Le Quotidien du Pharmacien.- Pourquoi l’UDGPO assigne-t-elle Doctipharma en justice ?
LUCIEN BENNATAN.- Sur le fond, nous attaquons parce qu’on ne peut laisser passer le fait que ce qui est interdit pour des groupements soit autorisé pour d’autres. Je parle du principe du portail qui donne accès aux sites des pharmaciens adhérents, et du partage de stock, de la logistique et des données. Nous attaquons parce que le montage même de Doctipharma est une concurrence déloyale vis-à-vis des pharmaciens, et il est trompeur. Des pharmaciens paient un loyer à Doctipharma pour faire la promotion de deux ou trois grosses pharmacies. Je m’explique, l’acheteur va choisir un produit et est dirigé vers une pharmacie ; s’il commande un autre produit que la première n’a pas, on le redirige vers une autre officine qui pourra lui proposer les deux produits, ou trois, ou quatre à la fois… Au final, il se trouvera sur le site d’une grosse pharmacie, seule à même de satisfaire l’ensemble de sa commande. À l’UDGPO, nous parlons de ces problèmes depuis la création du site de Doctipharma. Nous avons espéré qu’une agence régionale de santé (ARS) se saisirait du dossier ; en vain. L’UDGPO a donc décidé d’assigner Doctipharma en justice il y a un mois.
L’assignation en justice s’appuie sur l’arrêté de bonnes pratiques du 20 juin 2013, annulé par le Conseil d’État en mars dernier. Le site Doctipharma ne risque-t-il pas de profiter du vide juridique actuel pour affirmer être dans son droit ?
Doctipharma a été créé avant l’annulation de l’arrêté et ne peut se retrancher derrière le fait que les règles ont changé. Il n’en reste pas moins que le site internet d’une pharmacie en ligne doit être le prolongement d’une pharmacie physique. Ce n’est pas le cas de Doctipharma, la société elle-même n’a pas la qualité de pharmacien et n’a pas l’autorisation d’une ARS pour créer un site. Il s’agit d’un portail, tout comme ce que j’avais créé avec le site www.mapharmacieservices.fr pour lequel deux ARS ont exigé la fermeture au motif que l’internaute n’entrait pas directement sur le site d’une pharmacie. À l’UDGPO nous sommes convaincus que nous ne ferons pas l’économie d’un texte autorisant les portails gérés par des groupements dûment habilités, dans un cadre précis, et avec la possibilité d’utiliser leurs plateformes logistiques. Cela n’empêche pas le fait que Doctipharma doit respecter les règles. L’internaute est censé régler ses achats directement à la pharmacie, mais il paye la société Doctipharma.
Nous avons également relevé d’autres irrégularités qui s’appuient, par exemple, sur la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique. Des informations obligatoires sont introuvables, l’accès aux renseignements n’est ni facile, ni direct.
Comment expliquez-vous que personne ne se soit attaqué à ce problème après l’autorisation du premier site de pharmacien référencé sur Doctipharma ?
Les uns et les autres ont dû penser qu’une société telle que Lagardère avait construit un dossier solide et intouchable. Nous ne pouvons pas laisser faire, cela reviendrait à autoriser certains à contourner la loi. L’UDGPO devrait recevoir les conclusions de la partie adverse à la mi-septembre et un jugement devrait être rendu à la fin de l’année. Une chose est sûre : nous ne lâcherons pas.
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