ON POUVAIT s’y attendre. Michel-Edouard Leclerc entend profiter de l’autorisation faite aux officines de vendre en ligne des médicaments pour obtenir le droit de placer des spécialités dans les rayons de ses magasins. Sa logique est simple : l’ordonnance et le décret pris par le gouvernement sont susceptibles de créer une distorsion dans l’égalité d’accès à des médicaments moins chers entre les patients munis d’une connexion à Internet et les autres (« le Quotidien » du 24 janvier). Dans ces conditions, « rien ne devrait plus s’opposer à ce que nos parapharmacies puissent, elles aussi, vendre des médicaments OTC ! » expliquait-il récemment sur son blog « De quoi je me M.E.L. ». Invité lundi dernier sur Canal+, le patron d’hypermarchés a été encore plus clair : « Pour vendre de la dermocosmétique et du lait pour nourrissons, nous avons des pharmaciens. Donc, à partir du moment où ils sont chez nous, nous avons pour ambition de vendre des médicaments, notamment ceux qui ne sont plus remboursés. » Car la fin de la prise en charge de ces spécialités représente selon lui « un coup dur pour le pouvoir d’achat des patients, des consommateurs ».
De 25 à 30 % moins cher.
Michel-Edouard Leclerc joue la carte du social pour briser le monopole pharmaceutique et affirme être capable de vendre des médicaments entre 25 et 30 % moins cher qu’en officine. « Aujourd’hui, il n’y a pas vraiment beaucoup de concurrence entre les pharmacies (…), il y a un écart d’un à deux dans le prix des produits, affirme-t-il. Donc, on va essayer de mettre un peu de concurrence dans ce secteur. »
Ce qui reste encore à prouver. Car, en juin dernier, le groupement d’achat des centres Leclerc (la société GALEC) était condamné pour publicité trompeuse (« le Quotidien » du 18 juin 2012). Les juges de la cour d’appel de Colmar avaient en effet considéré que la campagne prétendant que les produits de parapharmacie Leclerc étaient moins chers qu’en pharmacie s’appuyait sur une méthodologie fallacieuse utilisée afin d’induire volontairement le consommateur en erreur.
Pour autant, selon l’association de consommateurs Familles rurales, les pharmaciens auraient encore des efforts à faire sur les prix pratiqués. En effet, les résultats de son dernier Observatoire sur les tarifs des médicaments révèlent que, en 2012, « les prix ne sont toujours pas homogènes et d’importants écarts demeurent d’une pharmacie à l’autre ».
Protéger les patients.
Pour Familles rurales, la vente sur Internet va permettre aux consommateurs de « désacraliser » l’acte d’achat de médicaments sans ordonnance et, peut-être, les aider à prendre l’habitude de comparer les prix entre les pharmacies. Mais, contrairement à Michel-Edouard Leclerc, l’association ne souhaite pas que la médication officinale soit vendue ailleurs que dans le réseau des pharmacies. « Familles rurales est attachée au rôle de conseil des pharmaciens, insiste-t-elle. Les patients-consommateurs doivent, dans certains cas, être orientés, entourés et sensibilisés. Les pharmaciens connaissent souvent les patients et sont capables de savoir si le médicament choisi sera ou non utilisé à bon escient. La consultation du dossier pharmaceutique, via la carte vitale, permet de vérifier l’existence d’éventuelles contre-indications. »
« Acheter un médicament en ligne n’est pas un acte anodin, le patient doit être protégé autant que possible », ajoute Familles rurales, qui espère que l’émergence de la vente sur Internet ne mettra pas en danger les pharmacies de campagne qui présentent « le double avantage d’être plus faciles d’accès et plus rapides que les officines en ligne dans la délivrance des médicaments ».
Pour l’heure, le gouvernement ne semble pas décidé à laisser partir les médicaments des pharmacies. Et même les officines virtuelles doivent obligatoirement être adossées à une officine de brique et de mortier. Pourvu que ce principe résiste aux coups de boutoir de la grande distribution.
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