Reprise d’officine : les arguments face au banquier

Publié le 21/02/2013
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Savoir se préparer à la négociation pour convaincre le banquier





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Savoir se préparer à la négociation pour convaincre le banquier Models.
Crédit photo : BSIP/CHASSENET

LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Le contexte économique moins favorable fait qu’il est plus difficile, aujourd’hui, de convaincre les banques sur un projet d’acquisition. Comment optimiser ses chances de « séduire » le banquier ?

PHILIPPE BECKER.- Le banquier juge à la fois le dossier d’acquisition avec des garanties et le futur titulaire. Il est donc important de lui faire bonne impression et de préparer cette rencontre comme un entretien de recrutement. Mais se faire accompagner par un intermédiaire, un avocat ou un expert-comptable lors du premier rendez-vous est à éviter : cela mettrait en évidence le peu de capacité du repreneur à argumenter tout seul. En pratique, la préparation du dossier est capitale. Elle doit faire ressortir l’implication du futur repreneur et le caractère sérieux de son projet.

Que doit-on prouver au banquier ? Quels sont les arguments qui feront mouche ?

CHRISTIAN NOUVEL.- Tout d’abord, il faut être simple et concret, il n’est pas question de faire une plaidoirie. Il faut démontrer la viabilité économique de la reprise ou de la création. Pour cela, il est impératif de mettre en perspective les ambitions que l’on a pour cette officine : en quelque sorte, faire rêver le banquier mais sans jamais présenter de chiffres irréalistes. Notamment, il faut partir des points forts et des points faibles de l’officine que l’on veut acheter et dresser une liste d’actions correctrices, chiffrées dans le budget prévisionnel, pour améliorer la performance commerciale et économique. Au terme de l’entretien, le banquier doit être convaincu que le pharmacien en face de lui est non seulement un professionnel de santé, mais aussi un chef d’entreprise qui aura le souci de rembourser ses dettes et de développer l’officine.

Que peut-on négocier lors du premier entretien avec le banquier ?

PHILIPPE BECKER.- Une bonne négociation s’inscrit dans le temps et il ne faut jamais brusquer son interlocuteur ou l’indisposer par de la suffisance. C’est particulièrement vrai lorsque le dossier est faible. En revanche, il est bien venu de poser des questions, de demander des conseils, bref de s’intéresser à la banque avant de discuter les taux. De toute façon, pour négocier, il faut s’organiser mentalement pour être en position de force. D’où l’intérêt d’engager discrètement la discussion avec plusieurs banques !

Comment bâtir un business plan « accrocheur » ?

CHRISTIAN NOUVEL.- Avant tout, le plan prévisionnel doit être réalisé avec le concours d’un cabinet d’expertise comptable. Le document doit être complet, clair et précis, avec un chiffrage pertinent des hypothèses envisagées. Rien ne doit être omis, sous peine d’une remise en question par les analystes financiers de la banque. Il ne faut jamais oublier que le décisionnaire final n’est pas l’interlocuteur local, mais un comité de prêts qui s’engagera après un rapport de ces mêmes analystes financiers. En pratique, il est donc obligatoire de convaincre plusieurs niveaux hiérarchiques.

On entend dire que les banques valident parfois les dossiers de reprise à la condition d’une renégociation du prix de vente. Est-ce exact ?

PHILIPPE BECKER.- En effet, cela se voit parfois lorsque le prix de vente est manifestement déconnecté de la rentabilité attendue. Dans ces conditions, soit le futur acquéreur renégocie le prix, soit il augmente son apport. Le vendeur est toujours surpris de cette renégociation, mais, bien souvent, dans le contexte difficile actuel, il l’accepte. La raison de la banque l’emporte toujours !

Y a-t-il de la marge pour faire baisser les taux proposés actuellement par les banques ?

CHRISTIAN NOUVEL.- Depuis quelques mois – et c’est une bonne nouvelle –, les taux d’intérêt ont atteint un très bas niveau. Par ailleurs, les banques, vous l’avez souligné, sont beaucoup plus sélectives qu’auparavant. La marge de discussion est donc en complète corrélation avec la qualité du dossier et l’apport personnel de l’acquéreur. Cela étant dit, il est toujours plus rentable de faire baisser les prétentions du vendeur de 5 % sur le prix de vente plutôt que se battre pour réduire le taux de la banque de 0,50 %. Mais rien n’empêche, bien évidemment, de négocier ces deux paramètres !

PROPOS RECUEILLIS PAR FRANÇOIS SABARLY

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2984