L’OFFICINE se serait bien passé de cette affaire-là. Mais commençons par les faits. Tout a débuté en 2008, au décours d’un signalement de la Sécurité sociale portant sur un soupçon de fraude à l’ordonnance dans une officine gardoise. Tout aurait pu en rester là. Oui mais voilà, l’enquête a révélé bien plus qu’un simple jeu de facturation et de fausses délivrances. Car les inspecteurs ont également mis en évidence un système intégré au logiciel d’exploitation de l’officine capable de minorer automatiquement ses recettes, notamment lors des ventes de parapharmacie. Un système potentiellement mis en œuvre dans de nombreuses officines réparties sur le territoire, a estimé le procureur de Nîmes qui, la semaine dernière, révélait le pot aux roses à la presse locale. Pour Robert Gelli, pas moins de 4 000 pharmacies auraient demandé l’accès à cette formule particulière, à savoir, le logiciel accompagné de son code d’accès. Un chiffre non repris par l’administration fiscale qui ne précise pas le nombre de commerces concernés ni le montant du préjudice subi par le fisc. Des sources proches de l’enquête évoquent cependant un manque à gagner pour le fisc qui pourrait atteindre les 400 millions d’euros.
Un raccourci dangereux.
Le logiciel mis en cause n’est pas l’un des moins connus, puisqu’il s’agit de la solution commercialisée par Alliadis, l’un des leaders du marché de l’informatique officinale. Depuis quelques semaines, l’outil informatique était dans le collimateur des enquêteurs. La Direction générale des finances publiques (DGFIP) vient de déposer auprès du parquet de Niort (commune proche du siège de la société) une plainte contre l’éditeur. Christian Armando, P-DG d’Alliadis, peaufine pour l’heure sa communication à l’intention de ses clients pharmaciens mais a d’ores et déjà diffusé un communiqué de presse porteur d’une mise au point au sujet de ses logiciels (voir encadré). Son principal concurrent, Pharmagest Interactive, n’est pour sa part, pas inquiété : « Notre société n’est pas citée dans cette affaire et n’a eu, depuis sa révélation dans la presse régionale, aucun contact avec l’administration fiscale » déclare, serein, Dominique Pautrat, directeur général de Pharmagest Interactive. « Chaque année, une soixantaine de nos clients font l’objet d’un contrôle fiscal, et jusqu’à présent leur logiciel n’a jamais été mis en cause », insiste-t-il.
« Des fraudeurs, il y en a dans toutes les professions, chez les avocats, chez les experts-comptables, chez les notaires, et pourquoi pas chez les professionnels de santé ? De là à généraliser à tous les utilisateurs du logiciel en cause, me semble être un raccourci dangereux », estime pour sa part Philippe Becker, de Fiducial Expertise. Pour l’expert-comptable, si les cabinets de comptabilité connaissent l’existence de ces logiciels permissifs, ils ne savent pas, en revanche, lesquels de leurs clients pharmaciens ont recours à ce moyen de fraude. « Cela ne regarde que leur éditeur informatique et eux-mêmes, en aucun cas l’expert-comptable qui n’est bien sûr pas informé de ces pratiques. » À savoir, précise au passage Philippe Becker, l’administration fiscale a rédigé une instruction (NDLR, du 24 janvier 2006) qui édicte les critères auxquels doivent satisfaire les logiciels de comptabilité informatique. En clair, on s’en doutait, les éditeurs ne peuvent pas faire n’importe quoi… « Quoi qu’il en soit, conclut l’expert-comptable, c’est désormais à l’administration de faire la preuve de la faute et à chacun de se débrouiller avec sa conscience. » L’enquête suit son cours.
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