PIONNIER de la vente en ligne de médicaments en France, Philippe Lailler ne livre pas d’opinion tranchée quant à la nouvelle offensive de Leclerc. Mais il comprend toutefois que le patron d’hypermarchés profite de la polémique entre pharmaciens sur la question du commerce sur Internet. « Leclerc se dit "Pourquoi pas moi ?", puisqu’il emploie des pharmaciens. J’approuve, pour ma part, la décision française de permettre la distribution de médicaments uniquement aux pharmaciens. » Quoiqu’il en soit, l’initiative du pharmacien de Caen a suscité de nombreuses réactions de la part des confrères qui ont choisi de porter plainte contre lui pour manque de conseil à la délivrance et médiatisation de sa pharmacie. « Le Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Basse-Normandie a été le premier à déposer plainte », suivi par 22 confrères bas-normands. « Moins de la moitié des plaignants se sont présentés à la conciliation les 23 et 24 janvier. La démarche n’a pas abouti et je serai donc convoqué dans quelques mois devant la chambre de discipline. »
En attendant, Philippe Lailler ne reste pas les bras croisés et déplore le retard français sur le sujet. L’arrêt européen Doc Morris de 2003 avait ouvert la possibilité aux pays membres d’autoriser la vente en ligne de médicaments. Si la plupart des pays ont légiféré, la France a laissé un vide juridique. Mais une directive européenne du 8 juin 2011 devait être transposée au 2 janvier 2013. « Cela explique que l’ordonnance du 19 décembre ait été totalement bâclée », affirme Philippe Lailler. Son décret d’application est paru au « Journal officiel » le 31 décembre dernier. Il exige que tout site de vente en ligne de médicaments soit adossé à une pharmacie, que les médicaments proposés soient exclusivement ceux autorisés au libre accès, et que la création d’un tel site soit soumise à autorisation de l’agence régionale de santé (ARS). Ceux qui ont déjà franchi le pas ont jusqu’au 1er mars prochain pour se mettre en conformité. Une hérésie pour le titulaire de Caen. « La liste du libre accès n’est absolument pas homogène. Comment explique-t-on que le Doliprane 1 g n’en fasse pas partie, alors que l’Efferalgan 1 g y figure ? » C’est pourquoi Philippe Lailler a déposé un recours avec un référé en suspension auprès du Conseil d’État et s’apprête à engager une action en justice auprès de la Cour européenne. Il conteste le fait que la vente en ligne soit réservée aux produits de libre accès, et remet en question l’obligation d’obtenir une autorisation de l’ARS. « Le Conseil d’État doit se prononcer rapidement sur le référé en suspension. En fonction de sa décision, je verrai s’il y a lieu de modifier le site Internet de ma pharmacie. »
Ce que Philippe Lailler souhaite avant tout ? Se mettre autour d’une table avec les représentants de la profession pour construire ensemble le cadre de la vente en ligne de médicaments en France. « J’ai voulu border au mieux cette pratique sur mon site, notamment en termes de conseils pharmaceutiques. Mais de nombreuses questions restent en suspens. Les internautes doivent répondre à un questionnaire avant de commander. Ai-je posé les bonnes questions ? Est-ce trop ou pas assez ? Quoi qu’il en soit, c’est le site possédant le plus de gardes fous. » Aujourd’hui, alors même que l’arrêté de bonnes pratiques pour la vente sur Internet n’est pas encore paru, il enregistre une cinquantaine de commandes quotidiennes.
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