Il en est ainsi de tous les nouveaux marchés, la nouveauté séduit d’abord, les bons usages arrivent ensuite. Les linéaires digitaux n’échappent pas à la règle. Commercialisés il y a deux ans ou trois ans selon les prestataires, ces produits ont d’abord émerveillé les pionniers qui se sont lancés dans l’aventure, grâce à l’image de modernité qu’ils ont pu apporter à leurs pharmacies. Installer des écrans digitaux en lieu et place des linéaires physiques OTC derrière les comptoirs a en outre facilité le travail des équipes en les dispensant d’avoir à remplir les étagères, un gain de temps et un confort plus qu’appréciables. Mais les prestataires qui ont lancé ces nouveaux produits sentent désormais qu’on est arrivé à un tournant, on ne peut plus se contenter de jouer sur l’image de modernité et sur le gain de temps : le véritable apport des linéaires digitaux est ailleurs, il est, comme tout outil digital du reste, lié à la gestion de son contenu pour en faire une véritable arme de différenciation. Cela, les fabricants de robots qui sont pour l’essentiel les principaux prestataires actuellement sur ce marché, l’ont analysé à travers le suivi de leurs clients, les comparatifs de ventes menés ici et là, des expériences de merchandising, et tendent aujourd’hui à se mobiliser pour accompagner les pharmaciens vers ces nouveaux usages. « Je ne connais pas aujourd’hui de pharmacie qui exploite vraiment toutes les possibilités offertes par les linéaires digitaux », déclare ainsi Bertrand Juchs, directeur d’Omnicell. « Les officines équipées ont de magnifiques écrans, mais on se prive de bien des possibilités s’ils restent trop statiques. »
Un accélérateur de ventes OTC
Parmi les tests et les études effectués par les prestataires, citons cet exemple éclairant d’une pharmacie de la région de Nantes, cliente de BD Rowa. « Nous avons testé une offre liée aux allergies sur un linéaire digital avec une comparaison des résultats par rapport à l’année précédente quand aucune construction spécifique n’avait été réalisée sur ce type de produits », raconte François Legaud, directeur commercial du fabricant. « C’est une stratégie thérapeutique complète que nous avons bâtie, visible sur l’écran avec bien sûr des antihistaminiques mis au premier plan, mais aussi avec des produits complémentaires en dessous, la partie basse de l’écran étant consacrée aux produits tandis que la partie haute est dédiée à une communication visuelle sur cette thématique. Les compléments étaient divers, l’offre dans ce domaine est limitée, mais il y avait des solutions nasales, des gouttes pour les yeux, des produits de médecine douce et naturelle etc… Nous avions besoin de produits différents pour que le patient ait accès simultanément à plusieurs informations. »
Résultat, de très fortes hausses des ventes sur certains produits, Rhinallergy et Humex notamment, à trois chiffres alors que parallèlement, ces hausses n’étaient « que » de 10 ou 11 % dans les pharmacies voisines pour ces produits. L’animation de ces écrans est donc la priorité affichée par les prestataires agissant sur ce marché. Or l’animation digitale, c’est un métier, et ce n’est pas celui des fabricants de robots qui se sont retrouvés être les principaux acteurs de ce marché des linéaires digitaux presque par hasard. C’est un peu l’histoire qui a voulu ça, une certaine logique industrielle, affirme en substance Bertrand Juchs. « Peut-être cela aurait-il dû être le travail des éditeurs de logiciels qui ont des équipes commerciales plus fournies que les nôtres », affirme-t-il. Omnicell entend néanmoins dédier des ressources spécifiques à cette activité, perçue par ces fabricants comme un complément à leur activité principale, la délivrance de robots et par extension la gestion de stock. C’est pour cette raison qu’ils tentent aujourd’hui de nouer des partenariats afin d’optimiser leur offre auprès des pharmaciens. La plupart d’entre eux évoquent ainsi des collaborations, actuelles ou à venir avec des groupements « qui ont tous des conseillers en merchandising », souligne Vincent Deltour, directeur commercial de Meditech. Ce dernier travaille spécifiquement avec des merchandisers pour animer les pages affichées sur les linéaires digitaux de ses clients pharmaciens. Omnicell travaille aussi quand l’occasion se présente avec des agenceurs, car les linéaires digitaux, c’est aussi une problématique d’agencement : « on modifie de fait un concept d’agencement et on touche à l’identité de la pharmacie », commente Bertrand Juchs. D’une certaine manière, les prestataires sur ce marché cherchent à créer un « écosystème » favorable au développement des usages des linéaires digitaux.
