C’est bien souvent contraints et forcés que les pharmaciens envisagent de travailler sur la gestion de l’accueil dans leurs officines. Accueillir, c’est déjà éviter aux patients/clients d’attendre, un sujet délicat, car l’attente est de plus en plus perçue comme désagréable par ceux qui viennent aux comptoirs : les tensions sont manifestes, éclatent parfois en conflits, et fatiguent les équipes officinales. L’urgence pour les titulaires est de trouver une solution adaptée sans penser plus avant à la gestion de l’accueil dans sa globalité. Ils se résolvent alors, et parfois sur le conseil des clients eux-mêmes, à acquérir un système classique de distributeur de ticket d’attente avec un appel de numéro sur un écran. C’est simple, et c’est connu de tous. « Et c’est stable », ajoute Christian Delage, gérant de la société Ticket-attente.com, qui travaille sur le sujet depuis trente ans. « Nos systèmes sont basiques, certes, mais ne sont pas concernés par les aléas de l’informatique », justifie-t-il. Seule concession à l’informatique, les traditionnels écrans à lumières LED peuvent être remplacés par des moniteurs qui peuvent proposer le cas échéant un contenu plus complet et en tout cas une image plus attirante. Ils présentent également l’avantage de ne pas coûter cher. Mais ils ont un côté « fonction publique », et certaines officines s’inquiètent de l’image que ces distributeurs peuvent donner. D’où leurs recherches pour aller au-delà désormais, et qui leur permet de travailler sur la gestion de l’accueil dans sa globalité. Une problématique qui intéresse certes les grandes officines, mais les petites sont également concernées, selon leur configuration.
Aussi une question d’agencement
Ce sujet est certes avant tout technologique, mais pas seulement. Les agenceurs ont leur mot à dire, et anticipée très en amont, la gestion de l’accueil peut d’emblée être facilitée. D’abord en travaillant sur les flux de circulation : des espaces mal gérés conduisent souvent à un certain encombrement. Rendre agréable la zone d’attente, créer des limites de courtoisie par des astuces de couleurs et marquages au sol, éclater les comptoirs et dédier certains d’entre eux à des tâches précises (hors ordonnance, promis etc…) sont autant de moyens d’aménager intelligemment l’espace de l’officine pour rendre l’attente plus confortable et la fluidifier au mieux. Néanmoins, il n’est pas nécessaire de réagencer son officine pour en améliorer l’accueil. Les solutions technologiques proposées permettent aujourd’hui d’intégrer la délicate gestion de l’attente dans une réflexion plus large. Tout en cherchant à diminuer le temps de l’attente, il est un niveau incompressible qui doit, selon David Godest, fondateur et gérant de Dolmen Technologies, une société spécialisée dans le domaine du marketing digital, « être exploité et utilisé pour permettre aux clients de faire autre chose qu’attendre ». L’objectif de ces solutions est centré sur ce principe, donner un sens, un contenu à cette attente.
Certains prestataires vont faire en sorte que ce temps ait un impact commercial. « Les clients ne doivent pas être captifs et être forcés de regarder les écrans pour savoir où en est leur numéro d’attente », explique ainsi Philippe Montel, gérant de la société MP Logic. Cette société spécialisée dans la gestion de l’accueil propose ainsi, outre les classiques produits non informatisés ci-dessus évoqués, des solutions informatiques équipées en standard de la possibilité d’émettre des appels vocaux. Ces derniers permettent aux clients de circuler dans l’officine pendant le temps de l’attente, générant parfois des actes d’achats non prévus. Pour Philippe Montel, l’impact commercial de l’usage de l’appel vocal est direct, selon les retours de ses clients pharmaciens. Cette fonctionnalité peut aussi avoir son utilité vis-à-vis des personnes mal voyantes et des personnes à mobilité réduite de manière générale, selon Sandrine Benhassan, directrice marketing adjointe d’Esii, spécialisée dans la gestion de l’accueil. « C’est très courant dans les services publics qui prévoient des comptoirs dédiés à ce public, c’est moins courant en pharmacie », nuance-t-elle.
Le volume sonore peut être réglé selon les désirs des pharmaciens, certains d’entre eux s’inquiètent parfois de l’effet inverse, une gêne pour les clients qui circulent dans l’officine. Dans ces cas-là, un petit « dong » léger suffit à ramener le client en attente vers l’écran. On est dans une gestion à la fois visuelle et sonore de l’attente, avec l’usage désormais commun des écrans découpés en plusieurs zones. Chez MP Logic, elles sont au nombre de trois, le numéro du client qui s’affiche, celui du comptoir où il doit se rendre et un bandeau qui permet de passer différents messages publicitaires ou d’informations liées à la santé ou à l’officine. Là aussi, ce type de dispositif peut susciter une certaine prudence chez les pharmaciens, déjà très habitués à la communication par le biais de divers écrans présents dans l’officine, et conduits de ce fait à éviter l’excès visuel d’informations en tout genre. Dans ces domaines, le bon dosage est de rigueur.
