COUP DE THÉÂTRE au palais du Luxembourg. Mercredi dernier, les sénateurs ont décidé de reporter à 2010 la mise en œuvre de la première année commune aux études de santé (médecine, pharmacie, dentaire, sage-femme). Cette réforme est sur le feu depuis de nombreuses années et le gouvernement était attaché à ce qu'elle voit le jour au plus vite. Les députés, qui ont examiné la proposition de loi en décembre, avaient d'ailleurs repoussé un amendement prévoyant ce report. Au Sénat, Valérie Pécresse est apparue moins combative pour défendre son calendrier. Selon la ministre de l'Enseignement supérieur, les trois quarts des présidents d'universités étaient prêts pour une mise en place dès 2009. « Cela étant, nous sommes en février, les lycéens sont en train de s'inscrire pour leur rentrée dans l'enseignement supérieur et la réforme n'a pas encore été votée. Les délais qui nous sont imposés sont très courts », a reconnu une ministre, fragilisée par la grogne dans le monde universitaire. Ce report sonne comme une victoire pour les étudiants, qui ont ferraillé dur pour se faire entendre, jusqu'à organiser des opérations « fac morte », à Reims et à Tours (voir « Le Quotidien » du 9 février). Et puis il y a eu différentes actions de lobbying. « Un grand nombre de nos arguments ont été repris par les sénateurs », se félicite Mickaël Groult, président de l'ANEPF (Association nationale des étudiants en pharmacie de France). Du côté de la communauté enseignante, les avis sont partagés. Michel Brazier, président de la conférence des doyens des facultés de pharmacie, ne souhaitait pas ce report. Il admet cependant que « le délai accordé sera profitable à l'information des lycéens et des étudiants actuellement en première année ». Selon Michel Brazier, les deux tiers des établissements sont déjà prêts à accueillir les futurs bacheliers. Et les autres l'auraient été d'ici à la rentrée.
Doyens à la manœuvre.
À la faculté de Reims, Matthieu Kaltenbach se réjouit du délai supplémentaire. « Nous sommes embarqués sur un bateau que nous devons maintenant essayer de mener à bon port », estime t-il. Un bateau aux allures de galère pour le doyen rémois, qui aurait préféré que cette réforme n'ait pas lieu. « Oui au partage de programmes communs, mais nous n'avions pas besoin de mettre tous ces étudiants ensemble, confie t-il. En première année, ils ne sont ni médecins, ni pharmaciens et n'ont donc rien à échanger ».
Dans les facs, les nouveaux programmes sont bien avancés. Ils font plus de place à l'anatomie, moins à la chimie, et intègrent la botanique dans des enseignements spécifiques qui se tiendront en fin d'année. C'est donc plutôt sur la question des locaux que les difficultés se polarisent. À Reims, par exemple, les étudiants sont regroupés sur le site de la faculté de lettres. Un rapprochement facilité par les bons rapports entre facs de médecine et de pharmacie. « Nous allons accueillir 1 500 étudiants, qui vont se repartir dans trois amphis, dont deux où le cours sera retransmis, en simultané, par vidéo. Et si le dispositif technique ne suit pas, l'enseignant va devoir assurer son cours 2 ou 3 fois », explique le doyen Kaltenbach. Dans d'autres villes, comme à Paris, Lyon, Toulouse ou Nantes, les cours auront lieu sur différents sites. La loi doit d'ailleurs prévoir que le numerus clausus soit fragmenté en fonction des effectifs d'étudiants accueillis sur chaque site. Quant aux enseignements dirigés, qui représentent 30 % des cours en pharmacie, ils sont réduits à moins de 20 %. « Avec des groupes de 50 à 200 étudiants, au lieu de 30 actuellement », dénonce Matthieu Kaltenbach. « L'effectif sera fonction de la matière enseignée, qui demande plus ou moins d'interaction avec l'enseignant », temporise de son côté Michel Brazier.
L’attente de décrets.
Autre source d'inquiétude pour certains, le budget alloué à la réforme. Le président de la conférence des doyens indique que 94 millions d'euros seront débloqués chaque année pour soutenir ces changements. L'enveloppe est attribuée dans le cadre du plan « Réussir en licence », qui doit atténuer l'échec des étudiants, en particulier dans les filières de santé. La proposition de loi votée par les sénateurs comprend des dispositions en ce sens. D'abord, les étudiants « largués » au terme du premier semestre seront incités à finir l'année en fac de sciences. La ministre indique que, malgré tout, le jeu des coefficients doit permettre à l'étudiant de garder ses chances pour le second semestre. Ceux qui seront le plus en difficulté seront reçus et guidés par un responsable de la faculté.
La réforme doit aussi faciliter la réorientation au terme de la première année. Les étudiants « reçus collés » pourront redoubler ou se diriger vers une fac de sciences. D'où ils pourront revenir pour un nouvel essai en santé, 12 ou 18 mois plus tard (selon qu'ils ont quitté ou non en cours d'année). Pour les sénateurs de l'opposition, cette disposition est un « miroir aux alouettes ». Selon Mickaël Groult, cette possibilité sera offerte au compte-gouttes et n'est qu'un leurre pour faire accepter la mise en place de ces passerelles. L'une d'elles permettra aussi de changer de filière en cours de cursus. Ce « droit de remords » pourra s'exercer après trois ans d'études de santé, pour ceux qui auront réussi au moins deux concours. La mise en place des passerelles vers les facultés de sciences est, elle aussi, repoussée, et verra le jour à la rentrée 2 012. Des décrets d'application doivent encore fixer certaines modalités, qui concernent notamment ces équivalences. Les étudiants, parfois suivis par leurs enseignants, ne s'autorisent donc pas à relâcher la pression sur le ministère. Le texte entame désormais son retour vers l'Assemblée nationale, avant son adoption définitive.
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