Avec le recul, les trois premiers tests de dépistage autorisés à l’officine - dans des cadres précis -, en août 2016, ont été… de bons tests pour évaluer les capacités et la volonté des pharmaciens de réaliser des TROD, si utiles en santé publique. Le test capillaire d’évaluation de la glycémie destiné au repérage d’une glycémie anormale lors de campagnes de prévention du diabète et réservé aux patients jugés à risque ; le TROD oropharyngé de la grippe, non recommandé en dehors des périodes épidémiques ; et le TROD oropharyngé des angines à streptocoque bêta-hémolytique du groupe A, indiqué chez les patients présentant un mal de gorge évocateur d’angine (mais pas de rhinopharyngite).
Le Covid-19 comme accélérateur
Une heureuse initiative car 3-4 ans plus tard, les pharmaciens, entraînés pour la plupart à pratiquer ces tests, allaient être appelés en renfort pour tester les patients suspectés de Covid-19. C’est d’ailleurs à la faveur de la pandémie que cette nouvelle mission de dépistage a pu se développer et s’installer durablement dans les pratiques. À partir d’octobre 2020, les officinaux ont ainsi pu réaliser deux TROD spécifiques : des tests antigéniques nasopharyngés Covid-19 - dont les résultats sont obtenus plus rapidement que ceux des tests RT-PCR, en 30 minutes maximum - et des tests sérologiques Covid-19 sur sang capillaire permettant de détecter des anticorps dirigés contre le coronavirus (SARS-CoV-2). Cela sans avoir besoin de prescription médicale mais moyennant une formation et le respect de quelques contraintes : espace de confidentialité et règles d’hygiène strictes.
Le réflexe de se rendre à la pharmacie « pour être testé » reste présent dans la population
À partir du 15 octobre 2021, les tests RT-PCR et antigéniques n’ont plus été systématiquement gratuits pour les patients et, avec l’amélioration de la situation sanitaire en France, depuis le 1er mars 2023, ne sont plus pris en charge à 100 % par l’assurance-maladie mais à 70 %, la partie restante pouvant l’être par les mutuelles. À certaines exceptions près cependant : les professionnels de santé et des secteurs médicaux ou sociomédicaux, les patients en ALD, les 65 ans et plus, les mineurs, les patients immunodéprimés ou encore bénéficiant d’une exonération (assurance maternité, invalidité…). En revanche, alors qu’avant cette date, seules les personnes justifiant d’un schéma complet de primo-vaccination contre le Covid-19 bénéficiaient d’une prise charge totale, le critère de vaccination a été supprimé. En dépit de ces modifications qui peuvent perturber, le réflexe de se rendre à la pharmacie « pour être testé » reste présent dans la population et devrait s’ancrer plus encore avec les dernières dispositions du PLFSS 2024 (après publication des décrets d’application) concernant les TROD angine et cystite.
Prescription sans ordonnance
Dans sa volonté d’élargir davantage leurs compétences pour désengorger les cabinets de ville, répondre aux besoins dans les déserts médicaux et en même temps maîtriser l’antibiorésistance, l’État a en effet choisi d’autoriser les pharmaciens à prescrire, si nécessaire à l’issue de ces deux tests, des antibiotiques ad hoc. Tous les pharmaciens et non plus uniquement ceux exerçant dans le cadre de maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), de centres de santé ou de Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
Jusqu’ici, en ce qui concerne l’angine simple, le pharmacien pouvait délivrer un antibiotique seulement si le patient orienté par son médecin était muni d’une ordonnance de dispensation conditionnelle et, bien sûr, si le TROD oropharyngé réalisé à l’officine décelait une angine bactérienne à Streptocoque du groupe B et non pas virale. Désormais, l’officinal pourra proposer aux patients présentant des symptômes d’angine (de plus de 10 ans, sans fièvre élevée ni difficultés à respirer) de les tester puis, en cas de résultat positif, de leur prescrire directement une antibiothérapie adaptée. Pour le TROD cystite sur bandelette urinaire, le protocole est identique. À condition de régler la délicate question des toilettes : aménagement dans l’espace réservé au matériel médical, paravent dans l’espace de confidentialité, sanibroyeur… Dans les deux cas, une formation spécifique est obligatoire mais les organismes spécialisés sont déjà prêts.
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