Une gestion sans appel
Esii a apporté une solution simple et high-Tech pour gérer l’attente sans distributeur et sans la nécessité d’appeler. C’est son système eZQ, qui fonctionne avec des capteurs au-dessus de la file d’attente et permet de gérer l’attente avec une file unique sans appel, seul un écran vidéo dirige les clients vers les comptoirs. Un numéro s’affiche et le client dans la file se dirige vers le comptoir indiqué. Cette solution est courante dans différents secteurs, elle est par exemple visible chez Leroy Merlin, et peut être adaptée aux grandes officines, celles qui ont au moins cinq comptoirs, préconise Sandrine Benhassan. De nouvelles solutions se proposent cependant d’aller au-delà de ce qu’il faut écouter et voir. Les prestataires ont pensé à la segmentation de la clientèle/patientèle, si caractéristique des officines. Ceux qui viennent pour leur ordonnance, pour des promis, les clients attirés par la parapharmacie, ceux qui ont des rendez-vous plus médicaux, comme par exemple, liés au matériel médical, ou aux entretiens pharmaceutiques, n’ont pas les mêmes attentes et peut-être est-il judicieux de les accueillir de manière différente. Des bornes dotées des écrans tactiles permettent ainsi de leur proposer des choix, et des files d’attente segmentées. Toutefois, il est possible aussi que cela soit une fausse bonne idée. Le témoignage de Jean-François Bruelle, titulaire de la pharmacie Bruelle à Saint Dié, dans les Vosges, (voir encadré ci contre) révèle qu’après avoir essayé ne serait-ce qu’une segmentation pourtant simple en deux files d’attente, une dédiée à ceux qui venaient avec une ordonnance, et une autre proposée à ceux sans ordonnance, il est revenu à une seule file d’attente, tant les clients en question étaient dans la confusion. Peut-être cela demande-t-il un travail de réflexion plus profond sur la segmentation en question.
Occuper le temps de l’attente
Mais les bornes interactives proposent beaucoup d’autres choses. C’est là que peuvent se rejoindre gestion de l’attente et celle de l’accueil en proposant différents services aux clients et aux patients, les occupant pendant l’attente. Ces services sont très variés. Dolmen Technologies évoque ainsi des questionnaires, les pharmaciens peuvent ainsi obtenir des informations sur les clients et adapter leurs promotions, leur politique commerciale, des jeux pourquoi pas, des questionnaires de satisfaction ou même la consultation des prix des médicaments, dont l’affichage est obligatoire depuis l’été dernier. Et ceci tout en gérant l’attente par un module dédié selon les modalités classiques d’appel par numéro.
Ces bornes « à tout faire » promettent bien des possibilités. Proposée par Esii, l’identification par la carte Sésame Vitale apporte une rapidité de traitement pour le pharmacien, le client arrivant au comptoir s’étant déjà identifié. Surtout, elles vont permettre de s’adapter aux nouveaux modes de consommation induits par le phénomène des smartphones. C’est ainsi que Esii a développé Smartwait, une application qui permet d’obtenir un ticket digital de chez soi, avec identification par QR Code sur place, sur la borne. « Des rappels réguliers sont envoyés sur smartphone, par exemple, signalant que le tour du client est dans 5 minutes, celui-ci peut le décaler s’il est en retard, le système s’adapte automatiquement », explique Sandrine Benhassan. Cette application est opérationnelle dans différents secteurs, pas encore en pharmacie, mais elle donne le « la » sur les développements futurs des interfaces qui permettront de dialoguer, et donc de mieux accueillir les clients et les patients en officine.
L’ensemble de ces solutions est d’une gestion plutôt simple. Peut se poser la question de l’emplacement des bornes, à l’entrée, au centre, à un endroit de toute façon stratégique de l’officine, même si les clients devront parfois chercher ou comprendre qu’il y a une démarche à effectuer pour « s’inscrire » dans une file. Concernant la mise en place et l’entretien de ces solutions, la plupart s’installent aisément, elles sont parfois « plug & play », c’est le pharmacien qui fait tout, ou bien un installateur vient s’en occuper. Leurs prix, somme toute assez mesurés, de quelques centaines d’euros à plus de 5 000 euros pour les plus sophistiquées, vaut bien qu’on s’y intéresse.
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