LES LOGICIELS n’ont certes pas attendu le dossier pharmaceutique (DP) pour sécuriser la délivrance. Ils indiquent depuis longtemps et de manière précise l’historique de chaque patient répertorié par l’officine. Mais l’apparition du DP a singulièrement transformé les pratiques en la matière. D’abord parce qu’il permet de lire l’historique des médicaments achetés par le patient dans toutes les pharmacies où il se rend (et qui peuvent lire le DP) et ensuite parce qu’il apporte une base commune et structurée à cet historique. Aujourd’hui, les éditeurs ne peuvent plus commercialiser leurs logiciels compatibles avec le DP sans avoir l’autorisation du Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens (CNOP). Certes, tous les éditeurs sans exception ont reçu cet « agrément » et en soi, cela n’est pas un problème. Mais cela limite leur apport, puisque désormais ils doivent obéir à un cahier des charges précis. D’autant que le DP évolue. Il peut ainsi recevoir à présent des alertes émanant de différentes autorités sanitaires, l’Ordre lui-même, la Direction Générale de la Santé (DGS) ou l’AFFSAPS, pour par exemple signaler un lot de médicaments défectueux. Sont-ils condamnés à suivre uniquement les préconisations du CNOP et limiter leur valeur ajoutée à l’ergonomie qu’ils peuvent apporter ou bien y a-t-il de la place pour une véritable créativité ?
Lutter contre l’iatrogénie.
« Le propre du logiciel est la façon dont il va travailler l’historique du patient », explique Patrick Sevestre, chef de produits marketing d’Isipharm. Un historique « en local » par opposition à celui du DP, et plus complet avec une fiche patient et des alertes en cas de problèmes particuliers. Le DP est fait pour lutter contre l’iatrogénie, le logiciel peut le renforcer par diverses fonctionnalités, relier l’âge du patient, son poids, sa taille et son historique par exemple ou inclure dans ces fiches des actes tels que la prise de tension en cas de problèmes artériels. Tout un ensemble de pratiques, parfois différentes selon les éditeurs, qui permet le cas échéant d’émettre une opinion pharmaceutique. « Le pharmacien peut considérer qu’il y a un souci dans la délivrance d’un médicament, évoque Patrick Sevestre, et prévenir le médecin traitant. » C’est une trace informatique qui constitue « la première base du futur dossier médical partagé » espère Jérôme Lapray, responsable marketing de Pharmagest. De ces différentes pratiques découlent des alertes qui peuvent se décliner dès lors qu’un problème est identifié, notamment dans les médicaments à prescription restreinte. C’est le cas de tout ce qui est prescription hospitalière, ou des produits dérivés du sang, ou encore des stupéfiants. Dans ce dernier cas, des alertes liées au surdosage ou aux délais de chevauchement sont proposées par Isipharm. D’autres fonctionnalités permettent également de sécuriser au mieux la délivrance sur un plan plus pratique, comme par exemple celle proposée par Winpharma, qui consiste à émettre « un ticket de manquant ce qui évite les arnaques aux promis » selon Gildas Leroux, directeur commercial.
Des données pas assez sécurisées.
À côté de l’accord obligatoire, fourni par le CNOP, à tout logiciel compatible avec le cahier des charges du DP, existe aussi une charte qualité relative à ce que devrait proposer un logiciel d’aide à la dispensation, élaborée par l’ordre avec l’aide des syndicats de pharmaciens. Elle évoque comment devrait fonctionner tout ce qui tourne autour de l’incompatibilité médicamenteuse, le surdosage etc… Mais ce qui manque encore, est la sécurité liée aux informations fournies par les bases de données à partir desquelles les logiciels fonctionnent. « Quand on introduit dans un logiciel un ensemble de données, on n’obtient pas le même résultat selon les logiciels et les bases de données utilisées par les logiciels » explique Sylvain Lemfre, directeur de la direction des technologies en santé du CNOP. « Cela peut entraîner un risque réel car pour des traitements lourds, notamment pour des personnes âgées, on n’aura pas les mêmes alertes d’un logiciel à l’autre. »
Des alertes sur votre portable.
Le CNOP travaille sur un document en collaboration avec la Haute Autorité de Santé qui conduirait à une certification dans ce domaine, mais de l’aveu même de Sylvain Lemfre, ce n’est pas un projet facile à mener. « Cela impliquerait que les éditeurs de bases de données et ceux de logiciels de gestion livrent leurs secrets de fabrication. »
Les éditeurs de logiciels de gestion concentrent, eux, leurs efforts sur ce que l’informatique mobile peut apporter dans la sécurisation de la délivrance. Du moins certains d’entre eux, à commencer par Pharmagest et son concept « ma pharmacie » (voir aussi notre article sur les smartphones). « Nous allons lancer une application qui permettra au pharmacien d’accompagner le patient dans l’observance de son traitement, notamment en envoyant des alertes sur téléphones mobiles ou smartphones relatives à la posologie » explique Jérôme Lapray. Cela pourra être bien utile dans la prise de médicaments à horaires contraints comme les anticoagulants. Et donner ainsi des informations sur l’observance des traitements. A priori, cela ne devrait pas représenter de problèmes quant à la confidentialité des données, estime Sylvain Lemfre. Une façon pour les éditeurs de garder un peu d’avance sur le dossier pharmaceutique.
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