LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Votre rôle de conseil auprès des pharmaciens vous permet d’avoir une opinion sur leurs qualités de chef d’entreprise. Vous initiez également à la gestion de nombreux étudiants et adjoints. Selon vous, les pharmaciens diplômés sont-ils aujourd’hui suffisamment formés pour affronter le métier de pharmacien d’officine ?
PHILIPPE BECKER.- Le diplôme de pharmacien est reconnu comme étant d’un très haut niveau tant sur le plan européen que mondial. À l’évidence, sous l’angle purement technique, les pharmaciens sont prêts à exercer leur profession et lorsqu’ils font le choix de s’installer, la compétence technique est un préalable nécessaire. Mais ce n’est généralement pas suffisant pour réussir. Actuellement, le contexte est moins favorable et par conséquent les qualités de chef d’entreprise sont primordiales.
Cela veut dire qu’ils doivent apprendre la comptabilité par exemple ?
CHRISTIAN NOUVEL.- Nous ne pensons pas qu’apprendre la comptabilité soit essentiel. La comptabilité est un système d’information qui aide à gérer une entreprise avec précision, mais être comptable ne fait pas de vous un chef d’entreprise.
On peut en effet ne rien comprendre à la technique comptable mais être un excellent gestionnaire. Nous sommes souvent surpris de voir la place que prend la comptabilité dans le cursus de gestion des étudiants. À notre humble avis, soit on forme à être comptable et cela va prendre de deux à sept ans, soit on prend le problème d’une façon différente en se posant la question des compétences que l’on peut externaliser et celles que l’on ne peut pas externaliser.
Par exemple ?
CHRISTIAN NOUVEL.- Il est très facile de trouver un cabinet d’expertise comptable pour la comptabilité, donc c’est une fonction qui peut être externalisée. Il suffit de connaître quelques bases pour comprendre son expert-comptable et tout va bien. À la limite, on peut choisir un expert-comptable qui explique bien…
Par contre, la gestion du personnel et, au sens noble, tout ce qui touche aux ressources humaines, ne peut pas être externalisé. Or, nous constatons que le sujet est très méconnu des pharmaciens faute d’un enseignement suffisant.
PHILIPPE BECKER.- Un autre exemple est la fonction achat dans une officine. Bien acheter est essentiel pour la bonne gestion de l’entreprise. Nous constatons des lacunes qui ont parfois des conséquences néfastes : marge faible, stock trop important etc. Or acheter nous semble être une fonction autant technique que commerciale.
Ici aussi, les futurs titulaires sont très désarmés et ne savent pas bien gérer cet aspect pourtant si important. Dans le meilleur des cas, comme pour les ressources humaines, on apprend « sur le tas » avec des dommages collatéraux souvent mémorables !
Mais ne dit-on pas que l’expérience est la somme des échecs ?
PHILIPPE BECKER.- Si, mais à la condition de survivre à ses échecs ! Toutes ces fonctions nécessaires à la bonne marche d’une entreprise sont enseignées dans les écoles de commerce ou les universités. Cela prouve bien que, dans ces domaines, il n’y a rien d’inné. On ne naît pas comptable, on le devient par une formation professionnelle. On ne devient pas chef du personnel ou gestionnaire des achats par hasard, on l’apprend.
Pensez-vous que cela évoluera favorablement dans le futur ?
CHRISTIAN NOUVEL.- Il y a encore beaucoup de chemin à faire, des cursus de formation à mettre en place et qui soient validés par des unités de valeur, mais l’état d’esprit est positif. Nous voyons beaucoup de facultés qui s’ouvrent au monde entrepreneurial et qui, aujourd’hui, avancent sur le sujet. Il y a une réelle prise de conscience dans la profession avec l’émergence de pharmaciens titulaires qui s’engagent dans cet effort de formation afin de passer le « témoin » de la meilleure façon possible.
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