LOUIS-CLAUDE Cadet de Gassicourt, Antoine Cadet de Vaux, Antoine Augustin Parmentier ou Joseph Félix Antoine Balland, tous ont exercé la fonction de pharmacien à l’Hôtel des Invalides et laissèrent leurs noms dans l’histoire de la pharmacie. Aujourd’hui, l’Institution nationale des Invalides occupe les bâtiments de l’ancienne infirmerie de l’Hôtel des Invalides et on peut toujours y voir la salle des boiseries, l’ancienne pharmacie, transformée en bibliothèque scientifique et le laboratoire de Parmentier, précieusement conservés. C’est François Chambonnet, actuel pharmacien en chef des services de réserve, et également passionné par l’histoire de la pharmacie, qui nous a fait revivre ces lieux.
La salle des boiseries.
Une première apothicairerie, ainsi qu’une tisanerie et un laboratoire, existaient à la création de l’Hôtel, en 1674, suite à un édit royal prévoyant de faire construire « un hostel royal pour y loger tous les officiers et soldats tant estropiés que vieux et caduques ». À cette époque, Louvois, ministre de Louis XIV, décide de nommer comme infirmières les sœurs de la Charité du faubourg Saint-Lazare, qu’on appela les sœurs grises à cause de la couleur de leur robe de bure, ayant en charge le « gouvernement entier de l’apothicairerie ». Autant dire que l’apothicaire devait obéir aux sœurs et s’occuper uniquement des préparations complexes de remèdes, sans être le maître des lieux, ce qui portera préjudice à Parmentier.
Au début du XVIIIe siècle, cette première apothicairerie fut abandonnée au profit d’une plus grande, l’actuelle salle des boiseries. Très vaste, elle est entièrement tapissée de boiseries de chêne de style Louis XV, qui, selon la légende, aurait été réalisées par l’atelier d’ébénisterie des Invalides. En réalité, elles furent exécutées par le maître ébéniste Jacques Weber, en 1732. Leur particularité tient à leur belle ornementation de quatre médaillons relatifs à l’exercice de la pharmacie dans tout ce qu’il avait à l’époque d’exceptionnel et de mystérieux. Sur l’un, par exemple, est représentée une scène avec un mortier, surmontée d’un crocodile, animal exotique, traditionnel emblème empaillé des pharmaciens dans leurs officines (au XXe siècle, les mâche-bouchons prirent la forme de ces reptiles). Sur un autre, on voit un globe terrestre sur lequel un putto pointe un endroit avec son compas, signifiant justement que la connaissance du monde, et donc la connaissance des plantes exotiques, a fait progresser la science pharmaceutique. Les deux autres représentent l’astronomie, les positions des astres pouvant influer sur la santé, et la chimie, voire même l’alchimie, reconnaissable à la présence d’un alambic. Autre surprise, derrière les faux pilastres, se cachent des séries de tiroirs portant le nom des simples conservés. L’ensemble est encore orné de pots de pharmacie, en faïence et en porcelaine, dont la majorité date du XVIIIe siècle.
L’ancienne pharmacie.
Elle succéda à la salle des boiseries alors abandonnée. Tout à fait différente, elle charme par un décor de style Restauration sobre et clair, orné d’une frise courant le long du plafond où sont inscrits des noms de grands pharmaciens. Sont toujours visibles sa grande banque de pharmacien, son armoire aux poisons, sa magnifique vasque en marbre du Languedoc et, dans une pièce attenante, sa tisanerie. Toutes furent utilisées jusqu’en 1980.
Le laboratoire de Parmentier.
Probablement le lieu le plus émouvant, il rappelle que le grand homme fut admis apothicaire en chef de l’Hôtel des Invalides en 1772 et qu’il put utiliser son petit laboratoire jusqu’à sa mort pour se consacrer entièrement à ses recherches, en particulier sur la chimie alimentaire, même après que les sœurs, considérant qu’il constituait un danger pour elles, eurent demandé au roi qu’il soit destitué de son titre et que l’apothicairerie lui soit interdite. Il cultiva alors les premières pommes de terre - il avait ramené de Saxe le précieux tubercule - dans le petit jardin voisin, puis dans la plaine des Sablons de Neuilly, pour en étudier les vertus nutritives qui impressionnèrent d’ailleurs Louis XVI, venu un jour goûter ce qui pourrait être l’aliment préconisé en cas de disette.
Du XVIIe au XXe siècle, l’histoire de la pharmacie de l’Hôtel des Invalides est très riche, comme le montrent ces trois lieux du patrimoine pharmaceutique dont l’un fut le terrain et le témoin de nombreuses expériences scientifiques. Aujourd’hui, l’Institution nationale des Invalides privilégie toujours le domaine de la recherche pour tenter de pallier les souffrances des grands invalides de guerre victimes de graves atteintes neurologiques, de pathologies orthopédiques, neurodégénératives ou neurosensorielles et de blessures médullaires. Comme pour perpétuer la tradition, la table d’expérience de Parmentier se trouve dans les locaux actuels de la pharmacie de l’hôpital…
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