La vidéo surveillance est passée en douceur de l’analogique au numérique. L’offre est désormais clairement orientée vers le numérique, comme bien d’autres secteurs industriels de l’image. Parallèlement, les caméras sont de plus en plus sous IP. Ces glissements changent la nature même de la vidéosurveillance, ils rendent les caméras plus performantes, et donc accessibles à des usages plus complexes, les décloisonnent en quelque sorte puisqu’ils permettent de les relier à l’ensemble du réseau et donc du système informatique de la pharmacie. Et la vidéosurveillance peut ainsi être utilisée dans le cadre d’autres usages, merchandising ou gestion de file d’attente par exemple… Ce qui fait que désormais, la problématique de la vidéosurveillance n’est plus seulement liée à la qualité des caméras utilisées mais aussi et surtout à l’intelligence qui les anime, qu’elle soit embarquée dans lesdites caméras ou se trouvent dans le serveur de l’officine, voire en système cloud.
Étude de risques
L’intelligence des systèmes de vidéosurveillance permet une première approche beaucoup plus fine qu’auparavant et suppose d’emblée de savoir de quoi on a besoin exactement. C’est pour cette raison que des prestataires proposent une étude de risque au préalable afin d’identifier tous les besoins, exprimés ou non, des pharmaciens. C’est ce que fait Daitem, fabricant de systèmes de vidéo surveillance qui, à la demande de ses installateurs, peut intervenir auprès des clients pour mener une telle étude de risque. « Cela nous permet d’identifier les zones qu’il faut particulièrement surveiller, où il faudra de la détection ou des systèmes d’alerte », explique Pascal Dugast, responsable du service technico commercial de la société.
Encore que la notion de système d’alerte doit être maniée avec précaution. « Une alerte dans une zone de réserve pour signifier une présence, oui, mais on ne peut émettre beaucoup d’alertes en live », ajoute-t-il. Certes, il y a bien des cas où, couplées avec un système d’alarme à des endroits stratégiques comme les sas de livraison, les caméras peuvent alerter un pharmacien pendant les heures de fermeture de la pharmacie. Et ça, c’est une évolution récente car auparavant, les deux systèmes travaillaient chacun de leur côté : le fait de les coupler permet désormais aux pharmaciens de réagir rapidement si l’alerte lui fait découvrir une tentative de cambriolage. « La caméra déclenche un film de l’évènement trois secondes avant », explique Pascal Dugast. « Cela lui permet d’avoir la compréhension de la scène, et de faire appel aux forces de police ou, le cas échéant, à la société de télésurveillance qui pourra utiliser cette vidéo comme levée de doute pour faire elle-même appel à la police, ce qui représente un gain de temps précieux. »
Ajoutons à cela que l’infrarouge fonctionne beaucoup mieux avec le numérique, et l’on a des systèmes plus performants dans des conditions où la luminosité est faible, la nuit surtout.
Les alertes en question
En revanche, les systèmes d’alerte en plein jour pendant les heures d’ouverture et dans l’espace de vente ne font pas l’unanimité. À se demander alors à quoi sert l’intelligence de ces systèmes s’ils n’alertent pas le vol au moment où il se produit ? De fait, les différents systèmes de détection travaillent surtout a posteriori pour identifier ce qui a bien pu se passer. Difficile en effet de repérer un vol en direct, les produits sont nombreux, occupent peu de place, ce qui, comme dans le secteur de la parfumerie, ajoute une difficulté supplémentaire à la lutte contre le vol. On est après tout dans des petites surfaces, même pour les plus grosses officines, comparativement à la grande distribution qui peut se payer des systèmes plus ambitieux mais aussi plus coûteux. Par ailleurs, la détection de mouvement, aussi performante soit-elle, ne peut pas permettre d’estimer que tel geste correspond à un vol. Seules les antennes de détection placées à l’entrée de l’officine peuvent éventuellement repérer les étiquettes qui n’auraient pas été enlevées aux comptoirs, équipement du reste tout à fait complémentaire à la vidéosurveillance. Hormis ce cas précis, la mission que les prestataires ont affectée aux caméras est avant tout le contrôle a posteriori des images afin d’identifier ce qui a pu se passer et agir en conséquence.
Détection d'anomalie
Vidéoconsult propose ainsi un système qui fonctionne comme un entonnoir, une fois l’espace vide constaté, le système va rechercher dans une plage horaire précise tous les mouvements qu’il y a eus autour de cet espace pour finir par découvrir qui, le cas échéant, est l’auteur du vol présumé. Au moins cela permet de savoir de qui il s’agit et de le reconnaître s’il revient dans la pharmacie.
