoir une démarche globale. » Donc pensée ensemble dès le départ.
Pour d’autres, cela ne représente pas d’enjeux particuliers. Christian Pernoud juge le fonctionnement assez simple, il suffit que le pharmacien « nous mette en contact avec son agenceur, nous échangeons avec lui afin de trouver la meilleure solution afin de déranger le moins possible l’officine. » Du côté des agenceurs, cela tient aussi du positionnement stratégique. « Nous travaillons avec tous les fournisseurs de robots ou d’automates, ce qui nous permet de répondre au maximum d’offres », explique ainsi Rudy Roland, gérant de Jean Rolland Agencement. À mi chemin entre les deux positions, celle de Yann Morel, gérant de la société Officonseil Bretagne, un architecte officiant notamment avec l’agenceur Cap Agencement : « nous travaillons avec la plupart des fournisseurs sur le marché, mais il est vrai beaucoup avec les machines Tecnilab, un fabricant qui a l’avantage d’avoir une gamme complète, permettant de s’adapter à de nombreuses situations. » Les uns et les autres sont confrontés au principe de réalité et feront de toute façon ce que le pharmacien décidera, « même si celui qui a tort l’emporte », souligne Emmanuel Zittoun.
Le duo devient trio.
Lourde responsabilité pour le titulaire donc, parfois confronté à de grosses contraintes techniques. En fait, le duo fournisseur de l’automatisation et de l’agenceur se mue souvent en un trio où l’architecte vient donner son avis, suivant la configuration de l’officine. Dans les bâtiments récents, ces contraintes sont moindres, mais dans les plus anciens, c’est parfois très compliqué. Yann Morel évoque cet exemple d’une officine installée sur un port en Bretagne, « 20 m2 de surface de vente, 100 au total et une configuration très spéciale, avec l’espace de vente traversée par les communs de l’immeuble classé monument historique. L’automatisation a permis de gagner de la surface de vente mais pour cela, un système de transitique (tout ce qui permet aux produits de circuler, NDLR) a été nécessaire, et cela dans la partie des communs, avec donc l’obligation faite par les Bâtiments de France de le camoufler. » La configuration des lieux décide parfois à la place du titulaire. C’est même elle qui va désigner le type de machine à installer. « Il faut faire le bon choix de la machine en fonction de l’emplacement », rappelle Yann Morel. Traditionnellement, on réserve les robots, donc dotés de bras automatiques, à proximité des comptoirs, en remplacement des colonnes tiroirs, derrière les linéaires d’OTC, avec des découpes afin que les boîtes tombent quand les médicaments sont commandés. Les automates sont en général placés plus loin, à l’étage par exemple quand il y en a un, ce qui du reste facilite la transmission des médicaments, explique Rudy Rolland, par le simple effet de la gravité. Pas besoin de prévoir de système de convoyage complexe. Et entre les deux, les machines hybrides, comme le Dreamtec de Synergies, grâce auquel il est possible « d’éloigner le stockage tout en gardant une vitesse de délivrance quasi instantanée », selon Christian Pernoud.
La transitique en question.
Parmi les contraintes auxquelles peuvent être confrontés les titulaires, il y a celle de l’usage d’un système de transitique, qui fait débat. Il est parfois indispensable d’y recourir, comme l’exemple ci-dessus cité. « Surveiller comment bien amener les produits aux comptoirs est indispensable », rappelle Rudy Rolland. Dans ce cas, faut-il un système à base de tapis roulant, ou plutôt un système à air comprimé ? Ce dernier a l’avantage de pouvoir contourner les obstacles, et former des coudes par exemple. Mais, selon Rudy Rolland, ce système tombe plus facilement en panne et coûte plus cher. Cela étant, l’agenceur y a recours quand c’est nécessaire et peut en faire un avantage visuel, par exemple en installant une partie des tuyaux en verre, de façon à ce que les clients puissent voir les produits circuler. Quant au coût, Yann Morel estime que les travaux autour des systèmes à air comprimé sont moins chers que ceux autour des tapis roulants. Pour Emmanuel Zittoun, « plus il y a de transitique, moins le système est efficace. » Pire, il considère que parfois, une transitique inefficace va « jusqu’à tuer un projet ». D’où la nécessité de travailler le mieux possible sur l’emplacement du robot ou de l’automate, afin d’éviter ces pièges.
Les différentes contraintes architecturales doivent être intégrées au projet du titulaire. Celui-ci doit savoir ce qu’il veut faire de son automatisation, s’ agit-il de générer plus de chiffre d’affaires, de soulager les membres de son équipe officinale et les conduire à fournir plus de services, de dégager une meilleure rentabilité ?... C’est toujours la vision d’ensemble que préconisent Pharmathek et TH Kohl. « Nous entendons parfois d’étonnantes histoires, évoque Emmanuel Zittoun, tel pharmacien qui s’est doté d’un automate traitant jusqu’à 20 000 boîtes ». Le risque est parfois de se laisser à un équipement surdimensionné, d’où l’intérêt de définir précisément son projet. « Qu’est-ce qui fait progresser le plus la pharmacie, l’agencement ou l’automatisation ? » pose Emmanuel Zittoun. Question d’autant plus redoutable que l’arrivée d’un automate ou d’un robot change les habitudes de travail dans l’officine. « D’où la nécessité de travailler sur les volumes, sur la surface et sur les flux, partout dans l’officine », clame François Guillot, directeur général de TH Kohl. La position d’un robot va par exemple jouer sur la manière de travailler dans le back-office. Et François Guillot d’illustrer son propos par l’exemple de cette officine, pour gagner en espace commercial, il a fallu penser l’automatisation dans un back office plus petit mais plus efficace, ce qui a nécessité « de revoir les process jusqu’à la politique d’achat de l’officine et recourir moins souvent à la vente directe, qui nécessite d’avoir une surface de stockage plus grande. » Avec une meilleure rotation des stocks et donc une meilleure rentabilité. Prenez l’automatisation par n’importe quel bout, c’est toute la stratégie de l’officine qui se déploie.
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