Premières impressions de ce que sera l’exercice 2024 : les alarmes actionnées dès l’année dernière par les experts-comptables sont plus que jamais d’actualité. Ainsi, au cours des six premiers mois de l’année, comme l’analyse le réseau CGP, le taux de marge brute globale s’effondre à 28,51 % du chiffre d’affaires, contre 29,32 % un an auparavant. Un taux jamais vu depuis une dizaine d’années et qui signale une érosion continue de la rentabilité officinale. Même si en valeur, les pharmaciens ont engrangé en moyenne près de 11 000 euros de plus qu’un an auparavant, soit 350 974 euros en moyenne.
Décrochage
Les médicaments chers, dont le prix est supérieur à 150 euros, poursuivent leur progression. Leurs ventes ont augmenté d’environ 12 % au premier semestre portant la hausse du chiffre d’affaires à 6,11 % à 1,231 million d’euros. Retraitée des médicaments chers, la hausse du chiffre d’affaires atteint, en revanche, à peine 4 %. Par conséquent, analysent les experts-comptables, les deux tiers de l’évolution de l’activité officinale sont désormais imputables aux médicaments chers.
De l’avis des cabinets comptables, le décrochage du ratio marge brute globale/chiffre d’affaires s’explique en partie par une hausse des charges et plus particulièrement des charges de personnel. Selon les chiffres diffusés par le réseau CGP, les coûts salariaux augmentent de 5,34 % au premier semestre 2024, pour atteindre 10,95 % du chiffre d’affaires. Ce taux était de 11,03 % à la même période en 2023, mais sur un chiffre d’affaires inférieur de 6,11 %. Du reste, la hausse de la masse salariale est désormais supérieure à celle du chiffre d’affaires hors médicaments chers (+ 3, 97 %). Les charges de personnel relevées par Fiducial au sein des 95 officines de la région Centre confirment cette tendance avec une évolution globale de 6 % sur les six premiers mois de l’année par rapport au premier semestre 2023.
Critère de productivité
Joël Lecoeur réitère ses mises en garde. Les frais de personnels croissant plus vite que la marge brute globale, les titulaires vont à nouveau devoir faire face au fameux « effet ciseaux », observé en 2023. Sans compter que ne sont pas encore compris les frais généraux, le coût de la dette…
Quelle mesure prendre dans ces conditions ? Faut-il licencier pour retrouver de la marge, le poste salaires pesant de plus en plus lourd dans le bilan officinal. Car le critère de productivité ne se base plus sur le ratio chiffre d’affaires par salarié, mais sur la marge brute dégagée par ce salarié. « Les frais de personnels progressent davantage que la marge brute globale en hausse de 3,18 points sur les six mois de cette année. C’est le même effet ciseaux que nous avions déjà observé en 2023 », observe Joël Lecoeur. Il rappelle que le salaire chargé d’un adjoint rémunéré au coefficient 600 s’élève à 81 000 euros tandis que la marge dégagée par ce même salarié est estimée à 105 000 euros. « Certains titulaires ont déjà été contraints de se séparer de salariés afin de retrouver un niveau de rentabilité suffisant. Car, aujourd’hui, nous sommes face à de tels niveaux de marge qu’il va être compliqué désormais de rémunérer le personnel », relève-t-il.
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