Pour Marion Savoy, directrice marketing de Pryntec, la marque de vidéosurveillance du groupe TEB, le système d’alerte va fonctionner selon les critères qui auront été définis au préalable, par exemple la densité humaine dans une zone donnée, qui peut signifier un problème, ou encore la détection d’une anomalie par rapport à une image de référence. Il existe néanmoins des possibilités d’avoir des alertes sinon en direct, tout au moins assez rapidement pour pouvoir réagir.
Cédric Williamson, président fondateur de Kiwatch, évoque ainsi une surveillance permanente des zones concernées : « le système est paramétré de telle sorte que si un produit disparaît, une alerte parvient au pharmacien. » Toutes ces technologies sont appelées à évoluer et à s’affiner grâce à l’intelligence artificielle et la reconnaissance faciale, encore peu utilisée en France, si ce n’est par les administrations liées à la sécurité comme la police nationale. La reconnaissance faciale sera beaucoup plus performante d’ici deux ans environ, prédit Fabien Spacagna, responsable commercial de Vidéoconsult. Plus prosaïquement, la surveillance est facilitée par l’évolution de l’ergonomie, à l’image de Vidéoconsult qui permet aux équipes officinales de fonctionner avec ce que la société appelle « le mode réduit », c’est-à-dire une petite fenêtre qui s’ouvre sur la grande liée au LGO. La plupart des grands logiciels de gestion officinale fonctionnent désormais sous Windows, facilitant ainsi l’usage concomitant du logiciel de vidéosurveillance.
Luttes contre les incivilités
Toutes ces caractéristiques permettent de glisser vers d’autres usages, plus ou moins connexes à la vidéosurveillance. Ainsi Pryntec peut-il proposer de la gestion de file d’attente grâce à la possibilité de détecter une présence humaine importante, ou plus original, la lutte contre les incivilités. « Nous avons testé un procédé en milieu bancaire où les incivilités sont nombreuses et que l’on peut répliquer en officine : il suffit de presser un bouton au comptoir pour qu’un membre de l’équipe officinale, qui a devant lui une personne agressive, affiche l’image de cette dernière sur l’écran dynamique au-dessus du comptoir, c’est très efficace », décrit Marion Savoy. Autres applications plus fréquemment proposées, celles liées au merchandising qui intéressent au premier chef les grandes officines. Vidéoconsult propose ainsi la possibilité d’identifier les zones froides et chaudes par une cartographie en couleurs des différentes zones de l’officine par une détection globale des mouvements. « Les caméras identifient ces zones par les couleurs, de la plus chaude le rouge jusqu’à la plus froide le bleu en passant par des nuances intermédiaires pour signifier dans le premier cas une zone très fréquentée et dans le second une zone qui l’est très peu », explique Fabien Spacagna. Pryntec dispose d’une fonctionnalité analogue grâce à un système de comptage qui permet de voir ce qui amène le plus de trafic, et aboutit à une analyse des flux, les endroits où les clients passent, où ils restent et pendant combien de temps. La sophistication des logiciels d’exploitation permet aussi de proposer des outils communs à plusieurs pharmacies, réunies en groupements formels ou informels, à l’instar de Daitem et de Pryntec. « Il est tout à fait possible de désigner au sein d’un groupement un poste central habilité à faire de la supervision a posteriori » précise Marion Savoy.
Une caméra full HD à 150 €
Il reste à définir un budget pour le système le plus adéquat à chaque pharmacie potentiellement cliente. Compte tenu de la diversité des usages, la gamme de prix est tout aussi large. Attention au coût des caméras, qui peut parfois être important. « Cela ne sert à rien de mettre 5 000 € dans une caméra » estime ainsi Cédric Williamson. Inutile en effet d’investir dans des résolutions excessives, 2 mégapixels suffisent amplement, à la limite 4 pour certaines fonctionnalités qui demandent une qualité d’image renforcée. Une caméra full HD à 150 € est un prix moyen tout à fait raisonnable. Une donnée importante est aussi à prendre en compte dans le budget de la vidéosurveillance, la nécessité ou pas de refaire le câblage réseau, si on passe de l’analogique au numérique. Certains pharmaciens préfèrent du reste se contenter de renouveler leur matériel analogique, dans la mesure où l’offre de caméras avec cette ancienne technologie s’est récemment améliorée. S’il faut refaire le câblage, cela a un coût que certains prestataires incluent dans leurs propositions d’offres locatives, à l’instar de Videoconsult. « La première mensualité intègre la refonte du câblage, les suivantes seront moins élevées », précise Fabien Spacagna. « La location est intéressante parce qu’elle permet de renouveler le matériel au bout de 5 ans, or dans notre domaine, les produits deviennent vite obsolètes, elle intègre également, si le pharmacien le souhaite, la maintenance. »
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