Au début, était un pharmacien, diplômé de la faculté de Châtenay-Malabry, titulaire d’officine en Bretagne (la dernière à Lannion), exerçant de nombreuses années au service de ses patients.
Aujourd’hui, à 60 ans, il tient boutique d’herbes et plantes à Chambéry, en Savoie, exploite un restaurant végétarien et trimbale dans la France profonde ses savoirs, racontant des histoires, parcourant des chemins plus ou moins pierreux. Conseiller en santé, thérapeute en plantes médicinales, Yves Yger croit aux vertus de ces dernières, et aux bienfaits d’une terre nourricière qui n’a pas besoin de sacrifier ses animaux pour alimenter ses humains.
Quitter la lande celtique pour grimper sur des montagnes est issu de ses rêves d’enfant, de son amour pour la nature saine et préservée, mais aussi d’une opportunité commerciale. Pharmacien FFH (Faisant Fonction d’Herboriste) il a, tout au long de sa carrière, promut et pratiqué la phytothérapie, dans le cadre très réglementé de l’activité officinale. Il se considère comme un vulgarisateur de la botanique, tout en revendiquant l’appartenance à ce qui reste toujours sa vocation.
« Mon maître en la matière fut le pharmacien-biologiste-botaniste-écrivain Jean Marie Pelt, révèle-t-il, et tout au long de mes études j’ai eu affaire à des passionnés de l’herboristerie, très liée comme chacun le sait à la pharmacie. D’autre part, être docteur diplômé crédibilise mes discours, apporte s’il en est besoin du sérieux à mes propos. Ma boutique est petite, j’y exerce seul, ce qui me change de ma dernière affaire où j’employais neuf salariés. Mais il y a en plus notre restaurant voisin de quarante couverts, seul authentique végétarien de la ville, où j’ai deux employés, l’ensemble formant un tout avec le même objectif : faire connaître, goûter et apprécier herbages et plantations. »
Pèlerin des champs
Afin de partager avec le plus grand nombre ses connaissances et ses passions, ce pharmacien pas tout à fait comme les autres a pris cette année son bâton de marcheur pour parcourir, un mois durant, les chemins, sur une diagonale de 900 km, reliant la Savoie et la Bretagne. Au total une trentaine d’étapes définies à l’avance, dont la moitié en « spectacles » choisies selon leur équipement en jardins ou en sites remarquables, avec pour seule logistique une valise à roulettes pesant 25 kg.
Dans chaque ville retenue, il a ouvert son théâtre de verdure, parlant bien entendu de ses plantes, inspiré par Axel Kahn qui fit naguère des parcours similaires sur le thème de l’ethnologie. Avec, en soutien, le partenariat des Jardins des plantes de Nantes - il a constitué pour ce dernier un « Herbier des Bords de Chemins de la France » en 2015 – il a donné ses 15 représentations sur ses thématiques favorites.
Narrant légendes et histoires, visitant associations, propriétaires de jardins, pharmaciens (comme à Guéret, dans la Creuse, pays de sa naissance) il a, l’été dernier, diffusé ses savoirs à qui voulait les entendre.
« Le pharmacien est légitime pour ce genre d’initiatives, explique Yves Yger, comme il est précieux en conseils pratiques pour, par exemple, consommer des champignons. Ma fonction officielle m’a permis d’être pris au sérieux, dans des discours aussi bien ludiques que pédagogiques, mêlant mes exposés aux légendes locales, avec l’idée d’offrir un spectacle plus qu’une conférence. J’ai fait la part belle à l’improvisation, à la rêverie, à la surprise, communiant et dialoguant par la botanique, écrivant aussi, en me réservant des instants de solitude sous la tente, en pleine nature. J’ai observé l’évolution du monde des plantes, lié au développement des transports humains et au réchauffement climatique, préparant bien entendu un futur livre sur tous ces parcours et aventures. »
On verra bientôt ce « Chemineau des herbes » dans un documentaire diffusé sur la 5 dans le cadre de l’émission « Silence ça pousse », dont un caméraman a suivi ses pas. Pour en savoir un peu plus sur sa démarche, on s’intéressera également à son site Internet : www.lechemineaudesherbes.com. Et l’on attendra qu’il reprenne sa marche, peut-être en 2017, sur les sentiers de Provence ou d’ailleurs. Tant qu’il y aura des chemins…
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