LE « GRAND ENTRETIEN » lancé par l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF) n’est pas encore clôturé et les résultats ne seront pas connus avant septembre. Mais on peut déjà, sans prendre de risque, avancer que les étudiants sont de plus en plus nombreux à devoir concilier travail rémunéré et cours à la faculté. La crise aidant, les jeunes ne sont pas épargnés et doivent trouver le moyen de subvenir à leurs besoins et payer leurs études. La grande chance des étudiants en pharmacie est de pouvoir travailler en officine dès lors qu’ils ont validé leur stage d’initiation, qui doit se dérouler avant le début de la 3e année de faculté. Une façon d’acquérir de l’expérience, de pratiquer un métier proche de leur futur professionnel et de bénéficier d’une rémunération supérieure à la plupart des jobs étudiants. Car la rémunération des étudiants a été annexée à un coefficient, dont le point est réévalué chaque année lors de négociations entre syndicats d’employés en pharmacie et syndicats de titulaires. Ainsi un étudiant qui a travaillé moins de 350 heures en officine est au coefficient 230 (soit 1 486 euros brut mensuels à temps plein), tandis que celui qui comptabilise plus de 350 heures peut prétendre au coefficient 300 (soit 1 938 euros brut mensuels à temps plein). Enfin quand il a validé sa 6e année mais n’a pas encore passé sa thèse, il est autorisé à demander un coefficient 330 (2 132 euros brut mensuels) lorsqu’il est amené à remplacer le titulaire.
Enrichir l’expérience.
Dans les faits, les étudiants sont rarement à temps plein, de façon à pouvoir concilier cours et travail en officine. « Il n’y a pas de limite concernant le nombre d’heures travaillées, si ce n’est la limite légale de 35 heures », précise Victorien Brion, président de l’ANEPF. Généralement, les étudiants travaillent une dizaine, voire une vingtaine d’heures par semaine.
« Actuellement je suis à l’officine quelques soirs par semaine et un week-end sur deux, ce qui fait une dizaine d’heures hebdomadaires ou un peu plus. C’est une moyenne car c’est assez variable, il y a certaines semaines où je ne travaille pas du tout par exemple », témoigne Nathan Chazarenc, étudiant en 3e année et salarié à la pharmacie principale de la Porte d’Orléans, à Paris. Le jeune homme de 22 ans a commencé en mars 2013 à travailler dans cette pharmacie, sur un rythme un peu plus soutenu. « J’ai validé mon stage d’initiation mais j’ai redoublé ma 2e année de pharmacie. Pour autant j’avais validé mon 2e semestre, je n’avais donc plus de cours et j’ai cherché à travailler en officine, pour ne pas rester à ne rien faire et pour enrichir mon expérience. L’une de mes amies travaille dans cette pharmacie, elle m’a prévenu que le titulaire recrutait des étudiants. J’ai contacté M. Maman, nous nous sommes rencontrés et il m’a pris à l’essai. Tout s’est bien passé, l’entente a été immédiate avec toute l’équipe, je suis resté. Au début de la 3e année j’ai demandé à réduire mon nombre d’heures travaillées pour me consacrer davantage à mes études et cela s’est fait naturellement. » Très satisfait de son emploi, Nathan Chazarenc compte encore travailler l’an prochain pour Alain Maman, puis il avisera. Car il ne sait pas encore quelle filière il va choisir mais il semblerait que ce ne soit pas l’officine au final. En attendant, il apprécie son expérience au comptoir et tout ce qu’il a appris en étant au contact de pharmaciens confirmés et des patients. « Servir au comptoir est un peu angoissant au début, mais l’équipe m’a très bien épaulé, il y a toujours un pharmacien à proximité vers qui je peux me tourner pour demander conseil. D’autant que M. Maman ne souhaite pas que les étudiants soient à la caisse rapide, tournée vers la parapharmacie, car il considère que c’est moins intéressant pour nous. Du coup, dès le début, j’ai reçu les patients ayant une ordonnance. En parlant avec d’autres étudiants qui travaillent en officine, je mesure ma chance. Certains de mes camarades se retrouvent au comptoir sans être formés ou aidés, ou effectuent des tâches qui ne leur apportent pas grand-chose en terme d’expérience professionnelle. »
Des jeunes gens à l’esprit vif.
