« Année noire pour la pharmacie française », selon l’expression de Jean-Luc Fournival, président de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF), 2015 a enregistré sur les huit premiers mois de l’année une baisse de -2,4 % de la marge et un recul de -1,5 % du chiffre d’affaires. Ces deux chiffres laissent supposer que les baisses de prix, prévues par les PLFSS précédents, n’ont pas pu être compensées efficacement par les accords conventionnels, qui pourraient se résumer à « une politique du moins pire ». Un point de vue que conteste Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutique de France (FSPF). « Outre que les accords conventionnels ont permis de sécuriser une partie de la rémunération des officinaux, ils ont évité une catastrophe économique en instaurant le principe de l’honoraire et donc en changeant de mode de rémunération », objecte-t-il. Pas question pour autant, de se contenter de ces mesures, quand bien même elles engageraient la profession jusqu’en 2017.
Pour les représentants syndicaux, il faut rapidement trouver de nouveaux leviers pour préparer la réforme du métier et du mode de rémunération. « Mon ambition économique est de stabiliser sur la partie dispensation et de chercher la croissance sur des dispositifs d’accompagnement et de sortie d’hôpital qui peuvent être prévus au plan national ou dans le cadre de dispositifs locaux », explique le président de la FSPF. À charge alors pour l’État de s’orienter vers un acte de dispensation avec comme corollaire, « un honoraire à l’ordonnance ».
Mais la loi de modernisation du système de santé ne prévoit rien de concret pour les pharmaciens. « Une aberration à l’heure où les patients souffrant de pathologies chroniques nécessitent une prise en charge interprofessionnelle, s’indigne Gilles Bonnefond ; c’est d’autant plus regrettable que la HPST avait montré la voie à suivre. »
Acteur de santé
Un avis partagé par Jean-Luc Fournival qui considère que la pharmacie française vit un changement de modèle économique. « Avec la baisse inéluctable de la part du régime obligatoire dans la marge des officines, le pharmacien doit donc accompagner ce changement de paradigme et endosser le statut de pharmacien clinicien », explique le président de l’UNPF. Philippe Gaertner considère quant à lui que si « la réalité de la pharmacie d’officine passe d’abord par la dispensation du médicament », c’est ce statut de professionnel de santé dispensateur de médicament qui « justifie l’évolution de la profession vers d’autres missions ».
Jean-Luc Fournival voit cette transition comme « l’unique moyen de fermer la porte à la GMS car le seul fait d’accompagner le patient et de lui trouver des solutions thérapeutiques adaptées permet à chaque officinal de jouer son rôle d’acteur de santé et d’aller au-delà de la simple dispensation de boîtes ». À défaut, le président de l’UNPF estime que le taux de chômage de la profession, qui est déjà supérieur à 10 %, continuera à progresser sans que l’État n’envisage le moindre plan de sauvegarde. Convaincu que « le pharmacien de demain sera obligatoirement entrepreneur, Jean-Luc Fournival affirme que la profession ne peut compter que sur elle-même pour préparer l’avenir. » À condition d’avancer unis…
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