Un entretien avec Me Axel Pivet, avocat associé au cabinet Carakters et spécialisé dans le droit des sociétés

« Une finalité patrimoniale »

Publié le 20/06/2013
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Me Axel Pivet

Me Axel Pivet

LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Quelles sont les principales nouveautés introduites par le décret sur les holdings publié le 6 juin ?

Me AXEL PIVET. - Ce texte met fin au flou juridique, qui perdure depuis la loi du 31 décembre 1990 relative à l’exercice sous forme de sociétés des professions libérales, en apportant des solutions concrètes à des questions récurrentes : qui peut être associé d’une SPFPL et dans combien de SEL peut-on prendre des participations ? Désormais, la réponse est claire : peuvent être associés d’une SPFPL des pharmaciens titulaires ou adjoints, des SEL de pharmaciens, des professionnels ayant exercé au sein de l’une des SEL détenues par la SPFPL pendant 10 ans après la fin de leur exercice et enfin les ayants droit de ces professionnels pendant 5 ans après le décès. Cette énumération exclut spécifiquement les autres professionnels libéraux de santé, renforçant l’indépendance de la profession. Pour les sociétés existantes aujourd’hui, SEL et SPFPL, un délai de deux ans est accordé pour se mettre en conformité avec les nouvelles normes.

Le texte précise-t-il aussi les modalités de détention du capital des SEL et des holdings ?

En effet, le décret détermine également le nombre de participations croisées admises : un pharmacien d’officine peut détenir des participations dans 4 SEL en plus de celle dans laquelle il exerce ; une SEL peut détenir des participations dans 4 autres SEL ; une SPFPL peut détenir des participations dans 3 SEL.

Cette faculté de détention croisée, qui ne se retrouve pas pour toutes les professions libérales, montre la finalité patrimoniale de ces sociétés particulières. En effet, la règle imposant à un pharmacien de n’exercer que dans une seule officine reste en vigueur, conjuguée à l’exigence pour une SEL d’avoir au moins 5 % de son capital détenu par un pharmacien exerçant dans l’officine, mais il peut détenir des titres d’une société propriétaire d’une autre officine.

La finalité patrimoniale représente donc, selon vous, le principal intérêt des SPFPL ?

Tout à fait. C’est précisément ce qui justifie l’attente de la profession de voir un cadre juridique enfin clairement fixé. Une SPFPL n’est autre qu’une société holding dont l’intérêt est de faciliter l’acquisition puis la transmission de l’officine en optimisant, lors de l’achat, la capacité d’emprunter en profitant de la fiscalité propre aux sociétés soumises à l’IS (impôt sur les sociétés), et lors de la cession les modalités d’exonération de la plus-value. Le fait même qu’un pharmacien adjoint puisse entrer au capital d’une SPFPL détenant des participations dans la SEL propriétaire de l’officine où il exerce, facilite cette transmission.

En cours de vie de la SEL, la fiscalité sera optimisée du fait de la détention par une SPFPL qui bénéficiera du régime mère-fille appliqué aux dividendes versés par la SEL, taxés sur une assiette de 5 % des sommes distribuées.

Le décret ainsi publié répond-il à toutes les attentes ?

Non, car il reste un frein au parfait usage de la SPFPL dans son rôle de holding d’optimisation : l’accès à l’intégration fiscale permettant de compenser les bénéfices taxables de la SEL par les déficits de la SPFPL. Cette intégration n’est toutefois possible que si la société mère détient au moins 95 % de la fille, situation presque impossible avec l’exigence de faire détenir au moins 5 % du capital d’une SEL par un pharmacien exerçant dans l’officine propriété de la SEL. Pour faire tomber ce dernier frein, il faudrait modifier le 8e alinéa de l’article L. 5 125-17 du code de la santé publique en y introduisant la possibilité de détenir au moins 5 % du capital de la SEL directement mais aussi par une SPFPL. Voici un axe de discussion et de progression pour l’avenir !

PROPOS RECUEILLIS PAR D. D.

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3017