Le Quotidien du pharmacien. - Dans quelles conditions les traitements pédiatriques doivent-ils être administrés au nourrisson ? Faut-il privilégier un même lieu, un même moment de la journée, une même personne qui administre, une position de l'enfant… ?
Dr Andréas Werner. - Ce qui est avant tout important, c'est que la personne qui administre le traitement soit une personne connue de l'enfant. Un visage qui fait partie de son environnement immédiat. En ce qui concerne le moment de l'administration, cela dépend un peu de l'âge de l'enfant. Lorsqu'il s'agit d'enfant en âge d'aller à la maternelle, il faut le réveiller un petit peu plus tôt pour tenir compte du temps nécessaire à la prise. Il convient d'éviter de donner le médicament dans la presse ou l'urgence d'un départ imminent. Prendre le temps de le faire tranquillement et éventuellement prévoir un moment pour l'explication et la discussion au cas où l'enfant refuse le produit. De façon générale, il faut éviter de donner le traitement dans un climat de conflit. Un conseil pour une meilleure acceptation : lorsque la solution médicamenteuse sort du réfrigérateur, son goût désagréable sera plus ou moins masqué et donc mieux accepté.
Pour les plus petits, le lieu de l'administration compte également. Il est important de choisir un environnement calme et rassurant : il convient ainsi de privilégier un endroit habituel et même, de préférence, un lieu où l'on mange. Quant à la position de l'enfant, dès qu'il peut tenir en position assise, il vaut mieux l'asseoir pour éviter les fausses-routes. Pour le nourrisson, le tenir dans les bras comme pour donner un biberon. Rappeler également aux parents que les pipettes d'injection doivent être appliquées contre l'intérieur de la joue et non pas tout droit dans la bouche. Contrairement à l'utilisation d'une seringue de vaccin, il s'agit de prendre toute la seringue dans le creux du poing et d'appuyer lentement avec le pouce.
Dans la mesure où le choix est possible, quelles sont les galéniques à privilégier, et celles à bannir ?
Tout cela est encore une fois une question d'âge. Si l'on prend l'exemple du paracétamol : les suppositoires sont plus ou moins conseillés. En effet, la résorption de cette galénique est tellement variable qu'on ne peut être sûr de la dose véritablement administrée. Per os, je recommande de rester sur le sirop jusqu'à 15 kg, puis d'utiliser la forme sachet jusqu'à 10 ans, puis de passer aux gélules.
Existe-t-il des « trucs » qui permettent d'améliorer l'acceptation du traitement par le nourrisson (diversion, jeu, rite d'administration) ?
La diversion par le jeu est une solution. C'est d'ailleurs l'une des rares occasions où je suis d'accord pour que l'enfant regarde un écran, par exemple pour l'administration d'un traitement aérosol de l'asthme. Si l'exposition aux écrans se limite à une minute et demie par jour, cela n'a rien de grave.
Peut-on conseiller la dilution du médicament dans l'eau, le lait ou une boisson sucrée ?
On peut le conseiller, mais à condition d'utiliser peu de liquide diluant. Car le risque est de ne pouvoir administrer toute la dose si l'enfant ne veut plus boire… Bien sût il faut prendre en compte les incompatibilités connues, le fluor ou les tétracyclines avec le lait et les produits lactés, par exemple.
À partir de quel âge est-il raisonnable de laisser un enfant prendre en charge son traitement ?
Il faut le faire assez tard. Et quoi qu'il en soit, il faut qu'un adulte soit présent pendant l'administration pour pouvoir exercer un contrôle. C'est une précaution qui vaut d'ailleurs même pour les gestes d'hygiène tels le brossage de dents. On observe qu'en général l'observance est assez rigoureuse de 7 à 13 ans, mais à l'adolescence il y a très souvent un relâchement…
Faut-il expliquer l'intérêt du traitement à l'enfant ?
Je dis généralement au cabinet que de 0 à 7 ans, on impose les choses, de 7 ans à 14 ans, on explique les choses, et à partir de 14 ans, on négocie. Chez les ados, la négociation fonctionne par exemple très bien sur le mode « ton hémoglobine glycosylée est supérieure à 6 ? Tu es privé de téléphone ».
Quelles sont, selon vous, les limites du conseil pédiatrique délivré par le pharmacien ? Autrement dit, quels sont les signaux d'alerte qui doivent le conduire à conseiller la consultation pédiatrique ?
Il y a une règle fondamentale à retenir : si la mère est inquiète, il faut l'orienter vers le médecin. Les mamans connaissent leurs enfants mieux que quiconque. Si elles rapportent que quelque chose de différent est survenu dans le comportement de leur enfant, il faut l'entendre et il faut que l'enfant soit vu. Il faut faire confiance à leur instinct.
Les pères sont-ils moins fiables à cet égard ?
Oui, un peu moins. Le lien père-enfant est plus fort à partir de l'adolescence. Dans la petite enfance, c'est le lien mère-enfant qui l'emporte. La relation du bébé à sa mère reste, au moins jusqu'à l'âge de 9 mois, une relation duale. Âge à partir duquel le père entre comme tiers séparateur dans le couple mère-enfant.
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