D’APRÈS UN ÉCHANTILLON de 79 786 adultes participant à l’étude NutriNet-Santé, 15 % des hommes et 28 % des femmes prennent des compléments alimentaires au moins 3 jours par semaine, principalement des produits contenants du magnésium et des vitamines B6 et C. Et près de la moitié de consommateurs de compléments alimentaires les utilisent en automédication (45 %). « Ce niveau d’automédication nous interpelle », déclare au « Quotidien » Mathilde Touvier, membre de l’équipe de coordination de l’étude NutriNet-Santé. « Il n’est pas anodin de prendre des vitamines, des minéraux ou d’autres substances à base de plantes physiologiquement actives. C’est pour cela que le Programme national nutrition santé recommande d’ailleurs de couvrir ces besoins par une alimentation équilibrée et diversifiée, sans avoir recours à ce type de produit », indique ce chercheur de l’INSERM qui a participé à ce volet spécifique de l’étude NutriNet sur la consommation de compléments alimentaires. D’après les résultats publiés en février dans le « British Journal of Nutrition », les personnes prenant ces produits sont pourtant ceux qui connaissent le mieux les recommandations nutritionnelles du Programme national nutrition santé (PNNS), qui consomment plus d’aliments bio, et qui ont globalement une alimentation et un mode de vie plus sains (non-fumeurs, plus d’activité physique et meilleurs apports nutritionnels). La prise de compléments est plus élevée chez les femmes, les plus âgées, les personnes divorcées, sans enfants, ayant un niveau d’étude et/ou une catégorie socio-professionnelle plus élevés. La lutte contre la fatigue reste la raison principale de prise de ces produits. En outre, 60 % des compléments sont consommés régulièrement depuis plus d’un an, avec une moyenne de 95 jours par consommation par an.
Des risques méconnus.
« Pour certaines catégories de population, des risques sont donc possibles », souligne Mathilde Touvier. « Certaines études commencent à suggérer qu’il pourrait y avoir des risques chez des personnes ayant des tumeurs latentes. Ce qui est prouvé également, c’est que les femmes ayant déjà eu un cancer du sein et qui sont particulièrement à risque d’en développer un ne doivent pas consommer des compléments à base d’extrait de soja, de phytoestrogène, de sauge. Plusieurs études montrent également que les compléments à base de gattilier, de DHEA, pourraient être dangereux chez des personnes ayant déjà eu certains cancers », relève le chercheur qui pose par ailleurs la question de la pertinence des conseils et prescriptions des médecins en matière de compléments alimentaires. « Lorsque des personnes se font par exemple prescrire des produits à base de vitamine A, vitamine E pour des problèmes de vision, le médecin ne va pas avoir forcément tout le dossier médical du patient sous les yeux. Or ces compléments alimentaires peuvent interférer avec des traitements », rappelle Mathilde Touvier. Environ 21 % des achats de ce type de produits font ainsi suite à un conseil médical et 33 % à une prescription. Le rôle du pharmacien est aussi non négligeable puisqu’il agit dans plus de 20 % des intentions d’achats de compléments alimentaires chez ces personnes participant à l’étude NutriNet.
Les fumeurs aussi.
Si les fumeurs prennent moins de compléments alimentaires que les non-fumeurs (19 % vs 25 %), leur consommation demeure importante et d’autant plus sujette à risque que les fumeurs s’avèrent plus enclins à l’automédication (55 % vs 45 %). Encore mal documentés, les effets des usages des compléments alimentaires chez ces personnes pourraient représenter un risque vis-à-vis du développement de certaines maladies. Ainsi 11 % des femmes fumeuses prennent des compléments à base de bêtacarotène. Or, cette substance augmente le risque de certains cancers, relève Mathilde Touvier. Si cette étude sur la consommation de compléments alimentaires réalisée à partir de la cohorte NutriNet n’est pas représentative de la population, comme peut l’être l’étude INCa2, « son intérêt est de pouvoir analyser très précisément des sous-groupes de population qui ne sont pas atteignables dans des études représentatives », indique la chercheuse qui va bientôt s’atteler à des travaux sur la consommation de compléments alimentaires chez les femmes enceintes et les personnes ayant déjà eu un cancer.
Industrie pharmaceutique
Gilead autorise des génériqueurs à fabriquer du lénacapavir
Dans le Rhône
Des pharmacies collectent pour les Restos du cœur
Substitution par le pharmacien
Biosimilaires : les patients sont prêts, mais…
D’après une enquête d’UFC-Que choisir
Huit médicaments périmés sur dix restent efficaces à 90 %