Les raisons qui motivent à digitaliser une officine sont relativement élémentaires.
Elles sont avant tout d’ordre organisationnel, concurrentiel et, bien sûr, réglementaire. À quand le zéro papier ? La dématérialisation complète des ordonnances sera rendue obligatoire au plus tard le 31 décembre 2024. La prescription se retrouvera alors directement sur la base de données de l'assurance-maladie, via la carte Vitale du patient. Étant donné ce petit point « actu », digitaliser son officine n’est rien d’autre qu’une « question de survie pour celles qui souhaitent pérenniser leur activité. Une officine devra donc impérativement s’équiper d’un back-office, capable de recevoir et traiter les e-prescriptions », estime Alexis Berebby, cofondateur du groupe Leader santé.
Stratégie digitale
Au-delà de la seule survie, cette digitalisation fait aussi partie intégrante du développement structurel d’une officine. « De plus en plus d’officines déploient un site d’e-commerce proposant du click & collect et, pour certains, de la vente en ligne », explique Alexis Berebby. Faute d’une offre digitale et « au regard de ces évolutions, une officine qui ne se digitalise pas pourrait voir sa clientèle partir ailleurs », prophétise le président de Leader santé. Toutes proportions gardées, si les sites de vente en ligne tendent effectivement à se développer, ils sont relativement peu nombreux à être recensés sur le site de l’Ordre national des pharmaciens (à peine plus de 800 pour plus de 20 000 officines). En outre, les services de vente de médicaments en ligne sont déjà fortement concurrencés par l’offre d’autres plateformes basées à l'étranger, « beaucoup plus concurrentielles en termes de prix » selon Olivier Verdure, directeur de Pharmonweb.
Pharmonweb, qui développe des outils marketing pour les groupements de pharmacies, travaille avec plus de 4 000 pharmacies en France et 45 groupements partenaires. Son directeur explique au « Quotidien » que, sans même parler de communication, « le digital est l’unique moyen à disposition du titulaire pour fidéliser ses patients en dehors de l’officine ». Pour les officines présentes sur le Web (sites Internet et réseaux sociaux), il s’agit avant tout d’être bien référencées par Google, le tout-puissant moteur de recherche (92 % des parts de marché en France). Et ce, en se familiarisant avec les techniques de référencement naturel (SEO) ou de référencement payant (SEA), par l’achat de mots-clés (autorisés pour les médicaments non soumis à prescription). Car cruellement, Google « mettra en avant les pharmacies qui ont un site, plutôt que celles qui n’en ont pas. C’est aussi simple que ça », fait remarquer Olivier Verdure. Les mieux référencés seront aussi les plus « responsive », soit les mieux adaptés aux supports mobiles. C’est indispensable dans la mesure où, d’après Pharmagest, 44 % des consommateurs santé/beauté s’informent en ligne, avant de se rendre en magasin (Web to store).
Le cas Facebook
Si Facebook n’est plus vraiment la coqueluche des réseaux sociaux chez les particuliers, le réseau est tout à fait approprié dans le cas d’une pharmacie. « En l’occurrence, Facebook est le seul réseau social, en termes d’ergonomie, qui est utilisable pour un commerce de proximité tel que la pharmacie », indique Olivier Verdure. Et c’est aussi le plus pourvoyeur d’auditeurs dans la tranche d’âge qui concerne la pharmacie, soit 25-34 ans, puis 34-44 ans.
Complémentaire du site Internet, il permet de maintenir un lien avec la patientèle en dehors de l’officine. Alors que dans le cas d’une pharmacie qui ne dispose pas d’une page Facebook, le contact est purement et simplement coupé une fois que le patient quitte la pharmacie. « L’intérêt d’une page Facebook régulièrement mise à jour (ou d’un blog intégré directement dans le site Internet de l’officine, NDLR) consiste à prodiguer des conseils et donc à fidéliser la patientèle. » L’autre intérêt est d’ordre technique. Car les mises à jour apportées à une page ou un blog relié au site d’une pharmacie permettront d’apporter du contenu au site et donc de flatter l’algorithme de Google, améliorant ainsi le référencement de la pharmacie.