Pas de connexion avec les LGO
Mais il manque une brique importante à cet écosystème en construction, celle des LGO. « Nous avons tous développé une solution, chacun dans notre coin, qui s’ajoute mais ne s’intègre pas à l’informatique des officines », regrette Vincent Deltour. Un réel handicap selon ces prestataires car, non reliés aux LGO, les logiciels qui gèrent l’animation des linéaires digitaux ne peuvent accéder en temps réel à la mise à jour des prix affichés. Certes, ils se débrouillent pour faire en sorte de disposer des bonnes informations tarifaires, mais cela représente une perte de temps parce que, à un moment ou à un autre, il faut une nouvelle saisie. Au passage, chacun constitue une base de données qui commence à devenir conséquente : ce n’était qu’une poignée de références au tout début, se souvient François Legaud, c’est grâce notamment avec un partenariat avec un groupement que BD Rowa dispose désormais d’une base de 4 000 références, qui devrait doubler d’ici la fin de l’année. « Certes, le protectionnisme des LGO s’explique par souci de sécurité, les éditeurs se doivent de protéger leurs logiciels, néanmoins, cela nous pose un problème que nous contournons », explique Tangi Caron, directeur commercial de Gollmann Zwick. Ce n’est du reste pas une problématique technique mais commerciale, puisqu’en Belgique, les éditeurs ont travaillé de concert avec les prestataires spécialisés dans les linéaires digitaux : « nous avons développé avec eux un protocole de communication », affirme Vincent Deltour. Certains prestataires ciblent particulièrement Pharmagest, en termes diplomatiques certes, mais ils soulignent néanmoins que le leader français de l’informatique officinale n’est guère coopératif. Pharmagest, seul éditeur actuellement à disposer également d’une offre de linéaires digitaux, mais qui a d’emblée ciblé l’espace de vente et non l’OTC derrière les comptoirs, au contraire des fabricants de robots. Mais parmi ces derniers, quelques-uns commencent aussi à investir l’espace de vente des officines, BD Rowa et Gollmann Zwick. Ce dernier veut en faire un outil de consultation pour les patients, grâce à un système d’arborescence visible sur l’écran, à partir des symptômes qu’ils présentent. Ce système pourra mener à différents produits, certains nécessiteront le conseil du pharmacien. Ce linéaire digital sera relié au robot qui disposera de sorties spécifiques.
Évidemment, les linéaires digitaux connectés au robot de l’officine apportent un confort flagrant : il suffit aux équipes de commander le produit affiché qui intéresse un patient donné et il arrive par les sorties prévues à cet effet à proximité du comptoir. Cela explique pourquoi ce sont avant tout des spécialistes de l’automatisation des officines qui se sont emparés du sujet. Confort dans la gestion des stocks mais qu’il faut néanmoins anticiper avertit Tangui Caron. « Le stock de l’OTC passe ainsi dans le robot, il faut donc prévoir quelque 30 % de volumétrie en plus, c’est une des raisons pour lesquelles nous préconisons nos solutions modulables qui le cas échéant permettent une extension du robot, grâce à une taille de 30 cm supplémentaires, susceptibles d’accueillir de nouveaux produits », affirme-t-il. Sans compter le fait qu’une partie de la para peut aussi intégrer un robot. Les fabricants – ou distributeurs – de robots et d’automates qui se sont lancés sur le marché des linéaires proposent des produits globalement comparables les uns aux autres, ils sont fabriqués par des partenaires industriels spécialisés. La différenciation se fait sur certaines caractéristiques techniques, qui sont souvent vite reprises par les concurrents, et surtout sur le logiciel d’exploitation et les services qu’ils proposent. C’est ainsi par exemple que BD Rowa et Meditech proposent la possibilité pour un pharmacien de gérer les linéaires digitaux de plusieurs pharmacies, donc de centraliser éventuellement au sein d’un petit groupement régional la gestion de ce contenu.
Des nouveautés à PharmagoraPlus
Nombre de prestataires vont annoncer des innovations à PharmagoraPlus. Gollmann Zwick va ainsi présenter un « mur tactile vidéo » qui permettra aux pharmaciens de diffuser un contenu en continu sur plusieurs écrans, jusqu’à douze affirme l’entreprise. Un contenu vidéo qui pourra alterner avec les linéaires virtuels de produits selon le message que le pharmacien entend faire passer, une façon de positionner plus encore ces écrans digitaux sur des usages plus orientés sur la communication et le merchandising. Omnicell va également dévoiler la possibilité de présenter des vidéos, émanant de groupements, de laboratoires etc… BD Rowa, qui dispose de cette fonctionnalité, prévoit de lancer d’ici le début de l’été la possibilité de diffuser des boucles publicitaires. Pharmagest va pour sa part présenter une amélioration de la navigation sur ses écrans ainsi que la possibilité de les utiliser sur différents supports, permettant ainsi aux titulaires des actions à distance sur ces écrans. Les linéaires digitaux vont clairement étendre leurs capacités pour en faire des supports de contenus variés, incitant ainsi les pharmaciens à tester de nouvelles possibilités d’utilisation.
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