Le Quotidien du pharmacien.- La récente étude publiée ces derniers jours par l’INSEE fait ressortir un certain nombre d’indicateurs concernant les officines de 2009 à 2014. Sont-ils en cohérence avec ceux que vous avez publiés en 2014 par exemple ?
Philippe Becker.- En 2014, nos études faisaient ressortir un revenu moyen brut de 137 Keuros pour les titulaires installés en solo et soumis à l’IRPP. Nous sommes 13 % au-dessus du chiffre communiqué par l’INSEE (121 Keuros).
Comment expliquez-vous cette différence ?
Philippe Becker.- L’INSEE travaille sur une population plus large que nous par nature. Par ailleurs, ses statisticiens ne peuvent probablement pas faire les retraitements et éliminations que nous faisons de manière chirurgicale. Avec les comptes détaillés, nous pouvons en effet constater des éléments exceptionnels, tel le rachat de points CAVP, par exemple. Nous restons toutefois dans le même ordre de grandeur.
Christian Nouvel.- En ce qui concerne la rémunération des titulaires à l’IS, en 2015, nous étions dans notre étude sur une moyenne de 56 Keuros et l’INSEE publie 59 Keuros pour 2014. Nous sommes là encore très proches…
Cette étude fait ressortir le clivage entre pharmaciens sur le mode d’exercice, le choix fiscal et statut social. Manifestement le recours à la société à l’IS dans le cadre de SEL est devenu la règle. Est-ce la fin de l’IRPP pour les officinaux ?
Christian Nouvel.- Le mouvement de fond qui conduit le chef d’entreprise en général à opter pour l’impôt sur les sociétés, qu’il exerce seul ou en tant qu’associé, est très fort. Philippe et moi avons été administrateurs d’un centre de gestion agréé pendant de nombreuses années et nous avons vu nos adhérents, qui par nature sont à l’impôt sur le revenu, nous quitter pour chercher un meilleur régime fiscal. Désormais il n’y a même plus de compétition : l’IRPP va continuer à décroître car le projet de loi de Finances 2018 projette de faire baisser l’IS de 33 à 25 % dans les 4 prochaines années (voir tableau).
L’annonce de la fin du RSI va-t-elle amplifier le mouvement pour un statut social plus proche des salariés ?
Philippe Becker.- On note que l’on va progressivement vers un statut qui tend à ressembler de plus en plus à celui des salariés pour ceux qui exercent dans le cadre d’une société à l’IS. On parle même d’instituer une protection chômage pour ceux qui auraient fait faillite. Le RSI serait remplacé (hormis pour les régimes de retraite des professions libérales) par un seul interlocuteur : l’URSSAF. La fin du RSI correspond à une demande forte des chefs d’entreprise qui sont souvent d’anciens salariés et qui ne comprennent pas la complexité du système actuel. On aurait pu faire plus simple pour atteindre cet objectif !
Comment ?
Christian Nouvel.- Tout simplement en donnant la possibilité aux associés gérants de se salarier eux-mêmes dans leur société. Ils auraient un statut de salarié cadre tout en cotisant également à la CAVP. Cela est possible dans les SELAFA et les SELAS mais impossible du fait de la législation pharmaceutique pour les SELARL car il faut pour cela que le ou les gérants soient minoritaires ou égalitaires en droit de vote. Au final on est parti pour créer une usine à gaz en supprimant le RSI alors que l’on pourrait faire basculer tout le monde dans un statut qui est simple, facile à comprendre et prévisible : le statut assimilé salarié.
Pourquoi prévisible ?
Philippe Becker.- Parce que tous ceux qui sont soumis au RSI savent que le gros problème est le décalage entre la perception des revenus et le paiement des cotisations TNS. Il y a des milliers d’entreprises qui sont en difficultés de trésorerie suite à un rattrapage de cotisations. Le statut salarié fait que les cotisations sont perçues soit au mois, soit au trimestre, s’il y a une prime elle est « cotisée » tout de suite donc pas de soucis pour la prévision.
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