La belladone (Atropa belladona L., Solanacées) est une plante herbacée vivace atteignant 1,3 mètre de hauteur, originaire des régions tempérées d'Europe. Elle porte de grandes feuilles entières et des fleurs isolées formées de cinq pétales violet brun soudés en cloche. Elles donneront des baies noires brillantes très toxiques, de la taille d'une cerise, adhérentes aux cinq sépales du calice. La baie renferme de nombreuses graines.
Accessoire de l’oracle
En médecine grecque, Dioscoride (Ier siècle) signale que la belladone entraîne des hallucinations et Pline l'Ancien note qu'elle dilate la pupille. Dans la culture grecque, les anciens avaient coutume de demander à l'oracle de leur prédire l'avenir : le « prophète » était une femme, appelée la Pythie, et questionnait Apollon. Elle inhalait alors des fumées provenant de belladone, de datura ou de mandragore pour formuler ses oracles. À l’époque médiévale, les sorcières préparaient un onguent à base de belladone pour se rendre à des séances nocturnes parfois orgiaques teintées d'hallucinations. La « bella dona », belle dame améliorait la profondeur de son regard et sa séduction grâce à l'application de belladone dans l’œil pour dilater la pupille.
Les feuilles renferment de l'hyoscyamine et de la scopolamine, des alcaloïdes tropaniques, et le scopolétol, une coumarine
En Europe pendant le Moyen-Âge, on préconisait la belladone associée à l'opium contre les douleurs liées aux opérations chirurgicales. Cazin, au XIXe siècle, l'indique pour soulager les douleurs spasmodiques et traiter la névrose, l'épilepsie, l'hystérie et le délirium tremens ainsi que dans les toux spasmodiques et la coqueluche.
Les feuilles renferment des alcaloïdes tropaniques comme l'hyoscyamine et la scopolamine ainsi qu'une coumarine, le scopolétol et des minéraux.
L'hyoscyamine bloque de façon réversible les récepteurs muscariniques des neurones du système nerveux parasympathique : c'est un parasympatholytique. Les conséquences sont une diminution des contractions intestinales (antispasmodique), des sécrétions salivaire, sudorale et gastrique, une dilatation de la pupille et une accélération puis un ralentissement du rythme cardiaque. La scopolamine a des effets identiques au niveau périphérique, mais elle est relaxante, hypnotique et amnésiante au niveau central.
L'ingestion accidentelle de baies est dangereuse
À forte dose on observe des hallucinations, un délire et une amnésie. L'ingestion accidentelle de baies est dangereuse car elle provoque des nausées, une gorge sèche, une soif intense, des vertiges, une logorrhée, des convulsions et des hallucinations, un coma pouvant conduire à la mort. Deux à cinq baies peuvent être mortelles chez l'enfant et 10 à 20 chez l'adulte. L'antidote est la physostigmine aux effets anticholinestérasiques obtenus à partir de la fève de Calabar (Physostigma venenosa).
Le sulfate d'atropine est utilisé dans certaines douleurs des voies digestives et les coliques hépatiques et néphrétiques, en cardiologie dans certains blocs auriculoventriculaires et dans certaines bradycardies. En collyre, on l'emploie dans les uvéites. Au cours de la guerre du golfe, l'atropine en injectable était proposée comme antidote contre les intoxications aux gaz de combat organochlorés.
En homéopathie, belladona est proposée pour soulager les fièvres accompagnées de soif intense, la transpiration et les rougeurs au niveau du visage.
Repères
La feuille de belladone est inscrite à la Pharmacopée européenne. La poudre, l'extrait et la teinture mère ne sont plus prescrits. L'atropine en goutte est utilisée en ophtalmologie pour dilater la pupille et par voie orale comme antispasmodique dans les dysenteries et les coliques néphrétiques ou hépatiques.
Des plantes toxiques qui soignent (2011) Fleurentin J., Éditions. Ouest France, 192 p. Plantes des dieux, des démons et des hommes (2019) Fleurentin J., Éditions Ouest France, 208 p. www.ethnopharmacologia.org
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