À Kiev, tout ramène à la place Maidan. Cette agora encadrée de hauts édifices a été le témoin des heures fortes du pays, lors de la Révolution orange en 2004-2005 et des tragiques événements de 2014 entre pro-Russes et pro-Européens. Aujourd’hui, la place a retrouvé son calme, avec ses fontaines et ses allées prises d’assaut par les habitants. La cité revit. Avec 3 millions de Kiéviens, ses quartiers s’étendent au-delà du Dniepr, le fleuve qui traverse la métropole et organise la cité, secteurs anciens rive droite, banlieues interminables rive gauche. L’été, il sert d’espace de jeux et les familles se précipitent sur ses berges.
Mais visiter Kiev, c’est d’abord prendre le pouls de son patrimoine religieux, de ses quartiers populaires ou opulents et de sa culture shopping, réservée aux plus nantis. De cette dernière témoigne le Khreschatyk, Champs-Élysées à la mode slave, bordés de boutiques à l’occidentale et de cafés-terrasses animés.
Petchersk témoigne d’une autre prospérité. Près du quartier de Lypky, où résident politiques et diplomates, cette cité religieuse est le siège du patriarcat orthodoxe ukrainien. La Laure de Petchersk bruisse de la ferveur des croyants, reconnaissables au ballet des femmes portant foulard sur la tête. Ailleurs, les églises ont retrouvé leur lustre. C’est le cas des cathédrales Sainte-Sophie et Saint-Michel au Mont d’Or. Les coupoles dorées et la façade bleue de cette dernière irradient.
Il faut visiter aussi Podil, quartier populaire des bords de Dniepr. Autour de la grande place Kontraktova, la vie urbaine bat son plein, entre marché couvert et tramways déglingués. On la quitte en grimpant la rue pavée Andreevski. Arty et bohème, elle a des faux airs de Montmartre et se hisse jusqu’à l’église-belvédère Saint-André, ouvrant un large panorama sur la ville. C’est dans cette rue que vécut Boulgakov, le célébrissime écrivain et médecin russe.
Un joyau méconnu
L’immense hall de la gare centrale de Kiev est le point de ralliement pour tous les départs vers les provinces ukrainiennes. Après cinq heures de train, voici Lviv, à l’ouest du pays. De son passé polonais, cosaque, russe et même suédois, nourrie par l’influence austro-hongroise, elle a hérité d’un patrimoine splendide, symbolisé par la place Rynok et ses édifices baroque, gothique et Renaissance.
C’est le joyau méconnu d’Europe de l’est. Les touristes polonais y sont nombreux, au milieu des 2,5 millions de visiteurs reçus par la ville l’an passé. L’été, l’ambiance jeune et festive autour de cafés branchés ou souterrains (comme l’étrange Kryjivka), est contagieuse. Opéra « viennois », palais de Potocki, chapelle Boyim, cathédrale dominicaine, églises de la Transfiguration et arménienne, bâtiments historiques, musée de la Pharmacie…, de petites rues à restaurants en places cachées, la cité mérite à elle seule un court séjour.
Les arbres et les escaliers d’Odessa
Direction la mer Noire et Odessa, à une heure d’avion de Kiev. Ce qui frappe dans cette cité portuaire, ce sont… les arbres. Oui, les arbres, florilège de platanes et d’acacias blancs ombrageant rues et avenues. Un verdissement qui renvoie à l’histoire de la cité, voulue par l’impératrice Catherine II, à la fin du XVIIIe, pour créer un nouvel accès portuaire. Le site est alors en « bout de steppe », aride et pauvre en eau. Pourtant, Odessa devient vite une cité prospère. Elle connaît son heure de gloire au XIXe, grâce à des gouverneurs… français. Le duc de Richelieu, arrière-petit neveu du Cardinal, qui a quitté la France à la Révolution et s’est engagé dans l’armée impériale, fait appel à des architectes européens, plante des arbres, aménage des conduites d’eau. Puis Alexandre de Longeron, nommé gouverneur militaire en 1815, fait d’Odessa un port franc et facilite l’aménagement du boulevard Primorskiy, promenade ombragée favorite des Odessites.
Les habitants n’ont pas oublié ce passé et restent nostalgiques du temps où Odessa attirait l’intelligentsia littéraire russe, parmi lesquels l’incontournable Boulgakov. La statue de Richelieu trône en haut du célèbre escalier Potemkine, 192 marches descendant vers le port, coupé de la ville par une colline.
Le visiteur doit évidemment se perdre dans les rues d’Odessa, ville de passage et d’exil, creuset multiculturel avec ses communautés religieuses orthodoxe, catholique, arménienne, grecque, allemande, juive, polonaise, tatar… Le Passage, justement, somptueuse galerie marchande du XIXe aux magasins encadrés de devantures en bois, si baroque, est à découvrir absolument.
Ici, les habitants sont d’abord d’Odessa, avant d’être Ukrainiens. La ville conserve par ailleurs son attrait côtier, avec la zone balnéaire festive d’Arcadia, succession de plages, de restaurants et de cafés de bord de mer. Une des images de ce pays multiple, passionnant pour les voyageurs désireux de découvrir une nation placée aux franges de l’Europe.
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