Digitalisation et expérience client
Autre débouché de la digitalisation en pharmacie : les supports promotionnels, comme les écrans intérieurs et extérieurs. « Le pharmacien va pouvoir, à partir d’un outil de conception vidéo, concevoir des éléments promotionnels pour la patientèle », explique Olivier Verdure. Et pas seulement pour faire joli ! L’intérêt ici est d’améliorer l’expérience client, afin qu’il revienne. Attractifs, les écrans et supports promotionnels digitaux permettent aussi de diffuser plusieurs contenus à la suite, comme des promotions en parapharmacie, et de varier ainsi les thématiques sans encombrer une vitrine… Autre service rendu : un balisage pour assurer une meilleure gestion des flux et guider le consommateur dans ses déplacements, en indiquant par exemple le sens d’une file d’attente.
Gestion de l’officine 3.0
C’est sans doute l’un des plus gros morceaux lorsqu’il est question de digitaliser son officine. Robotisation, pilulier automatique, chaîne du froid… les systèmes de logistiques ne manquent pas pour fluidifier l’organisation. Certaines sociétés, comme FAKS, dispensent même des services en ligne, afin de fluidifier la communication entre pharmaciens et laboratoires sur des questions de litiges.
« Tous ces aspects annexes doivent être digitalisés. Le management, le support, le back-office, la logistique… Les outils digitaux ont pour objectif d’aider le pharmacien dans son métier et de lui faire gagner du temps afin qu’il soit disponible pour ses nouvelles activités », insiste Alexis Berebby.
Ce sont bien sûr aussi les logiciels de gestion d’officine (LGO) qui, traditionnellement, contiennent un panel très varié de fonctions : facturation assurance-maladie (système SESAM-Vitale accessible par carte Vitale et carte CPS validée par le GIE SESAM-Vitale) ; compatibilité avec le dossier pharmaceutique validé par le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) ; historique des délivrances de médicaments (ordonnancier) ; base de données des médicaments et produits de santé ; gestion des stocks de médicaments ; dossier patient informatisé (informations administratives, observations médicales en saisie libre ou par formulaires types et personnalisables).
Avec la publication, le 2 février 2022, de l’arrêté Ségur numérique à destination des officines, les LGO vont encore évoluer et intégrer plus de fonctionnalités. Ils devront donner la possibilité de consulter depuis des documents et données numériques reçus par MSS (messagerie sécurisée de santé) de la part de professionnels de santé, ou provenant du DMP (dossier médical partagé) patient ; de générer des documents et des données numériques comme des comptes rendus d’entretien pharmaceutique, un bilan partagé de médication (BPM), une note de vaccination afin d’alimenter le carnet de vaccination électronique (CVE) ; de transmettre des documents et données numériques par messagerie sécurisée de santé (MSSanté) vers un professionnel de santé ou vers le patient ; d’alimenter le dossier médical partagé (DMP) du patient ; d'intégrer dans les LGO des services « Application carte Vitale » et de « e-prescription » ; et enfin, de faciliter la prise en charge du patient en faisant évoluer le dossier pharmaceutique.
Ces exigences découlent de l’enrichissement du métier et des compétences du pharmacien derrière le comptoir, et trouvent des transcriptions techniques au gré des mises à jour par les fabricants. Pharmagest, PharmaVitale, Winpharma, etc., tous y vont de leurs solutions, ajoutant parfois des options annexes pour se différencier de la concurrence.
Digitalisation du point de vente
De retour dans l’officine physique, ce sont aussi les linéaires qui se digitalisent et remplacent les traditionnels linéaires OTC. Avec certains produits, un client n’a qu’à appuyer sur le produit souhaité et un robot disposé à l’arrière du linéaire lui prépare sa commande. Au-delà de l’aspect gain de temps et gestion des flux, ces solutions remplissent aussi une mission purement esthétique. Comment ? En présentant des facings toujours pleins, propres et bien rangés, même en cas de rupture de stock. Ils diffusent également des promotions et embarquent une gestion automatisée des stocks pour certains appareils. Des bornes interactives permettent également de régler sa commande directement avant de la récupérer au comptoir. Autant de solutions qui visent finalement un objectif ultime, fluidifier le, ou plutôt les métiers du pharmacien. Mais qui paradoxalement posent tous la même question : quid de la montée en compétences du pharmacien en matière de digital ?
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