Si le ministre allemand de la Santé, Hermann Gröhe, souhaite interdire la vente par correspondance des médicaments prescriptibles, essentiellement pour maintenir la cohérence du réseau officinal, sa décision ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique allemande. Le parti social-démocrate (SPD), membre lui aussi de la coalition gouvernementale, déplore certes l’arrêt européen du 19 octobre, mais rejette toute décision hâtive : pour lui, une éventuelle interdiction ne devrait survenir qu’en dernière extrémité, si aucune autre solution satisfaisante ne peut être trouvée.
De plus, la classe politique doit tenir compte de l’opinion publique qui, au grand dam des pharmaciens, se montre favorable aux baisses des prix que permettront ces ventes : selon un sondage, 51 % des Allemands se disent prêts à commander en ligne s’ils peuvent payer moins cher. Il est vrai que, comme le savent tous les professionnels du commerce, les Allemands privilégient avant tout le prix pour leurs achats quotidiens, quel que soit leur niveau de revenu. Ceci explique d’ailleurs le succès, outre-Rhin, des hard discounters de type Lidl ou Aldi qui, contrairement à ce qui se passe en France, s’installent aussi bien dans des quartiers aisés que dans des secteurs moins opulents. En outre, se désolent les pharmaciens, la presse, dans sa quasi-totalité, se félicite du jugement européen et semble largement omettre ses conséquences sanitaires et sociales.
Conscients que communiquer sur les risques économiques pour leurs officines ne leur apportera rien, les pharmaciens tentent donc de contre-attaquer sur le terrain sanitaire et sécuritaire. Les associations de consommateurs leur sont d’ailleurs indirectement venues en aide la semaine dernière en mettant la population en garde face à « l’explosion de fausses pharmacies en ligne qui vont appâter les clients avec de grosses remises… mais en leur envoyant des faux médicaments ». Un risque pris aussi au sérieux par les autorités sanitaires.
Pratique inacceptable
En revanche, la campagne spectaculaire de la pharmacie germano-hollandaise « Europa Apoteek Venlo » contribue, par ses excès, à renforcer la position des pharmacies classiques. Cette pharmacie virtuelle propose aux patients dispensés de tout ticket modérateur sur les médicaments (de 5 à 10 euros par boîte), très souvent pour des raisons économiques, de leur verser cette somme s’ils commandent leurs médicaments chez elle. En clair, il suffit d’aller voir un médecin, de se faire prescrire des médicaments et de les commander dans cette pharmacie pour gagner quelques dizaines d’euros. Cette pratique est jugée inacceptable, non seulement par les pharmaciens, mais aussi par le gouvernement. Les caisses de maladie n’apprécient pas non plus, mais restent silencieuses. Il est vrai, redoutent les pharmaciens, qu’elles pourraient gagner énormément d’argent en passant des contrats avec des pharmacies virtuelles pour approvisionner leurs patients chroniques en prescriptions payées moins cher… une perspective particulièrement inquiétante pour les officinaux.
Enfin, une autre catégorie de pharmacies tente de se faire entendre dans l’imbroglio hérité du 19 octobre : il s’agit des pharmacies virtuelles opérant uniquement depuis l’Allemagne, et qui doivent donc, comme les officinaux, respecter le prix unique. Une situation intenable pour elles face à leurs concurrentes germano-hollandaises, et qui pourrait même empirer si les ventes de prescriptions en ligne devaient disparaître.
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