Au final, Nathan Chazarenc recommande aux étudiants en pharmacie de travailler en officine pendant leurs études, pour mettre en pratique ce qu’ils apprennent en cours et avoir une prise avec la réalité des patients. « Il m’arrive de tomber sur des ordonnances où figurent des molécules dont je viens d’étudier le fonctionnement en chimie. Indéniablement, passer de la théorie à la pratique m’aide à retenir. » L’étudiant salarié doit cependant être capable de jongler entre ses études et son emploi. « Ce n’est pas évident, je n’avais jamais travaillé sur le temps scolaire mais plutôt pendant les vacances scolaires. Finalement j’ai trouvé mon rythme. »
Un rythme qui convient justement à son titulaire, Alain Maman, qui embauche des étudiants depuis une vingtaine d’années. « L’avantage est qu’ils sont disponibles après les cours, le week-end, aux moments où nous avons du monde au comptoir. Ils ne le sont pas pendant les périodes d’examens, et c’est bien normal, mais ils le sont pendant les vacances scolaires, ce qui est très pratique. De plus, ce sont des jeunes gens en apprentissage du métier, à l’esprit vif, intelligents », remarque le titulaire. Pourtant tout récemment déçu par une étudiante qui a quitté son officine de manière peu convenable, Alain Maman retient surtout les bons éléments qu’il a croisés en accueillant des étudiants en pharmacie à bras ouverts. « Il faut être conscient que les étudiants en pharmacie travaillant en officine sont forcément embauchés en CDI. En 6e année, s’ils restent pour leur stage pratique, cela équivaut à la reconduction du CDI. Je ne le fais plus car je ne suis plus maître de stage. » Quant à embaucher un ancien étudiant salarié de son officine après qu’il a passé sa thèse, c’est chose courante pour Alain Maman. « Depuis 2002, j’ai quasiment embauché tous mes étudiants. Il se trouve que mon chiffre d’affaires a beaucoup évolué, il arrivait un moment où j’étais dans l’obligation d’embaucher un nouvel adjoint, qui a souvent coïncidé avec l’arrivée sur le marché du travail de l’un de mes étudiants. Ajoutons à cela le départ d’un adjoint de temps à autre, ou un passage à temps partiel… J’ai tout intérêt à proposer ces postes à mes étudiants car ils connaissent déjà notre façon de travailler, il n’y a pas besoin de temps d’adaptation, ils sont opérationnels immédiatement. » C’est pourquoi, dès qu’un poste est à pourvoir, Alain Maman n’hésite pas à téléphoner à ses anciens étudiants salariés. « J’ai eu des étudiants salariés et des adjoints exceptionnels, respectueux et travailleurs, que je n’oublierai pas ! »
Trouver son rythme.
David Finantz, étudiant en 5e année de pharmacie à Strasbourg, est tout aussi satisfait de son expérience à la pharmacie de Saint-Jean, à Colmar (Haut-Rhin). « J’y travaille depuis que je suis en 2e année, c’est dans cette officine que j’ai fait mon stage d’initiation. L’idée de rester est venue à la fois du titulaire et de moi. Le but ? Acquérir une expérience pratique et gagner un peu d’argent. Ce n’est pas négligeable car je suis étudiant boursier. » Tout comme Nathan, David remarque régulièrement qu’il voit en officine la mise en pratique de ce qu’il a appris en cours. « L’université de Strasbourg délivre une excellente formation sur l’hypertension artérielle qui balaie tous les cas que nous pouvons rencontrer au comptoir… Et j’ai retrouvé plus d’une fois ces cas de patients à l’officine. » Et là encore, la mise en pratique de la théorie aide à retenir les cours. David Finantz recommande à ses camarades le travail en officine pendant leurs études, « tant que cela n’est pas au détriment des cours ».
Le futur pharmacien de 24 ans s’est organisé pour travailler 16 à 17 heures par semaines, le soir et le week-end, ce qui lui permet d’assister à tous les cours et en particulier aux TP et aux TD. « Le fait d’être salarié en officine est bien perçu par les enseignants, du moment qu’on rate le moins de cours possible. Il faut ensuite trouver des arrangements avec son patron au moment des examens, mais ça ne pose pas de problème. Enfin, tout au long de l’année, il faut trouver son rythme pour pouvoir mener les deux de front, mais c’est tout à fait faisable. » Aujourd’hui, David Finantz a dépassé son angoisse du comptoir, grâce aux pharmaciens de son officine qui l’ont parfaitement encadré. « Tout ce que je faisais était vérifié par deux pharmaciens et j’ai pu poser toutes les questions qui me passaient par la tête, je n’ai pas hésité et j’ai énormément appris. Maintenant, cela fait trois ans que je travaille dans cette pharmacie et tout se passe bien. D’ailleurs, je vais aussi y faire mon stage de 6e année. » Le jeune homme a déjà une idée très précise de la suite de son parcours. Après sa thèse, il imagine qu’il sera pharmacien adjoint pendant 10 à 15 ans, période pendant laquelle il passera des DU d’orthopédie et d’aromathérapie, et mettra de l’argent de côté pour pouvoir s’installer.
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