Challengée ces derniers mois par la direction générale de l’entreprise (DGE) et par le ministère de la Santé pour simplifier la vente en ligne des médicaments, la profession s’est regroupée autour du projet « Ma Pharmacie en France » initié par Federgy – la Chambre syndicale des groupements et enseignes de pharmacies - il y a plus d’un an. « La vente en ligne des médicaments est un sujet qui revient sans cesse au niveau des régulations. Il y a déjà eu un premier arrêt au niveau de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), puis il y a eu le discours de politique générale de Gabriel Attal, alors Premier ministre, en janvier 2024, qui a voulu simplifier la vente en ligne de l’OTC. Ensuite il y a eu l’arrêt du 29 février 2024 de la CJUE qui reconnaît que, effectivement, les États pourraient interdire la vente de médicaments et la mise en œuvre de plateforme sous réserve que les produits soient vendus par un pharmacien », explique Alain Grollaud, président de Federgy et chef d’orchestre du programme. La pression monte.
Toute la profession est ainsi mobilisée : les groupements (Federgy et l’Union des groupements de pharmaciens d’officine – UDGPO) ainsi que les deux syndicats représentatifs de la profession (l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine et la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France). Car « la clé du succès, c’est l’usage et le référencement. Il faut qu’on soit nombreux, il faut qu’on soit unis », lance Alain Grollaud. « C’est toute la profession qui s’est emparée du sujet, et c’est important au regard des tentatives de divers acteurs d’arriver sur ce marché. On pense notamment à une start-up qui annonce se vendre à Amazon ou à Uber ! », ajoute Laurent Filoche, président de l’UDGPO.
Le patient sera dans un environnement connu, qui respectera l’identité de la pharmacie et de son groupement. Un site sera également créé pour les pharmacies qui n’en ont pas
C’est également le sens de l’histoire. « Il y a cette tendance forte de se faire livrer, notamment des jeunes générations. Il ne faut pas que les pharmacies restent sur le bord du chemin, sinon d’autres acteurs répondront à cette demande. Cette tendance de fond, il faut y aller, il faut que la pharmacie se modernise », argumente Laurent Filoche.
Un portail, pas une plateforme
C’est le message martelé depuis le début pas les pharmaciens, notamment auprès des autorités. « On ne veut pas de plateforme, on ne veut pas de stocks déportés. Mais on veut proposer un portail de services », insiste Alain Grollaud. Qui explique : « Un portail de services, c’est la mise en relation d’un patient et la pharmacie de son choix. On laisse la main au patient. À partir de là, ce qui est important, c’est de sécuriser la vente de médicaments hors prescription, de sécuriser la livraison et de pouvoir piloter ce portail. Ce sont les groupements et les syndicats qui pilotent le portail qui auront la main. C’est un outil qui va nous appartenir. »
Le principe : le patient sera dans un environnement connu, qui respectera l’identité de la pharmacie et de son groupement. Un site sera également créé pour les pharmacies qui n’en ont pas, ainsi que la déclaration d’activité à l’Agence régionale de santé.
« C’est le numérique qui prend le relais de la relation avec la pharmacie dont il a l’habitude », résume Alain Grollaud.
C’est le numérique qui prend le relais de la relation avec la pharmacie dont il a l’habitude
Alain Grollaud, président de Federgy
Des services
La profession a donc bâti un portail de vente en ligne, mais pas que ! Le portail est constitué de 6 briques majeures :
- Dispensation et livraison de médicaments suite à l’envoi de l’ordonnance par messagerie sécurisée de santé (MSSanté) « La dispensation peut se faire au comptoir, en téléservice ou à domicile, le choix est laissé au pharmacien. La livraison est un acte différencié sous paquet scellé et opaque. La livraison se fait en partenariat avec La Poste et sera, dans tous les cas, payante », explique Alain Grollaud. Sont exclus : les stupéfiants, les médicaments de la chaîne du froid et les médicaments d’exception. La facturation se fera obligatoirement à partir de l’original de l’ordonnance et avec la carte vitale.
- Vente et livraison OTC. « C’est le cheval de bataille des politiques. Ils ont ça en tête. On dirait qu’il faut absolument le faire, raille le président de Federgy. On apporte ici un service, mais il n’y a pas forcément un besoin. Cependant il faut répondre à un besoin sociétal des patients. Toutes les enquêtes marketing montrent que 30 % de nos patients souhaitent cette livraison. On va y répondre. »
- Communication sur les services disponibles : messages génériques sans publicité, vaccination, test de dépistage, messages santé publique. Pour Alain Grollaud, « le grand public ne connaît pas ce que l’on fait en pharmacie. Il faut absolument que l’on soit actif sur la communication et le relais des messages de santé publique. »
- Agenda pour rendez-vous patients (vaccination, entretiens pharmaceutiques, dépistage…). « Le métier change, les pharmaciens ont été assaillis pour des tests angine ou cystite. Il faut trouver des ressources, du temps. Il faut donc organiser ces pratiques », commente Alain Grollaud.
- Intelligence artificielle pour la détection des fausses ordonnances et l’interopérabilité avec l’outil ASAFO de l’assurance-maladie.
- Coordination entre professionnels pour la sortie de l’hôpital. « C’est un sujet dont on parle depuis des années. Pourquoi ne pas mettre en place, enfin, cette coordination ? », n’oublie pas le patron de Federgy.
Autre service qui sera intégré : la visualisation des pharmacies de garde.
« Tout ceci sous réserve d’apporter une interopérabilité indispensable avec les LGO pour tout ce qui est stock, disponibilité et prix des produits », note Alain Grollaud.
« Les différentes briques seront mises en place en fonction des avancées et des négociations avec les différents acteurs, mais pour début 2025 on a l’ambition d’avoir la première brique, la plus importante, celle de la livraison à domicile », concluent Laurent Filoche et Alain Grollaud. Rendez-vous en 2025.
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