DÉJÀ PROBLÉMATIQUE, et parfois gravissime quand le traitement est court (antibiotique par exemple), la mauvaise observance est encore plus préoccupante en cas de maladies chroniques, de traitements lourds et de polymédication. Les seniors sont donc particulièrement concernés. Les maladies chroniques touchent 57 % des personnes âgées de 65 ans à 74 ans et environ 70 % des 75 ans et plus (rapport 2010 de la DRESS), ce qui entraîne la prise concomitante de 3 voire 5 molécules différentes. En 2012, l’enquête PAQUID a ainsi calculé que les personnes âgées vivant chez elles consommaient 4,5 médicaments par jour et que chaque ordonnance comprenait en moyenne 3,4 spécialités distinctes. Or, le fait d’avoir plus de 3 traitements est un facteur aggravant reconnu d’inobservance. Le remplacement d’un médicament princeps par un générique également, à cause surtout du risque de confusion lié au changement de nom.
Troubles visuels.
Les problèmes liés au vieillissement proprement dit ont un gros impact. Les troubles visuels (glaucome, DMLA…) provoquent des erreurs ou des mauvais dosages (pipettes avec graduations) et les troubles auditifs une mauvaise compréhension des explications du médecin ou du pharmacien, les problèmes de dextérité gênent pour ouvrir des sachets, couper des comprimés ou instiller un collyre, les troubles de la déglutition empêchent d’avaler et les troubles de la mémoire sont responsables d’oublis ou, au contraire, de prises répétées. La solitude et la dépression, fréquentes dans cette tranche d’âge, jouent aussi un rôle. Une plus grande sensibilité aux effets indésirables des médicaments (2 fois plus après 65 ans) est également en cause. Enfin, l’angoisse des pertes de mémoire ou de la dépendance est courante. Les seniors « autogèrent » alors leur traitement en fonction de ce qu’ils pensent ou ressentent : diminution des doses, espacement des prises ou interruption.
Le programme Marguerite.
Les industriels cherchent depuis longtemps, et de diverses façons, à réduire les mésusages et l’inobservance. Pour leur part, après la crise du Furosémide pour laquelle il a été innocenté, le laboratoire Teva France s’est penché sur le cas particulier des personnes âgées en s’appuyant sur un groupe de travail composé de 4 pharmaciens (3 de ville et 1 hospitalier), 3 médecins, 1 psychologue hospitalière en gériatrie, 2 représentants d’associations de personnes âgées, 1 philosophe ancien pharmacien et 1 sociologue. Neuf mois après, le groupe a accouché d’un livre blanc contenant 20 recommandations concrètes, les unes visant à faciliter l’observance au quotidien des seniors à leur domicile, d’autres à sensibiliser les différents acteurs de l’observance et à renforcer la coordination dans le parcours de soins. Par ailleurs, le laboratoire a mis à la disposition de ses collaborateurs un outil de simulation des effets du vieillissement pour se mettre dans la peau d’une personne âgée de plus de 75-80 ans dans son parcours de soins.
Les premières réalisations Teva, inspirées des recommandations du programme de prévention Marguerite lancé en septembre 2014 ont été : des nouveaux conditionnements de médicaments génériques, mis au point avec l’aide d’une agence de design, pour répondre à la recommandation n° 5 « Adapter les boîtes de médicaments aux besoins des personnes âgées » (voir l’encadré). Certains conditionnements sont disponibles depuis fin décembre mais le remplacement des boîtes actuelles sera total fin 2015 ; un calendrier santé trimestriel pratique à afficher sur le réfrigérateur, pour noter et garder toujours à l’œil les rendez-vous chez le médecin et les passages à la pharmacie. Les experts ont en effet rapporté que les risques d’inobservance ne sont pas les mêmes suivant les saisons. L’hiver par exemple, le nombre de médicaments augmente avec les maladies saisonnières et les professionnels de santé, très accaparés, sont moins disponibles pour aborder le sujet de l’observance. Après le calendrier « hiver », le calendrier « printemps » sera distribué aux pharmaciens en avril.
D’autres actions telles que des formations spécifiques sur l’observance et une Journée nationale de l’observance sont à l’étude. Les résultats d’une enquête observationnelle (IPOP : Investigations, Prescriptions Officines Personnes Âgées Polymédiquées), menée en France auprès d’un échantillon représentatif de pharmacies, sont aussi attendus fin mars 2015.
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