LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- En arrivant, il y a un plus d’un an à la tête de Pierre Fabre Dermo-cosmétique (PFDC), quelles ont été vos priorités d’action ?
ÉRIC DUCOURNAU.- Lorsque j’ai pris mes fonctions de PFDC, je n’étais pas tout à fait nouveau dans l’entreprise. En effet, depuis 2000, j’ai eu la chance d’évoluer au sein du groupe Pierre Fabre en occupant différents postes, ce qui m’a permis d’en appréhender les spécificités et la culture. En arrivant à la tête de PFDC, j’ai souhaité orienter la division selon trois axes distincts mais complémentaires. Ainsi je travaille depuis plusieurs mois à l’internationalisation de nos marques, notamment sur les marchés asiatiques et sud-américains. Je reviens par exemple du Mexique où Avène est déjà promis à un bel avenir. Ma seconde priorité est de continuer à investir dans la recherche et le développement à hauteur de 5 % de notre CA en dermo-cosmétique, ce qui constitue un ratio dans le très haut de la fourchette du secteur. Parallèlement, j’ai engagé le renouvellement de notre modèle commercial.
Comment se portent les marques Pierre Fabre Dermo-cosmétique en ce début d’année 2014 ?
Nous avons eu récemment confirmation qu’Avène a une nouvelle fois été en 2013 la première marque dermocosmétique en Europe. C’est pour nous une grande nouvelle. Cette marque, à elle seule, représente plus de 60 % de notre chiffre d’affaires qui s’élève au total à environ 1,1 milliard d’euros. Trois autres marques dépassent les 100 millions d’euros de CA par an, il s’agit de Pierre Fabre Dermatologie, Ducray et Klorane. Ensuite viennent A-Derma, René Furterer et Galénic. Il faut savoir que toutes ces marques font plus de 50 % de leur chiffre à l’international. Ce qui montre que l’on n’est pas uniquement dépendant du marché français. Enfin, deux marques locales dont on parle rarement, Glytone pour les USA, et Darrow pour le Brésil, affichent pourtant des taux de croissance de 15 %.
Le groupe Pierre Fabre a toujours été, historiquement, tourné vers les pharmaciens. Que fait aujourd’hui Pierre Fabre Dermo-cosmétique pour confirmer ce choix stratégique ?
Nous n’avons en effet jamais abandonné le circuit des pharmaciens où l’entreprise est née. PFDC doit tout à la pharmacie et aux pharmaciens. Nous l’avons même, à l’occasion, défendu. Pour nous, le pharmacien est un relais indispensable, très complémentaire du dermatologue, et il est aussi un professionnel de santé qui conseille au quotidien. Et même lorsque nous sommes à l’international, si besoin nous récréons le modèle du conseil pharmaceutique dans les pays sans tradition officinale. En Chine, où Avène est N° 1, nous sommes à la fois en pharmacie, en drugstores et en department stores. Prenons l’exemple d’Avène aux États-Unis : sur les 120 produits commercialisés là-bas, on en réserve une trentaine au médecin qui souhaite avoir sa spécificité au travers de son activité de dispensing. Mais les autres produits s’appuient sur le conseil pharmaceutique en drugstores ou pharmacies.
En matière de formation et d’aide au conseil, développez-vous de nouveaux outils à l’intention du pharmacien ?
Il existe des outils technologiques, tel Pharmaweb dédié aux pharmaciens, qui est le pendant de Dermaweb, l’outil d’accompagnement des dermatologues. Nous avons de plus résolument orienté nos réseaux de formation sur le conseil à l’officine et sur l’accompagnement des ventes. C’est une véritable nouveauté, une évolution importante qui s’est adaptée à la professionnalisation du point de vente pharmacie et de son personnel. Il faut que les laboratoires comme le nôtre soient partenaires de cette évolution. C’est avec ce souci que nous avons été amenés à revoir notre organisation commerciale et à accompagner les officinaux en matière de merchandising et de formation axés sur le point de vente.
Après avoir été longtemps opposé à la vente de ses produits sur Internet, où en est aujourd’hui PFDC sur cette question ?
Ce qui a changé, c’est qu’en 2013, au terme d’un petit périple réglementaire et judiciaire de plus de 6 ans, nous avons été contraints de nous ouvrir à ce type de vente. Voilà pour les faits. Mais dans l’esprit, chez Pierre Fabre, nous restons convaincus d’une chose : le conseil ne peut être délivré par une machine. On ne peut pas à la fois prétendre intervenir sur des questions de peaux qui sont de plus en plus compliquées avec un suivi de cosmétovigilance, et, de l’autre côté, laisser le produit sans accompagnement ni explication au patient. Ce que nous observons aujourd’hui, c’est que ce commerce en ligne a débuté, cependant il reste quantitativement très limité. Et même si l’on regarde outre-Atlantique, où ce mode de distribution est autorisé depuis plusieurs années, on constate qu’il ne représente que 10 % des ventes. Par ailleurs aucune solution technologique ne permet d’accompagner de façon satisfaisante le conseil. Ni le téléphone, ni la Webcam, ni le courrier électronique ne peuvent convenir. Vous ne trouverez aucun professionnel de santé qui acceptera d’engager sa responsabilité par ces moyens-là, et c’est très bien car cela préserve leur crédibilité. Enfin, ce qui est à craindre également avec ce média de vente, c’est la cannibalisation des points de vente. Le client se renseigne sur le point de vente physique et va ensuite acheter en ligne…
Quels sont selon vous les atouts du pharmacien pour conserver sa légitimité dans le domaine de la dermocosmétique ?
D’abord sa formation, et celle de son personnel dont il a aussi la responsabilité, qui assure la qualité du conseil officinal. Son deuxième atout, c’est sa politique de prix, que le pharmacien français a énormément travaillée de façon à rester toujours accessible. Et enfin, une politique d’accessibilité au patient qui a été extrêmement développée ces dernières années. On l’a vu de façon très spectaculaire chez nos voisins portugais qui ont développé les drive-in, ont étendu leurs horaires d’ouverture et renouvelé et modernisé leurs points de vente. La pharmacie est un des circuits qui s’est le plus transformé ces dernières années.
Moderniser leur officine et en favoriser l’accès, c’est le conseil que vous donneriez aux pharmaciens français ?
On n’a pas besoin de leur donner, les officinaux sont déjà engagés dans cette voie. Et notre laboratoire a le devoir de les accompagner en cela.
Certes, mais il ne faudrait pas tomber dans les standards de la grande distribution…
Ce ne sera jamais le cas car, quelles que soient les ressemblances avec d’autres réseaux, l’officine aura toujours pour elle cet atout unique qu’est le conseil professionnel et personnalisé.
Industrie pharmaceutique
Gilead autorise des génériqueurs à fabriquer du lénacapavir
Dans le Rhône
Des pharmacies collectent pour les Restos du cœur
Substitution par le pharmacien
Biosimilaires : les patients sont prêts, mais…
D’après une enquête d’UFC-Que choisir
Huit médicaments périmés sur dix restent efficaces à 90 %