Une vision au plus près du réel de la e-santé, voilà ce qu’a souhaité proposer le focus sur la santé numérique organisé par le groupe Profession Santé, dont fait partie « le Quotidien du pharmacien » durant la journée du 28 mars dernier à Paris.
Les intervenants ont cherché à rester dans le cadre de l’expérience concrète et éviter de plonger dans les nombreux fantasmes liés à la e santé. Ainsi en a-t-il été de l’évocation de la télémédecine, l’un des sujets clés de cette journée, relayée par différents retours d’expérience. Ceux-ci peuvent se résumer autour de deux constatations. D’une part, leur réussite est liée à l’expression de besoins très précis, des manques souvent, soit sectoriels, soit territoriaux ; d’autre part, des réponses très locales, apportées par… des acteurs très locaux. À l’instar de Jean-Pierre Door, député du Loiret, qui a travaillé sur la création d’un réseau de télémédecine depuis 2010 environ, un réseau opérationnel depuis deux ans, avant que la loi n’entérine certaines pratiques. « Du fait de la désertification médicale sur notre bassin de population qui avoisine les 130 000 habitants, les appels aux urgences ont quadruplé en sept ou huit ans », raconte Jean-Pierre Door. Les élus locaux ont donc travaillé avec l’ARS sur des financements régionaux et sont parvenus à créer un réseau centré sur les infirmières, formées par des médecins, équipées de tout ce qui est nécessaire à la téléconsultation, soit quelque 25 000 euros par site. Il existe aujourd’hui une dizaine de sites de téléconsultation dans le bassin de population considéré.
D’autres retours d’expérience partent des mêmes problèmes de désertification médicale, mais plus sectoriels, comme dans le domaine de l’ophtalmologie. Sophie Chappuis, PDG de la société e-ophtalmo, propose une délégation de tâches auprès des orthoptistes afin de dépister la rétinopathie diabétique. Les orthoptistes réalisent les actes nécessaires analysés ensuite à distance par des ophtalmos. De même, Isabelle Hauger, médecin coordonnateur de l’EHPAD Talensa à Talence, en Gironde, a évoqué les bienfaits de la téléconsultation, d’abord pensée pour des troubles du comportement, mais étendue ensuite à plus de pathologies. Dans tous les cas, les démarches sont très différentes d’une région à l’autre, estiment les intervenants.
Quand l’IA débloque
Ce focus est également revenu sur certaines solutions de santé numérique présentées au dernier CES de Las Vegas, le grand rendez-vous mondial de la high-tech, où la France est le troisième pays, avec près de 70 entreprises présentes. Parmi elles, Diabeloop, une plateforme de gestion automatisée du diabète de type 1. Son algorithme poussé permet de déterminer s’il y a des situations d’urgence et commande la pompe à insuline ; il est doublé d’un algorithme plus simple mais plus sûr, au cas où le premier pose problème, « l’intelligence artificielle, ça marche bien, mais parfois, ça débloque complètement », rappelle de façon imagée Erik Huneker, DG de la société.
Une autre application, présentée par Luc Soler, dirigeant de Visiblepatient.com, permet de reconstruire en 3D un organe touché par une tumeur et de réduire ainsi les erreurs d’interprétation des images médicales. Cette application est déjà utilisée par une vingtaine d’établissements hospitaliers.
Médecine augmentée
Toujours dans cet esprit pragmatique, les organisateurs de ce focus ont voulu également mettre les points sur les i quant à ce qu’on appelle le transhumanisme. Valentine Gourinat, chercheuse associée à l’université de Strasbourg, a ainsi évoqué les progrès et les perspectives de la santé numérique, loin cependant des idéologies en cours qui imaginent un homme « augmenté » grâce à l’évolution de la high-tech. « Une médecine augmentée, oui, mais pas l’homme augmenté », résume la chercheuse qui a, parmi d’autres exemples, évoqué celui des prothèses, lequel renvoie à une culture populaire très imprégnée des cyborgs et entretenue par des sportifs célèbres dotés de prothèses. « Mais en réalité, les prothèses sont confrontées à des limites d’usage, des problèmes d’apprentissage, à l’absence de retour sensoriel, à des limites physiques, les moignons sont des zones fragiles et complexes, à tel point qu’un grand nombre de patients cessent de les utiliser au bout d’un an », explique Valentine Gourinat. La chercheuse préconise une démarche de santé numérique concrète, basée sur l’expérience et les usages, loin des idéologies en tout genre. « Il faut savoir raison garder… », a-t-elle conclu.
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